Affaire Roger Matassoli : l'avocate de l'auteur du crime dénonce le traitement "complètement scandaleux" réservé à son client

Le 4 novembre 2019, l'abbé Roger Matassoli, 91 ans, est retrouvé mort chez lui, à Ronquerolles, hameau de la commune d'Agnetz (Oise). Son corps est découvert sur le dos, avec les yeux enfoncés et un crucifix coincé dans la gorge. 

Ce même jour, Alexandre, 19 ans, est arrêté par des gendarmes de Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) alors qu'il conduit le véhicule de la victime. Son état est jugé incompatible avec une garde à vue, il est envoyé en hôpital psychiatrique. Le lendemain, une autopsie du corps de la victime, révèle que l'abbé Matassoli est décédé par asphyxie après avoir été roué de coups. 

Un mois après le drame, en décembre 2019, Alexandre, schizophrène diagnostiqué, est incarcéré pour "meurtre aggravé avec actes de torture et de barbarie". Son avocate, Me Caty Richard revient dans Les Voix du Crime sur les pratiques judiciaires contestées appliquées au jeune meurtrier.

Pour moi, on ne respectait ni le droit des justiciables, ni le droit des malades

Maître Caty Richard

Lors de la garde à vue qui précède l'incarcération d'Alexandre, son avocate ne peut être présente. Il est alors assisté par une de ses consœurs. Me Richard exprime dénonce ce processus judiciaire : après sa mise en examen, Alexandre est incarcéré en détention sur décision du juge d'instruction. Pourtant, l'adolescent, malade, n'est pas accompagné dans son processus de soin.

La schizophrénie du jeune homme, manifestée à la suite des sévices à répétition de l'abbé Matassoli à son égard, n'a pas été assez prise au sérieux par le juge d’instruction pense Me Richard. "Si Alexandre avait été sur un lit d'hôpital sous perfusion parce qu'il avait une autre maladie, on ne lui aurait pas passé les pinces pour l'emmener en prison", s'émeut-elle.

Peu de temps après l'hospitalisation sous contrainte d'Alexandre, le 5 novembre 2019, Me Caty Richard publie pour la première fois un communiqué dans lequel elle dénonce un "scandale judiciaire et humain" quant au traitement réservé à Alexandre. "Ce que j'avais dit, c'était que pour moi, on ne respectait ni le droit des justiciables, ni le droit des malades" explique-t-elle.

On sait qu'on a des gens qui, normalement, ne devraient pas être en détention avec les autres et qui sont en détention avec les autres

Maître Caty Richard

"Je comprends que quelqu'un qui a commis un crime soit incarcéré. Mais d'abord, il y a des hôpitaux pénitentiaires, où (Alexandre) va être ensuite envoyé. Mais moi, ce que je voulais, c'était qu'il y aille tout de suite, qu'il passe de l'hôpital sous contrainte à l'hôpital pénitentiaire. Alors que là, le 26 décembre, il était forcément envoyé en détention avec tout le monde" affirme Me Richard. Malgré son incarcération, aucun responsable n’est là pour accueillir Alexandre, à qui il est reproché un manque de garantie de représentation.

"La problématique, c'est de savoir si la personne était ou non, au moment des faits, en pleine possession de son discernement. Est-ce qu'il avait son discernement altéré ou aboli ? Et pour le cas où il est aboli, il est irresponsable pénalement, pas jugé. Donc déjà, on sait qu'on a des gens qui, normalement, ne devraient pas être en détention avec les autres et qui sont en détention avec les autres" explique Me Richard.

Deux ans après les faits, en juillet 2021, Alexandre est déclaré pénalement irresponsable de ses actes par la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Amiens et transféré dans un établissement psychiatrique.

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