Le constat est amer. Et il est dressé par Emmanuel Macron lui-même. "Notre maison commune est en désordre, à l'image de notre monde". Alors que l'Organisation des Nations unies célèbre ses 75 ans d'existence, le président français a, mardi 22 septembre, fait un bilan implacable de l'institution onusienne "minée par les rivalités".
"Ses fondations s'érodent, ses murs se lézardent, estime le chef de l'État, parfois sous les coups de boutoir de ceux-là même qui l'ont construite". À savoir les plus puissants États-membres, assis autour de la table du Conseil de sécurité : Russie, Chine, États-Unis, France, Grande-Bretagne. Conséquences : "Des tabous que l'on pensait inviolables sont levés : la guerre d'annexion, l'usage de l'arme chimique, la détention de masse, dans l'impunité".
Lundi encore, Washington annonçait unilatéralement des sanctions controversées contre l'Iran. Il est bien loin l'esprit du multilatéralisme que symbolisait alors l'ONU à sa création à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Son secrétaire général Antonio Guterres a lui-aussi déploré "un déficit de solutions multilatérales" face aux trop nombreux "défis multilatéraux".
Créée pour que plus jamais le monde ne connaisse de conflit à l'échelle du globe, l'ONU est, depuis la fin de la guerre froide, surtout cantonné à un rôle d'observateur impuissant, paralysé par les vetos en série brandis par Moscou, Washington ou Pékin, afin de préserver leurs intérêts propres.
En cela, la crise du coronavirus a peut-être apporté le coup de grâce à une institution moribonde, affaiblie par le manque de collaboration devant les nouveaux enjeux planétaires, tel le réchauffement climatique. Confronté à la pandémie, les pays ont agi individuellement, avec confinements et fermetures de frontières, sans réelle concertation ni coopération.
Trump, Erdogan, Xi, Poutine, Rohani, Macron... Chacun des grands de ce monde nourrissent des rivalités intestines, illustrées récemment par l'escalade des tensions sino-américaines et la défiance de l'Europe face à la Russie. La réponse censée apporter l'ONU se voit donc plombée. "Les grandes puissances ont manqué ce rendez-vous, provoquant l'échec, même la déconfiture, du Conseil de sécurité", estime Bertrand Badie, professeur à l'Institut d'études politiques de Paris (IEP).
Pourtant, selon Emmanuel Macron, c'est bien par les États-membres qui doivent trouver des solutions aux enjeux internationaux. "Face à l'urgence sanitaire, face au défi climatique, face au recul des droits, c'est ici et maintenant qu'il faut agir (...) en exploitant tous les espaces possibles de coopération".
Pour le président français, qui rappelle la Charte des Nations unies, chantre du multilatéralisme célébré à l'occasion de ce 75e anniversaire onusien, il est temps d' "être à la hauteur des engagements qui furent les nôtres alors que les armes ne s'étaient pas encore tues à l'autre bout du monde".
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