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"L'Algérie ne peut pas vivre sans la France" : Boualem Sansal dénonce "une dictature brutale, méchante, cruelle" et appelle à "rapiécer" les relations entre les deux pays

Au lendemain de la condamnation en appel du journaliste français Christophe Gleizes à sept ans de prison en Algérie, l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, gracié le mois dernier après un an de détention, livre une analyse féroce du pouvoir algérien et de ses rapports avec la France. Sur RTL, il évoque une “mascarade judiciaire”, un pays “sans pouvoir unique” et des relations bilatérales que l’Algérie, selon lui, ne peut pas rompre.

L'écrivain Boualem Sansal en interview sur RTL le 4 décembre 2025

Crédit : RTL

"C'est une dictature" : Boualem Sansal dénonce sur RTL un "acharnement" de l'Algérie après la condamnation en appel du journaliste français Christophe Gleizes

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Marc-Olivier Fogiel - édité par Yasmine Boutaba

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“C’est une mascarade", a tranché Boualem Sansal, condamné à cinq ans de prison pour avoir évoqué publiquement la question des frontières héritées de la colonisation avant d’être gracié par le président algérien. Ce mercredi 3 décembre, en appel, le journaliste indépendant Christophe Gleizes a écopé de sept ans de prison pour apologie de terrorisme. Une décision que l’écrivain franco-algérien a jugé emblématique d’un système qu’il décrit comme incohérent et arbitraire. 

"La justice condamne et le gouvernement va gracier. Mais c’est aussi parce qu’il n’y a pas de pouvoir unique en Algérie. On ne sait pas qui gouverne ce pays depuis toujours. Pour l’immense majorité des Algériens, le président est une marionnette", avance-t-il.

Au-delà de l'affaire concernant Christophe Gleizes, l’écrivain s’est attardé sur les relations franco-algériennes. “Le pouvoir algérien est tellement isolé qu’il est obligé de faire une ouverture. Et avec la France, c’est inévitable. L’Algérie ne peut pas vivre sans la France. Il y a 6 millions d’Algériens qui vivent ici. Ce serait une déchirure, déjà à vif. Il faut rapiécer tout ça rapidement.”

Alors que Paris débat d’une éventuelle renégociation de l’accord franco-algérien de 1968, Boualem Sansal a estimé que tout était négociable, du moins à condition que les blocages psychologiques sautent. “Ils sont tout à fait d’accord pour renégocier. Il faut juste trouver le déclic pour s’asseoir autour d’une table.”

La prison, miroir d’un régime “brutal, méchant et cruel”

Boualem Sansal a décrit un pays où la répression touche indistinctement : “Le pouvoir algérien opère des centaines, des milliers d’arrestations par jour. Dans la prison où j’étais, peut-être la plus grande d’Afrique, il entre 400 personnes par jour. Certains sont arrêtés pour avoir ‘liké’ un texte sur Internet.”

Face à la répression, il refuse de se plier au régime. “On m’a dit clairement en Algérie que j’avais intérêt à me taire. Mais il faut arrêter de s’humilier. Il faut résister. (...) Moi cela fait 25 ans que je combats le régime”. Il ne s'est pas arrêté là en qualifiant l'Algérie de "dictature brutale, méchante, cruelle.”

Ce qui semble le désespérer davantage, a-t-il dit, n’est pas son sort personnel ni celui de Christophe Gleizes, mais le fonctionnement global du système : “On fait du cas par cas. Alors qu’il faut moraliser ces régimes. Depuis trente, quarante, soixante ans, ils font un mal fou. Il est temps que ça cesse. Il faut oublier Sansal, oublier Christophe, et travailler sur la durée.”

L'Algérie, son pays de cœur malgré tout

S'il en a dressé un tableau très négatif, l'Algérie demeure son pays de cœur qu'il ne souhaite pas abandonner. Mais cela n'est pas si simple. Gracié mais ciblé, Boualem Sansal a découvert récemment que son passeport avait été désactivé par les autorités algériennes. Pour autant, rien ne l'arrête. “Je suis SDF. Je ne vais pas demander de visa : je suis Algérien, j’y vais avec mon passeport. Une fois arrivé à l’aéroport, ils feront ce qu’ils voudront.”

S'il a affirmé vouloir retourner en Algérie, il veut attendre le moment opportun. “Si j’y allais maintenant, ce serait une provocation inutile. Je préfère attendre que tout se tasse, que Christophe sorte, et que le pouvoir comprenne qu’il doit arrêter d’emprisonner les gens.”

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