"Des cadavres devant l'épicerie" : comment le trafic de cigarettes "à dos d'hommes" s'intensifie entre l'Andorre et la France

Des contrebandiers de cigarettes de plus en plus nombreux à prendre des risques insensés dans les Pyrénées. En évoquant les chemins de contrebande, l'imaginaire collectif pense encore aux silhouettes d'un autre temps, d'un autre siècle, d'hommes portant des gros sacs en toile posés sur des ânes ou des mulets. Un côté presque romantique, voire folklorique.

Sauf qu'en 2025, la contrebande cache une mécanique froide, organisée et brutale, dont on redécouvre les détails dans un dossier faisant la Une du quotidien Sud-Ouest.

Selon le journal, derrière les anciens sentiers figurant parfois dans les guides touristiques se trouvent des hommes par dizaines, voire par centaines, présents été comme hiver et chargés comme des mules, mais sans le folklore, portant des ballots de cigarettes sur le dos, avec des centaines de cigarettes par voyage. 

Les saisies ont bondi de 73%

Entre l'Andorre et l'Ariège, le trafic a changé d'échelle. Les gendarmes et les douaniers le disent et les élus locaux le voient. Dans le département, les saisies ont bondi de 73% en un an. Les passeurs redescendent tranquillement en voiture après avoir déposé les hommes et les marchandises à plus de 2 000 mètres d’altitude.

"La nuit, il n'est pas rare que certains tombent dans les ravins", a révélé le colonel Laurent Rougès, à la tête du groupement de gendarmerie de l'Ariège au journal, tandis que son collègue douanier en a surpris avec les chevilles enveloppées de sacs plastiques pour se protéger du froid. La plupart du temps, ces contrebandiers viennent d'Algérie ou des Balkans, et ne disposent pas de papiers. 

Trois fois moins chères qu'en France

À L'Hospitalet-près-l'Andorre, commune de cent habitants, le maire a assuré avoir retrouvé des cadavres devant l'épicerie du village, à deux reprises. Tout ça pour des cigarettes, achetées trois fois moins chères qu'en France et revendues deux fois moins chères sur les trottoirs, interrogeant sur les chiffres officiels évoquant la baisse du nombre de fumeurs dans l'Hexagone.

Alors que le gouvernement explique que la consommation de cigarettes recule, elle continue pourtant de circuler, par les marges et par les montagnes. Malgré les nouveaux moyens de surveillance, notamment avec des drones mis à disposition pour les gendarmes, le trafic se poursuit discrètement. Une contrebande ancienne dans les mots, mais moderne dans les faits.