Abbé Pierre : "Grand malade mental", "perte de tout contrôle de soi"... Ce que révèlent les archives de l'Église

Le silence se lève progressivement sur les agissements de l'abbé Pierre. À la mi-septembre, après des révélations d'agressions sexuelles par 24 femmes, l'Église catholique a décidé d'ouvrir ses archives sans délai, sinon il aurait fallu attendre 2082. Ces documents sont conservés au Centre national des archives de l'Église de France, à Issy-les-Moulineaux.

Lise Tavelet, journaliste à RTL, a pu consulter ce dossier composé de 216 documents : "Ce sont des centaines de lettres, mais aussi des documents administratifs d'Emmaüs, des comptes rendus de déplacement, des coupures de presse triées. Ces lettres sont, pour la plupart, dactylographiées, les autres sont rédigées à la main et certaines sont quasiment illisibles, mais elles portent l'entête d'un archevêché."

Dans ces archives, "les comportements problématiques ne sont jamais explicitement décrits, mais toujours mentionné par sous-entendu, avec parfois une insistance sur la discrétion du destinataire. Il y a une lettre, une seule, quasiment indéchiffrable, datée du 13 mars 1964, poursuit Lise Tavelet. Elle est écrite par Mgr Veuillot, adjoint de l'archevêque de Paris à destination du cardinal de Montréal. Mgr Veuillot commence par dire qu'il s'agissait en effet "d'un grand malade mental" à propos de l'abbé Pierre. Il détaille une "perte de tout contrôle de soi, notamment après les livres à succès" et d'ajouter sans autre précision "des jeunes filles en sont marquées pour la vie". 

"Trouver un asile pour abriter l'abbé Pierre"

Selon les courriers, des membres de l'Église, en connaissance de cause, auraient alors envisagé l'hypothèse, dès 1958, de "trouver une clinique ou un asile pour abriter l'abbé Pierre jusqu'à la fin de ses jours. Le docteur Durand, médecin personnel de l'abbé Pierre, parle de la nécessité absolue d'un accompagnateur", dévoile la journaliste dans cet épisode de Tout savoir sur. 

Dans l'entourage de l'abbé, personne ne souhaite son retour sur le devant de la scène nationale ou internationale, même au sein d'Emmaüs. "Des solutions plus douteuses sont avancées au cas où son internement psychiatrique à Genève ne porterait pas ses fruits : peut-être faudrait-il l'orienter au sein d'un pays sous-alimenté, "dans un hôpital de Brousse ou dans un village de lépreux". Les consignes sont très claires : il faut l'escorter au plus près, ne pas le perdre de vue, mais pas non plus le briser psychologiquement", complète Lise Tavelet.

Pourtant, les accusations d'agressions sexuelles et de viols vont perdurer jusqu'au début des années 2000.

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