Des bibliothèques de classe d’école vides, des livres que l’on cache, des cours sur l’histoire afro-américaine supprimés : c’est ce qui se passe dans plusieurs états américains en ce moment, notamment en Floride. C'est le résultat de ce qu’on appelle "la guerre des cultures", et les prémices des élections où l’éducation et le droit des parents pour la contrôler seront des enjeux majeurs.
Il y a une dizaine de jours, en Floride, dans certains comtés, des élèves sont arrivés en classe et ont trouvé les étagères de la bibliothèque soit totalement vides ou alors, les livres avait été empaquetés, recouverts de papier, comme si c’était des cadeaux.
Le but n’était pas de faire plaisir à qui que ce soit mais d’empêcher que les livres soit vus. Pourquoi les livres ont disparu ?
Ou ont été rendu invisibles ? Ce
n’est pas une lubie des enseignants, ils ont suivi un ordre, une directive du ministère de l'Éducation de
Floride mi-janvier.
La loi
1467 votée en juillet exige
que les livres scolaires soient exempts de
pornographie et "adaptés aux besoins des élèves". Qu’il n’y ait
pas de pornographie, et que les livres soit adaptés aux élèves… jusque-là tout
le monde est d’accord. Mais c’est plus compliqué que ça.
Près de 200 livres ont été interdits
Lionel Gendron
Quand la loi est passée, près de 200 livres ont été interdits dont une adaptation en bande-dessinée du journal d’Anne Frank, sous prétexte que l’adolescente y avait évoqué ses premiers émois sexuels pour un garçon, mais aussi pour une fille. Ce qui s’appuyait sur la découverte de nouvelles notes d'Anne Frank. Interdit également : L'Oeil le plus bleu de Toni Morrison, prix Nobel de littérature, son premier livre se déroule dans l’Amérique ségrégationniste, au début des années 1940, dans une petite ville de l’Ohio.
Il y a une autre disposition en Floride qui concerne spécifiquement l’identité sexuelle qui a été mise en place. Ses opposants l’ont appelée : "Don't Say Gay", interdiction de parler "de l'orientation sexuelle ou de l'identité de genre de la maternelle au 3ème degré", c’est-à-dire l’équivalent de notre CE2. Cette disposition vaut notamment un bras de fer entre Disney (installé près d’Orlando et qui s’y oppose) et le gouverneur de Floride Ron DeSantis.
L’esclavage, qu’on le veuille ou non, ça fait partie de l’histoire américaine
Lionel Gendron
Quand on fait le point sur toutes ces dispositions, les défenseurs de la liberté d'expression (et pas seulement) craignent une remise en cause des livres racontant l'histoire de la communauté LGBT, des minorités raciales, des survivants de l'Holocauste… ça peut aller loin.
La semaine dernière, il y a eu une autre loi (à nouveau en Floride) et qui concerne le secondaire cette fois et les cours d’études afro-américaines. Les sujets comme Black Lives Matter, la question des réparations financières pour les descendants d’esclave ne font plus partie des programmes. Au mieux, c’est une option que l’on peut proposer aux élèves en fin d'année, car les cours d’études afro-américaines manquent de "valeur éducative (sic)".
Mais l’esclavage, qu’on le veuille ou non ça
fait partie de l’histoire américaine. Difficile de le contester, c’est
l’origine de la guerre de sécession.
>> Une lettre d'Amérique, une série d'épisodes exceptionnels à retrouver chaque mardi. Une carte postale sonore pour nous aider à mieux comprendre cette Amérique d'aujourd'hui, à la fois si familière et parfois totalement déconcertante. Un podcast RTL Originals.