C'est une bête qu'on croirait tout droit sortie d'un film d'horreur. Une énorme bouche, de tous petits yeux et une taille qui peut atteindre près de 3 mètres de long, pour une centaine de kilos. Le silure est un poisson qui a tout pour effrayer les baigneurs.
Le 1er août dernier, un pêcheur en a attrapé un beau spécimen dans la Seine. 2,43 mètres pour plus de 90 kilos, rapporte Le Parisien. Dans le fleuve qui traverse la capitale, le silure n'est pas rare. Il est d'ailleurs présent sur la quasi-totalité du territoire français, tant qu'il y a de l'eau douce.
Mais sa présence ne fait pas l'unanimité. En effet, le silure a mauvaise presse. Il est accusé d'attaquer des oiseaux, des chiens, mais aussi de mordre des humains. Les légendes les plus folles circulent sur des attaques de baigneurs et des bébés avalés par le monstre aquatique. Qu'en est-il vraiment ?
On vous rassure tout de suite. Le silure n'est pas particulièrement dangereux pour les humains. Il y a bien des récits d'attaques, mais vous ne risquez pas de vous faire manger tout cru ou d'y perdre une jambe. "Le silure n'est pas un requin. D'ailleurs, si vous regardez un silure, vous ne verrez pas de dents qui dépassent. Il a plutôt une très grosse bouche, c'est un poisson qui avale goulûment", explique Philippe Keith, professeur au Muséum National d'Histoire Naturelle, à RTL.fr. Il est spécialisé en ichtyologie, l'étude des poissons.
"Il y a beaucoup de légendes d'attaques qui circulent autour du silure, mais ils ne mangent ni les bébés, ni les belles-mères", poursuit-il. Mais il est vrai que le silure est un prédateur. "Il mange tout ce qui passe", raconte Philippe Keith. Des écrevisses, toutes sortes de poissons, mais aussi des canards ou d'autres oiseaux... Il peut même sortir de l'eau pour attraper leurs proies. Enfin, le silures mange aussi... d'autres silures. C'est une espèce qui peut être cannibale : les plus gros mangent les plus petits. Ce n'est pas ragoûtant, mais ça ne fait pas de lui un tueur d'êtres humains.
En revanche, là où il faudrait peut-être se méfier du silure, c'est sur son impact sur la biodiversité. Introduit par l'homme en 1857 en France, dans l'espoir de nourrir la population française, le silure a proliféré. "Dans les dix premières années, il s'est acclimaté. Et puis à la fin des années 1860, on a commencé à en trouver beaucoup", raconte Philippe Keith. Ils ont ensuite été introduit dans de nombreux cours d'eau, où ils prolifèrent.
En effet, les pêcheurs qui les attrapent les relâchent souvent, car si on ne peut pas toujours le manger. Comme beaucoup de gros poissons, le silure est un bioaccumulateur : il accumule du mercure et d'autres polluants qui le rendent parfois impropre à la consommation.
Plusieurs études ont donc été réalisées pour déterminer si le silure était une espèce invasive et s'il risquait de détruire des populations d'autres poissons. Selon une étude de 2014 de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, son impact sur la biodiversité est limité. "Les populations de silures ont une croissance quasi-naturelle. Et le fait qu'ils soient cannibales fait qu'ils peuvent s'auto-réguler", explique le professeur Keith. Mais tout dépend du bassin où ils se trouvent.
Dans certaines régions, le silure pourrait détruire des populations d'espèces endémiques. "La question se pose tout particulièrement dans le Sud-Ouest, avec certaines espèces de vandoises ou de goujons", poursuit le chercheur. En Nouvelle-Aquitaine, le président de région voudrait ainsi "éradiquer" le silure de ses eaux, rapporte Paris-Match. Dans ces cas spécifiques, des mesures pourraient être prises pour rééquilibrer l'écosystème.
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