"C'était un grand malade" : co-auteur d'un livre avec l'Abbé Pierre, le sociologue Frédéric Lenoir revient sur les accusations d'agressions sexuelles

Un choc pour celui qui avait été un temps le co-auteur de l'Abbé Pierre. Le sociologue et philosophe Frédéric Lenoir était l'invité du Journal inattendu samedi 20 décembre, pour parler de son livre Les Cinq piliers de la sagesse, dans lequel il donne des pistes pour mener une vie heureuse. 

À cette occasion, il est également revenu sur sa collaboration avec l'Abbé Pierre, avec qui il avait co-écrit le livre Mon Dieu... Pourquoi ? en 2005. 

Le sociologue fait notamment part du choc qu'il a ressenti lors des révélations à l'encontre de l'Abbé Pierre, mis en cause pour des dizaines d'agressions sexuelles, dont plusieurs sur des personnes mineures. "Comme je l'ai connu, qu'on a fait ce livre ensemble, j'étais sidéré d'apprendre qu'il avait eu ces comportements terribles de manipulation, déclare-t-il au micro de Stéphane Boudsocq. Ce n'est pas seulement une faiblesse passagère, c'était vraiment un grand malade."

Une "confession" dans son livre à l'époque

Avec le recul, Frédéric Lenoir est aujourd'hui capable de voir une forme d'aveu de la part de l'Abbé Pierre lors de leur collaboration pour écrire Mon Dieu... Pourquoi ? : "Quelques années avant sa mort, il avait quand même fait une confession dans ce livre. Il avait dit spontanément, sans même que je lui pose la question, 'Je tiens à dire que je n'ai pas tenu mon vœu de chasteté et que j'ai eu quelques histoires'."

Mais à l'époque, le sociologue s'imaginait seulement que l'Abbé Pierre mentionnait des "maîtresses". "J'étais loin de m'imaginer que ça avait été des agressions sexuelles," déclare-t-il aujourd'hui. "J'ai eu un choc terrible, ça m'a beaucoup touché."

Depuis les premières accusations contre l'Abbé Pierre en 2024, de nouveaux témoignages ne cessent de voir le jour. En juillet dernier, un rapport faisait état de 12 nouvelles agressions sexuelles recensées, dont la moitié sur des personnes à l'époque mineures, portant à 45 le nombre d'agressions sexuelles recensées. Une enquête en deux parties publiée par le journal Le Monde révèle, ce 20 décembre, qu'il aurait utilisé des dons adressés à Emmaüs pour placer des femmes en détresse sous son influence et les manipuler sexuellement.

S'il ne cache pas sa sidération face aux révélations à l'encontre de son ancien collaborateur, Frédéric Lenoir espère que l'histoire parviendra à trouver un entre-deux, pour garder en mémoire les bonnes actions de l'Abbé Pierre, sans pour autant invisibiliser le cauchemar des victimes : "Je connais plein de gens dont il a changé la vie. Il faut garder ces deux choses, il ne faut pas en garder qu'une," conclut-t-il. 

En septembre 2024, Adrien Chaboche, délégué général d'Emmaüs, était revenu sur le retrait du nom de l'Abbé Pierre de la fondation Emmaüs : "Il faut en avoir conscience, quand on affiche son portrait, on envoie un message, on a une responsabilité," avait-il déclaré sur RTL alors même que la fondation réfléchissait également à changer de logo. 

Mais lui-même avait souligné l'importance de ne pas "tout oublier" : "On est très conscient de ce que l'abbé Pierre a fait, de ce qu'on lui doit, de la puissance de sa parole (...) Ce que nous changeons aujourd'hui, c'est la façon dont nous, en tant que mouvement, nous nous présentons au monde."

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