Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et Olivia Grégoire, ministre chargée des PME, réunissent à Bercy les patrons des grandes surfaces pour parler des fameux "panier anti-inflation". Mais qu'y a-t-il dedans ?
Chaque enseigne va faire les promos qu'elle veut sur les produits qu'elle choisit. Aucune obligation si ce n'est de maintenir ces prix-là pendant 3 mois jusqu'à la mi-juin, c'est-à-dire au moment où l'inflation devrait commencer à se calmer. Rien n'est moins sûr. Et même si l'inflation redescendait un peu, on resterait sur des niveaux dignes des années 70.
On trouvera dans ces paniers que des "Marques De Distributeurs", les MDD, c'est-à-dire les produits aux couleurs du magasin. Logiquement, il y aura des produits de qualité (nutriscore A ou B), des produits d'hygiène et des produits frais (fruits et légumes, de la viande ou du poisson). Carrefour annonce 200 produits à moins de 2 euros, Système U a déjà mis 150 références à prix coutants, Monoprix bloque 300 prix et Intermarché proposera 500 références (470 produits Mousquetaires et 30 produits frais) à petits prix. Une jungle de paniers donc : soit le consommateur a le temps de faire un circuit en fonction des offres les plus intéressantes, soit, on retombe dans les animations commerciales habituelles avec des promos.
Si on remplit son charriot uniquement avec ces produits, le prix pourrait alors baisser. L'an dernier, les MDD étaient 26% moins cher que ceux des grandes marques. Mais, ne vous attendez pas à des miracles, les Français mettaient déjà quasiment un produit MDD sur deux dans leurs charriots. Et surtout, il y a un effet un peu pervers derrière ces prix des distributeurs.
En effet, les produits sont moins chers
facialement. Mais, en réalité, leurs prix progressent plus vite que les autres.
Inflation alimentaire : +14% sur un an... Inflation des grandes marques :
+12,5%... Inflation des marques de distributeurs : +18,7%. Si vous faisiez déjà vos courses, l'an
dernier, en achetant les produits qui figureront dans le panier des Carrefour/Intermarché/SystèmeU/Monoprix et bien, ce panier vous coûte
beaucoup plus cher qu'en février 2022. On verra si les grandes surfaces bloquent
ou diminuent vraiment le prix des produits dans le panier par rapport à 2022 pour
que ce soit un vrai geste en faveur du pouvoir d'achat.
Mais cela va seulement contenir l'inflation. Vous savez, la hausse des prix, c'est comme un escalator, les prix montent rapidement de 14% depuis un an. Les paniers des grandes surfaces ressembleront à ces enfants qui s'amusent à descendre les marches de l'escalator à l'envers. À terme, le mouvement reste orienté à la hausse.
La question, c'est : à quel prix
va-t-on contenir cette inflation ? Il y aura des fruits et légumes, mais ils viendront de l'étranger pour être bon marché. Quelles seront les
conséquences pour nos agriculteurs ? Le gouvernement réfléchit à un
"chèque alimentation" géré par les régions et réservé aux ménages
modestes pour qu'ils achètent des produits locaux. Mais on en est encore au
stade de projet. Si on choisit les marques
distributeurs, qu'en est-il de la recherche et développement qui permet d'améliorer les
produits alimentaires ? Il ne faudrait pas qu'en voulant
protéger le porte-monnaie des Français, on se réveille dans 18 mois en
constatant qu'on a donné le coup de grâce à toute notre industrie
agro-alimentaire.