Agriculture : qu'est devenue la loi Duplomb deux mois après son adoption ?

Adoptée à la suite du mouvement de colère des agriculteurs durant l’hiver 2024, la loi Duplomb devait marquer un tournant. Elle est pourtant aujourd’hui en grande partie restée lettre morte. Malgré son adoption le 8 juillet et sa promulgation par Emmanuel Macron le 11 août, aucun décret d’application n’a encore vu le jour. Et sur le terrain, l’impatience monte.

La loi Duplomb, du nom du sénateur Les Républicains, Laurent Duplomb, à l’origine du texte, avait été présentée comme une réponse concrète aux attentes des agriculteurs : simplification des procédures pour agrandir des exploitations, construction facilitée de réserves d’eau, allégement de certaines contraintes environnementales.

Mais pour que ces mesures entrent en vigueur, il faut encore que les décrets d'application soient publiés par le ministère de l’Agriculture. En moyenne, une loi met entre sept et huit mois à être pleinement appliquée en France. Pour la loi Duplomb, les premiers décrets ne sont pas attendus avant la fin du mois de septembre. Une lenteur qui alimente la frustration dans les campagnes.

Mobilisation en vue ?

Du côté de la FNSEA, principal syndicat agricole, la pression monte. Si les moissons, les vendanges et les autres travaux de saison occupent encore les exploitants, l’idée de nouvelles mobilisations fait déjà son chemin. Le syndicat agricole appelle à "une grande journée d’action" autour des questions des échanges internationaux pour les produits agricoles le vendredi 26 septembre à travers toute la France, a annoncé son président Arnaud Rousseau dans un entretien au Journal du dimanche.

Cette mobilisation aura lieu contre "le Mercosur, les taxes imposées par Donald Trump et le flot des importations internationales qui ne respectent pas les normes qui sont les nôtres", a expliqué le dirigeant. "Les actions sont à l'appréciation des fédérations départementales mais ça peut prendre la forme de visite de grandes surfaces pour aller chercher tous les produits non conformes", a indiqué un porte-parole du premier syndicat agricole français, qui mènera ces actions avec les Jeunes Agriculteurs (JA).

Les représentants syndicaux préviennent : si les décrets ne sortent pas rapidement, les tracteurs pourraient bientôt reprendre la route. Car au-delà des décrets, la loi elle-même pourrait faire l’objet d’un nouveau débat à l’Assemblée nationale, sous l’impulsion d’une pétition lancée cet été par des organisations écologistes.

Avec plus de 2 millions de signatures recueillies, bien au-delà des 500.000 nécessaires pour relancer l’examen parlementaire, le retour du texte sur les bancs de l’Hémicycle semble désormais inévitable. Une date devrait être annoncée dès mercredi 17 septembre.

Une loi déjà amputée par le Conseil constitutionnel

Autre source de tensions : la censure partielle de la loi par le Conseil constitutionnel. Les "sages" ont notamment rejeté l’article concernant la "réautorisation" de l’acétamipride, un pesticide interdit en France mais encore autorisé au niveau européen, notamment sur les cultures de betteraves ou de noisettes.

La FNSEA réclame désormais un nouveau projet de loi pour rétablir cette disposition. Elle plaide pour une harmonisation des règles à l’échelle européenne : selon le syndicat, les agriculteurs français ne doivent pas être pénalisés face à leurs concurrents.

Aujourd’hui la fracture semble inévitable, entre d’un côté, des agriculteurs qui demandent davantage de souplesse réglementaire pour faire face aux défis économiques et de l’autre, des collectifs écologistes qui dénoncent un retour en arrière en matière de protection de l’environnement.

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