Affaire Maud Maréchal : qui avait intérêt à la voir brûler vive ?

Mardi 14 mai 2013, 3h35 du matin, une patrouille de police sillonne la ville endormie de Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne). À même le trottoir, au pied d'une allées de tuyas, il y a un corps carbonisé, en chien de fusil, posé sur le flanc gauche. C'est celui d'une jeune femme, environ un mètre soixante.

Les jambes sont intactes tout comme son short en jean. Le haut du buste et le visage ont été en revanche ravagés par les flammes. La victime est méconnaissable. Sur place, les enquêteurs repèrent une traînée d'hydrocarbure.

La victime a été aspergée d’essence. Elle a tenté de s'enfuir mais son meurtrier l’a embrasée. Pas de traces de coups ou d'agression sexuelle. Selon le légiste, la victime a été brûlée vive entre 2 et  3 heures du matin. Elle s'est mise à courir, a tourné sur elle-même avant de s'effondrer dans une douleur indicible.

Mardi, milieu de matinée, la victime est identifiée. Il s'agit de Maud Maréchal, 20 ans. Titulaire d'un bac pro, serveuse au restaurant "La Criée". À l'annonce du drame, ses parents, Françoise et Michel Maréchal, s'écroulent. Tout comme son frère, Nicolas. La veille au soir, il était avec sa sœur chez Marion, la meilleure amie de Maud. Une soirée entre copains.

Elle était à dix minutes à pied de chez elle

Les six invités sont entendus. Tous racontent la même chose : la soirée était agréable, sans excès, Maud allait bien. Marion raconte que ses invités ont commencé à partir vers 23 heures. Maud et Marion ont discuté jusqu'à 2h30 du matin. Elle était à dix minutes à pied de chez elle. Dans la rue, elle a allumé une cigarette. Le mégot retrouvé n'a pas été fumé jusqu'au bout. Elle a été tout de suite attaquée.

Pour la brigade criminelle de Versailles, la victime était attendue par quelqu'un qui la connaissait. Durant la nuit, un couple de riverain dit avoir entendu un cri strident de femme avec ces mots : "Arrête, arrête". D'autres habitants du quartier assurent avoir aperçu un individu d'environ un mètre soixante-dix, portant un sweat avec une capuche relevée vers 23h30, minuit, puis à une heure du matin. 

La piste de la vengeance 

Samedi 25 mai 2013, onze jours après l'assassinat de Maud Maréchal, 500 personnes lui rendent hommage lors d’une marche blanche à Lagny-sur-Marne. Aux enquêteurs, le légiste, le docteur Bernard Marc a tout de suite décrit une scène relevant du guet-apens.

Une victime qui tentait de s’enfuir face à un agresseur déterminé. "Il est difficile d'envisager que l'auteur des faits ne connaissait pas la victime et réciproquement", confirme le procureur de Meaux. La brigade criminelle fait le tour de la famille et des amis de la jeune femme. Aucun de ses proches ne retient l'attention. 

Maud Maréchal avait une vie sociale intense. La jeune femme connaissait beaucoup de monde, sortait beaucoup, notamment en discothèque, et se liait facilement d'amitié. Ces derniers temps, Maud Maréchal avait un nouveau petit ami, un peu plus âgé qu'elle, prénommé Logan. De retour de ses vacances au Portugal, c'est chez lui qu'elle a passé la nuit. Les policiers se demandent pourquoi ce garçon ne l'a pas accompagnée à la soirée entre amis.

Il est interrogé. Son alibi est vérifié et confirmé. Une autre piste est privilégiée. Un garçon appelé "Le Gitan" avec lequel Maud avait entretenu une brève relation avant de rompre la menaçait de "brûler sa maison et toute sa famille avec". Ce suspect est rapidement écarté, son téléphone borne à des centaines de kilomètres de la Seine-et-Marne la nuit de l'assassinat. 

Les enquêteurs n’ont pas d’éléments décisifs permettant d’inculper un suspect en particulier

Guillaume Poingt, journaliste faits divers au Figaro

Samedi 13 mai 2023, dix ans après la mort de Maud Maréchal, le procureur de Meaux, assure que l’enquête continue. Selon lui, au moins cinq gardes à vue, même si elles n’ont pas abouti, retiennent toujours l’attention de la justice.

Le procureur évoque "le scénario d'un homme qui soit par dépit amoureux, soit par déception de ne pas avoir été aimé, se venge. La piste de quelqu'un totalement extérieur n'est pas la plus privilégiée" affirme le magistrat. Dans L'Heure du crime, Guillaume Poingt, journaliste fait divers au Figaro explique : "Les enquêteurs n’ont pas d’éléments décisifs permettant d’inculper un suspect en particulier".

"La piste recherchée par la police est l’environnement amoureux de Maud Maréchal, précise Me Stéphanie Thierry-Leufroy sur RTL. Ils ont regardé tout ceux qui pouvaient la convoiter [...] Ce n’est pas parce qu’il y avait une relation amoureuse que cela faisait de quelqu'un un potentiel coupable. Un a été mis en garde à vue, la garde à vue a été levé rapidement, cela reste le point d’interrogation de cette enquête."

Un film primé aux César 

Mercredi 13 juillet 2023, le film La Nuit du 12, signé du réalisateur Dominik Moll, sort dans les salles de cinéma. Directement inspiré du livre de la journaliste Pauline Guéna qui avait passé une année avec la police judiciaire de Versailles.

Une fiction qui relate l'histoire de Maud Maréchal, sans aborder toutes les pistes ouvertes par la police, notamment que l’assassin soit une femme. "Il y avait une hypothèse extrêmement crédible, celle d'une femme jalouse dont Maud aurait fréquenté le mari ou le compagnon" confirme la commandante Stéphanie Duchâtel. Peut-être faut-il également chercher une réponse de côté-là ? 

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Bernard Marc, médecin légiste, expert auprès de la Cour d’appel et auteur du livre Médecin légiste pour les morts et les vivants, publié aux éditions Mareuil.

- Guillaume Poingt, journaliste faits divers au Figaro.

- Me Stéphanie Thierry-Leufroy, avocate au barreau de Meaux et avocate des parents de Maud Maréchal.

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