Pour sa quatrième intervention solennelle depuis l’annonce du confinement, Emmanuel Macron a voulu nous dessiner l’action face à la crise économique à venir. Et il y a une phrase qui a retenu l’attention, quand le président a parlé de travailler et produire davantage.
Elle n’a pas seulement retenu l’attention, cette
phrase, elle a fait se lever les boucliers. Parce qu’elle a été entendue comme
un retour du serpent de mer français, la question des 35 heures. D’ailleurs, dès ce
matin, les ministres de l’Économie et du Budget ont sorti les avirons pour
essayer de minimiser, de dire qu’il ne s’agissait surtout pas d’augmenter la
durée du travail.
En gros, pour Bruno Le Maire, ça veut juste dire qu’il faut que tout le monde ait du travail, donc qu’il faut éviter le retour du chômage de masse. C’est quand même un peu court. Je pense que cette phrase mérite mieux que la satisfaction du Medef et la colère de la CGT. Bien sûr qu’elle porte la vieille question de savoir si les 35 heures ont contribué à plomber la compétitivité française, mais on est largement au-delà de ça.
Le confinement a permis une réflexion sur le travail que tout le monde éludait. On a constaté qu’il y avait des métiers essentiels et peu valorisés, que certains faisaient leur travail quoi qu’il arrive avec un sens du devoir admirable, que d’autres ne se sentaient pas forcément cette obligation. Qu’en fin de compte, il y a en France des gens qui travaillent beaucoup et sont peu protégés, d’autres qui, parce qu’ils sont protégés, ont pu se permettre de ne pas reprendre tout de suite et de mettre en avant les impératifs sanitaires, bref, il y a des inégalités majeures dans notre rapport au travail.
C'est travailler plus pour produire plus et pour gagner tout autant
Natacha Polony
Je ne sais pas si vous vous souvenez qu’en 2007, Ségolène Royal avait axé sa campagne sur la "valeur travail". Elle
voulait que la gauche, qui avait poussé les 35 heures et la société des loisirs, se
ressaisisse de cette notion essentielle. Comme souvent, elle avait une
intuition intéressante : si la gauche, c’est l’émancipation, il faut
refaire du travail un moyen d’émancipation. Nicolas Sarkozy avait répondu par
le "travailler plus pour gagner plus" et il avait emporté la mise.
Et là, Emmanuel Macron, c’est travailler plus pour produire
plus et pour gagner autant. Mais il a le même
problème que Nicolas Sarkozy, qui s’était pris de plein fouet la crise de
2008 : les heures supplémentaires défiscalisées, quand les carnets de
commandes sont vides, ça ne sert à rien. Là, c’est pareil. Il y a d’infinies questions à
se poser sur l’entrée tardive des jeunes sur le marché du travail, sur la
revalorisation de certaines filières, professionnels de santé, enseignants, sur
le temps de travail, aussi, sur le mérite.
Mais si la seule idée, c’est de baisser les salaires par des accords d’entreprise, et si ça ne s’accompagne pas de la moindre réflexion sur la justice sociale, non seulement ça ne marchera pas, mais ça va fracturer encore un peu plus la société française.
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