"Il a été maltraité et violé par son père" : bouleversée par son histoire, elle veut adopter son élève migrant

En 2021, Florence, professeur d'anglais, reçoit dans sa classe un jeune migrant bangladais. Dès les premières interactions, une connexion très forte naît entre les deux, poussant l'enseignante à entamer les démarches d'adoption. Elle témoigne dans "Un jour, une vie".

Une école primaire à Valence en 2023.

Crédit : Nicolas Guyonnet / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Florence, professeur, a adopté un de ses élèves ancien migrant

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Florence, professeur d’anglais en Saône-et-Loire, n’oubliera jamais le jour où le destin l’a placée face à Rajesh. En juin 2021, elle reçoit un simple message administratif. Ce mail l'informe qu'elle va accueillir dans sa classe un nouvel élève, venu du Bangladesh. "Je ne savais pas grand-chose de lui, à part qu’il ne parlait pas français, et qu’il avait 16 ans", se souvient Florence.

Ce n’était pas la première fois que l'enseignante recevait des élèves venus de l'étranger. "Mon cœur s'est un peu serré parce que j'avais vécu une histoire similaire quelques années auparavant, où un jeune garçon qui venait d'Inde avait été introduit dans ma classe", raconte-t-elle. Les premiers échanges avec ce nouvel arrivant sont très froids. L'adolescent a le regard fuyant, du moins par timidité sinon par "peur des humains", se dit l'enseignante.

Mais leurs premières interactions réchauffent leur relation. Florence parvient à le rassurer, suffisamment pour qu'il se livre. "Rajesh a été maltraité par son père, violé depuis l'âge de ses 8 ans. Sa mère, comme toutes les femmes au Bangladesh, n'a aucun pouvoir. C'est juste une décoration que son père arbore. Elle n'a pas de vie. Elle ne peut pas travailler, elle ne peut pas choisir. (...) Et un jour, elle a décidé de voler 10 000 dollars sur le compte bancaire de son mari pour payer un passeur, pour faire partir son fils, Rajesh", retrace-t-elle au micro de RTL.

Grâce à ce témoignage poignant, certaines zones d'ombres s'éclaircissent. Florence comprend un peu mieux sa méfiance à l'égard des humains. Au fil du temps, leur relation évolue. "On s'écrivait énormément de messages, on s'envoyait des photos, les enfants lui envoyaient des cœurs (les enfants de Florence, ndlr)", relate-t-elle. Florence n’est plus seulement une enseignante. Elle devient un repère, une présence stable.

Une adoption difficile

L'adopter ? La jeune femme y songe, et sonde son mari. "Je lui ai dit, 'il y a un garçon qui est en intégration dans ma classe et je pense que ça va aller loin'". Bien qu'ouvert, son conjoint est dubitatif. Même son de cloche du côté du corps enseignant. "J'ai dit à mes collègues que je comptais m'investir dans la vie de Rajesh. Et ils ont été nombreux à me dire 'mais enfin, ça ne se fait pas, ça n'existe pas, personne ne fait ça, tu vas faire comment ?''".

Florence brave alors les regards réprobateurs. Et elle a un argument solide. "Il était sous la protection du gouvernement français. Il ne pouvait pas être renvoyé, mais son éducatrice m'avait dit qu'il n'avait aucune chance de rester sur le territoire français une fois ses 18 ans atteints", explique-t-elle.

Petit à petit, le jeune bangladais, rentre dans la famille. Le foyer qui s'occupe de Rajesh autorise l'enseignante à le voir en dehors du cadre de l'école, sous certaines conditions. "Je vous interdis d'organiser des rencontres avec votre mari et vos enfants. Et il faut que ça soit supervisé par l'aide sociale à l'enfance". Des règles desquelles Florence s'est rapidement affranchie. "On était assis sur un banc avec Rajesh, et puis on discutait. Je lui ai dit : 't'as hâte de rencontrer Tristan et les enfants ?' Et il m'a dit : 'ouais bien sûr, tu penses que ça pourrait être quand ?' Je lui dis : ' regarde au bout du chemin, ils sont là'".

La première rencontre se déroule à merveille : la famille de Florence accueille chaleureusement l'adolescent. Touchée par ces premiers échanges, l’enseignante décide alors d’engager les démarches pour adopter Rajesh. Aujourd’hui, l’adoption n’a pas encore été finalisée : "On en est au deuxième refus du tribunal. La première fois parce qu'il n'y avait pas de preuves de notre attachement, et la deuxième fois parce que l'acte notarié n'était pas correct", raconte-t-elle. Mais, en dépit des obstacles, Florence reste confiante pour l’avenir.

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