Affaire Pelicot, prédateurs sexuels… Le réalisateur Ludoc revient sur l'historique du dangereux site Coco.fr

En juin 2014, alors qu'il est à Los Angeles, le réalisateur-youtubeur Ludoc reçoit une mystérieuse demande de contact sur le logiciel Skype. Il s'agit d'un dénommé Pascal, âgé de 58 ans. Dix ans plus tard, il décide de publier sur YouTube "Comment j'ai traqué et fait arrêter un prédateur - 4 ans d'enquête", un documentaire dans lequel il dévoile les coulisses de la traque numérique de cet homme qui s'avérera être un pédocriminel.

Dès la prise de contact, le prédateur et Ludoc échangent. Ce dernier se fait passer pour un adolescent de 14 ans. La conversation prend une tournure étrange lorsqu'il découvre les intentions malsaines de son interlocuteur. L'homme de 26 ans s'engage dès lors dans une course contre la montre pour rassembler des preuves.

Au fil de son investigation, il apprend que le prédateur a pris connaissance de l'existence de son compte via Coco.fr. Le site de chat en ligne est aujourd'hui connu pour avoir été utilisé par Dominique Pelicot, l'homme au cœur du scandale des viols de Mazan, qui recrutait d'autres hommes dans le but de faire violer sa femme Gisèle. Dans Les Voix du crime, Ludoc revient sur les liens étroits entre les deux affaires.

Un expert judiciaire en informatique va essayer d'accumuler un maximum de preuves pour, au moment du procès, pouvoir l'accuser et peut-être même découvrir d'autres choses.

Ludoc

"Ce qui est assez intéressant lorsqu'on arrête un prédateur, c'est qu'on va prendre tous ses disques durs, les donner à un expert judiciaire en informatique qui va essayer d'accumuler un maximum de preuves pour, au moment du procès, pouvoir l'accuser et peut-être même découvrir d'autres choses... C'est ce qui s'est passé dans l'affaire Pelicot", remarque-t-il.

En septembre 2020, Dominique Pelicot est surpris dans un supermarché de Carprentras (Vaucluse) par un agent de sécurité. Ce dernier filmait sous la jupe d'une femme. Il est arrêté et placé en garde à vue dans la foulée par la police. "En l'arrêtant et en se disant 'on va peut-être fouiller dans son téléphone et dans ses disques durs', ils ont découvert plein de photos et de vidéos de sa femme qui se faisait effectivement violer", explique Ludoc.

Pour mener à bien sa démarche, Ludoc explique dans son documentaire avoir fait appel à la Brigade de Protection des Mineurs (BPM), auprès de qui il a déposé une main courante en juin 2014. Le service use de nombreuses pratiques spécifiques pour traquer les prédateurs d'Internet. 

Ils repèrent d'abord leurs cibles sur Coco, et ensuite, ils font la transition sur Skype.

Ludoc

Ludoc voit également un lien direct entre les deux affaires. "Il y a un petit point commun : on découvre des nouveaux crimes grâce à l'expertise judiciaire en informatique", note-t-il. Derrière les écrans, se cachent les preuves de délits et crimes sexuels, comme des échanges sur Coco.fr. Le site, fermé depuis juin 2024, était un passeport des échanges intra-criminels.

"(Dominique Pelicot) y recrutait les différentes personnes qui allaient violer sa femme, et discutait avec elles sur Skype. Donc, c'était vraiment une sorte de méthode où, pareil qu'avec les prédateurs : ils repèrent d'abord leurs cibles sur Coco, et ensuite, ils font la transition sur Skype", explique Ludoc. C'est la manière dont le prédateur a procédé avec lui.

Comment le nom de Ludoc s'est-il retrouvé sur Coco.fr ? "Il y avait plein de canaux de discussion avec des enfants qui pouvaient discuter de sujets sur la vie, les vidéos qu'ils regardent sur YouTube, le Studio Bagel par exemple (...) C'est comme ça qu'à mon avis, il a récupéré mon nom. Il pouvait aussi y avoir des prédateurs, des pédocriminels ou même des gens qui recrutent en effet des futurs agresseurs et des futurs violeurs", ajoute-t-il. 

D'autres victimes ont également fait les frais du dangereux site lancé en 2003 par Isaac Steidl : celles-ci se sont parfois retrouvées dans des guet-apens homophobes. C'est le cas d'Alain qui a été victime en septembre 2023 d'un piège tendu six hommes. Le cinquantenaire a été roué de coups, insulté et "laissé un peu pour mort", confiait-t-il en octobre 2023, au micro de RTL. Le site a aussi été mis en cause dans le meurtre de Philippe, 22 ans dans la commune de Grande-Synthe (Nord). Agressé mortellement dans la nuit du 15 au 16 avril 2024, le jeune homme avait été contacté par trois individus sur le site.

>> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.


Deux fois par mois, l'une de ces Voix du crime nous raconte son point de vue sur une affaire criminelle. Un podcast RTL.

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