IVG : pourquoi Catherine Deneuve a-t-elle joué un rôle important pour le droit à l'avortement en France ?

Le droit à l’avortement doit entrer dans la Constitution ce lundi 4 mars 2024, lors du Congrès de Versailles. L'occasion de rappeler que Catherine Deneuve a joué un rôle déterminant pour le droit à l'avortement en France.

En 1971, 5.000 Françaises meurent chaque année en avortant clandestinement. Toutes n’ont pas la chance, comme les plus aisées, d’aller le faire en Suisse, où c’est autorisé. Alors un homme décide d’agir : il s’appelle Jean Moreau, bosse au Nouvel Observateur, est un ami de Jean-Paul Sartre et a une idée. Si des femmes connues avouaient publiquement qu’elles ont avorté, les autorités n’oseraient pas les poursuivre en justice, ça aiderait la cause. Il décide de monter un manifeste.

Il propose l'idée au Mouvement de Libération des Femmes (MLF) qui n’est pas très chaud et teste l’idée auprès de Simone de Beauvoir. Enthousiaste, elle propose de le rédiger, mais il faut maintenant convaincre des femmes célèbres de signer.

Une signature grâce à un dîner

Que des femmes, même si à l’origine, certains hommes dont François Truffaut était d’accord pour signer. Parmi les actrices, Marie-France Pisier, Françoise Fabian, Jeanne Moreau, Micheline Presle, sont déjà sur la liste. Mais il faut la star des stars : Catherine Deneuve. 

C’est la réalisatrice Nadine Trintignant, signataire, elle aussi,, qui s’en charge. Ça tombe bien elle tourne alors Ça n’arrive qu’aux autres, un film avec elle et Marcelo Mastroianni, couple à l’écran qui le devient à la ville. Lors d’un dîner chez Nadine et Jean-Louis Trintignant, sont invités Catherine Deneuve et Marcelo Mastroianni. L’actrice est sensible au sujet et pour cause : elle-même a été contrainte à avorter par le passé. Mais elle hésite. 

Pas par peur des conséquences mais parce qu’elle se refuse à dévoiler sa vie privée. Comme l’a raconté Nadine Trintignant, c’est Marcelo Mastroianni qui fait basculer Deneuve. En lui disant tout simplement avec son plus bel accent rital : "Ma si Nadine té dit dé signer, signe !"

Un ultime quiproquo

Le 5 avril 1971, elle est dans le Nouvel Obs dont la Une titre : "La liste des 343 Françaises qui ont le courage de signer le manifeste : 'Je me suis fait avorter'". 343 et même 345 puisque Sheila et Françoise Hardy étaient dessus. 

Sauf qu’on les a retirées au dernier moment quand on s’est aperçu que le MLF les avait mises sur la liste sans leur demander. Catherine est en tournage aux États-Unis lorsque le journal sort. Ce qui va causer un gros quiproquo. Alors qu’elle est à Hollywood, elle se découvre en photo à la Une du Los Angeles Times juste à côté du Manifeste. Elle ne comprend pas, et pour cause, elle ne savait pas en signant que cette pétition était destinée à être publiée dans la presse. 

Or elle est aux États-Unis où l’avortement est encore illégal. Et son avocat en rajoute une couche en lui envoyant un télex pour lui dire qu’elle est la seule signataire d’un texte qui la considère comme une salope. En fait, il confond avec une Une de Charlie Hebdo qui parle du Manifeste des 343 Salopes. Bref c’est la panique mais tout finit par s’arranger. Et ce texte fort et courageux va avoir un impact énorme et conduire 4 ans plus tard au vote de la Loi Veil pour le droit à l’IVG.

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