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Une battue organisée à Montfort-sur-Meu (Ille-et-Vilaine) au moment de la disparition de Magali Blandin, retrouvée morte tuée par son mari en mars 2021.
Crédit : DAMIEN MEYER / AFP
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Magali Blandin était mère de quatre enfants et elle était en danger, humiliée et menacée en silence par son mari. Dans un carnet, elle avait écrit ses craintes, pressentait que le pire allait arriver. Elle ne se trompait pas. En secret, l’époux préparait le plus machiavélique des scénarios pour l’éliminer. Un meurtre écrit à plusieurs mains, en famille, ce devait être le crime parfait.
Le 12 février 2021 dans l'après-midi, Aurélie, une collègue de travail de Magali Blandin, contacte la gendarmerie. Les deux femmes se connaissent bien, toutes deux éducatrices spécialisées dans une association installée à Rennes. Aurélie explique que Magali n'est pas venue chercher ses quatre enfants à l'école. Ça ne lui ressemble pas, sa collègue est toujours très ponctuelle. Même si les routes sont mauvaises et enneigées, elle serait venue à l’école.
Magali, qui est en instance de divorce, a ce week-end la garde des enfants. Les gendarmes de Montfort-sur-Meu prennent au sérieux la disparition de Magali Blandin, 42 ans, 1m50, très souriante. Ils apprennent que la veille, elle ne s'est pas présentée chez sa psychologue. Son mari, Jérôme Gaillard, 45 ans, est contacté. Il vit à quelques kilomètres, dans une longère familiale. Il est surpris que son épouse soit absente. "Ce n'est pas normal, même si nous sommes en bataille pour la garde et le divorce, c'est une très bonne mère", déclare-t-il.
Lundi 15 février, une enquête pour disparition inquiétante est ouverte au parquet de Rennes. Un témoin croit avoir aperçu Magali Blandin sortir de chez elle le jeudi 11, vers 10h du matin. Elle semble être partie avec ses papiers d'identité, sa carte bancaire et ses deux téléphones portables. Selon le bornage d'un appareil, elle s’est dirigée vers le nord, une zone de bocage et d'étangs.
Les gendarmes relient la disparition au contexte tendu qui règne au sein du couple. Cinq mois avant de s’évaporer, Magali Blandin a déposé plainte pour violences contre Jérôme Gaillard. Elle décrit un climat d'agressivité qui dure depuis des années. En décembre 2019, son mari s'en est pris à elle car elle fumait une cigarette sur le pas de la porte. Il lui a ordonné de rentrer et d'aller se laver.
Elle a refusé, il l'a aspergée avec un désinfectant pour chaussures. Elle s'est mise à suffoquer. La scène s'est reproduite au mois de mars, Jérôme l'a poussée violemment en arrière, sa tête a heurté le bitume. Depuis des mois, violences et intimidations sont quasi quotidiennes. "Il y a eu des violences conjugales pendant 15 ans", déplore Amy Bah, présidente de l’association Nous Toutes, le féminicide "c'était l'aboutissement final".
"C'est quelqu'un qui n'a jamais montré sa violence devant moi. Par contre c'est quelqu'un qui veut être flamboyant, qui fait le malin, qui est parfois bizarre. C'est quelqu'un qui veut être sur le devant de la scène. Quand on sait qu'elle a disparu, évidemment je pense à lui", décrit Valentin Gendrot, invité de L'Heure du Crime. Journaliste et auteur du livre Un jour, ça finira mal, il est le cousin germain de Jérôme Gaillard.
Les recherches ne mènent nulle part, la victime est toujours portée disparue. Son mari a un alibi solide, mais reste suspecté par les enquêteurs. Mais le 4 mars 2021, Jérôme Gaillard se présente devant le juge d'instruction rennais. Contre toute attente, il ne vient pas s’informer de l’enquête sur la disparition de sa femme, il veut dénoncer une tentative de chantage et d'extorsion de fonds.
Ses parents, Jean et Monique Gaillard, ont trouvé dans leur boîte aux lettres une grande enveloppe. À l'intérieur, une demande de 15.000 euros, sinon leur fils sera dénoncé comme le meurtrier de son épouse. Une clé USB est jointe au courrier, on y entend la voix de Jérôme Gaillard qui prononce ces trois phrases : "Si la famille de Magali apprend ça, je suis détruit", "J'aime ma femme plus que tout mais je n'ai pas d'autre choix que de la tuer" et "Ça doit se passer un mercredi car j'ai mes quatre enfants". Le mari dit avoir brûlé la lettre mais les parents en ont reçu une deuxième. Jérôme Gaillard raconte que sous l'effet de la colère, il a pu prononcer ces mots enregistrés à son insu. Mais il s'est repris et n'a rien fait à Magali.
Dix jours plus tard, cinq Géorgiens sont arrêtés. L’un d’eux explique que le mari leur avait proposé 20.000 euros pour qu’ils fassent disparaître sa femme. Ils ont refusé mais ils en ont profité pour le faire chanter. Le principal suspect s'est jeté dans la gueule du loup, les enquêteurs vont finir par découvrir qu'il n'a pas agi seul.
Jérôme Gaillard raconte aux enquêteurs qu'il avait informé ses parents de son intention de tuer Magali le jour de Noël. À la fin du déjeuner, il leur a annoncé : "Ma décision est prise". Les parents n’ont pas protesté, ils sont résolus à cette idée. Jean, le père, a même accepté d'aider son fils. Le matin du meurtre, il est allé chez Jérôme, a utilisé l’ordinateur et le téléphone pour faire croire qu’il était là, alors que son fils tuait Magali. Les parents ont toujours gardé le silence.
Les parents de Jérôme Gaillard, Jean, 75 ans, et Monique, 72 ans, sont eux aussi interrogés. Ils étaient informés dès le début du plan criminel. Jérôme, selon eux, avait même évoqué son désir de tuer Magali devant ses propres fils, les deux aînés. Les parents ont suivi, ils ont même prélevé 50.000 euros sur leurs économies pour que Jérôme puisse payer les hommes de main géorgiens.
Dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre, il se pend à la grille de la fenêtre de la cellule avec une cordelette faite de draps déchirés. Il laisse derrière lui une lettre de trois pages dans laquelle il rend responsable Magali de cette tragédie. Le 7 février 2023, presque deux ans plus tard, Jean et Monique Gaillard sont retrouvés pendus dans la salle à manger de leur maison.
- Valentin Gendrot, journaliste et auteur du livre Un jour, ça finira mal, publié aux éditions Stock, il est le cousin germain de Jérôme Gaillard.
- Amy Bah, présidente de l’association Nous Toutes.
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