ÉDITO - Manouchian au Panthéon : "Un plaidoyer pour l’intégration", estime Alba Ventura

Missak Manouchian espérait que le peuple français honore sa mémoire et celle de ses camarades. C'est chose faite. Mercredi soir au Panthéon, c’était à la fois un hommage au résistant communiste d’origine arménienne et au Français de cœur.

Oui, parce qu’au-delà de cette magnifique cérémonie, l’histoire de Manouchian est quand même un très bon départ pour une discussion sur l’immigration. Ça invite à ne pas être sectaire, ça invite à se souvenir comment la France s’est bâtie.

Missak Manouchian avait dit à ses bourreaux avant de mourir : "Vous avez hérité de la nationalité française, moi je l’ai méritée". Lui à qui on a pourtant refusé deux fois d’être naturalisé. Mais lui se sentait français par-dessus tout.

Ça me fait penser à Romain Gary, d’origine russe, qui disait : "Je n’ai pas une goutte de sang français mais la France coule dans mes veines". C’est ça, être "Français de cœur", ou comme l’a dit Emmanuel Macron "Français de préférence", expression empruntée à Aragon. "Français de préférence", c’est dire qu’il y a des étrangers qui viennent nous enrichir.

Être étranger n’est pas incompatible avec la France

Ce n’est pas un plaidoyer pour l’immigration, non, c’est un plaidoyer pour l’intégration. C’est dire que l’on peut devenir français, ou être un étranger en France, à condition de partager ses valeurs. Être étranger n’est pas incompatible avec la France.

Alors, je sais bien que certains se disent : c’est complètement paradoxal alors que l’on débat du droit du sol, ou que l’Assemblée vient de s’écharper sur la loi immigration.

Mais il n’y a rien de paradoxal. Je rappelle que le droit d’asile n’est pas remis en question dans notre pays, autrement dit, Missak Manouchian aurait été accueilli en France aujourd’hui en tant que réfugié. Mais ce qui me paraît le plus essentiel, et qui va bien au-delà, c’est comment on se sent français. Manouchian, toute son histoire respire la France.

Ce n’est pas l’origine ou le nom qui comptent pour être français. Oui, je veux dire qu’à l’heure où l’on rend hommage à Missak Manouchian, dont le premier réflexe a été de demander la nationalité française, qui parlait un français impeccable, tant il a été nourri des lectures de nos grands auteurs.
Au moment où on célèbre ces Français de préférence, ces hommes et femmes qui ont adhéré aux valeurs françaises, l’actualité nous renvoie à une autre réalité, avec cet imam de Bagnol-sur-Cèze dans le Gard qui crache sur le drapeau français, dont certains prêches sont des appels à la haine et contraires à nos valeurs.

Missak Manouchian est infiniment plus français que cet imam qui vit en France depuis 30 ans. Et ce n’est pas une question de religion. C’est une question de contrat avec la nation. Il faut donc redéfinir les règles, et surtout les faire appliquer, pour que ce contrat soit bien compris par tout le monde.

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