Syndrome d'Asperger : pourquoi a-t-on cessé d'utiliser ce terme pour définir cette forme d'autisme ?
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Syndrome d'Asperger : pourquoi a-t-on cessé d'utiliser ce terme pour définir cette forme d'autisme ?
PODCAST - À sa mort en 1980, Hans Asperger était perçu comme un médecin dévoué et un pionnier de la pédopsychiatrie. Cependant, des recherches publiées en 2018 ont révélé son implication dans des activités liées au régime nazi, remettant en question l'héritage de son nom.
Hans Asperger, le 24 août 1971
Crédit : VOTAVA / IMAGNO / APA-PictureDesk via AFP
Hans Asperger, ce psychiatre autrichien complice des nazis qui a torturé des enfants
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Pendant des décennies, le syndrome d’Asperger a été associé à une forme d’autisme dite "à haut potentiel", désignant des personnes dont les compétences intellectuelles coexistent avec des difficultés dans les interactions sociales. Ce nom, popularisé dans les années 1980, provient d’un psychiatre autrichien longtemps perçu comme un pionnier de la pédopsychiatrie : Hans Asperger. Mais depuis plusieurs années, un débat éthique et historique secoue le monde scientifique : peut-on continuer à garder le nom d'un homme dont le passé est synonyme de complicité avec le régime nazi et complice d'assassinats d'enfants ?
Pendant des décennies, Hans Asperger a été présenté comme un psychiatre visionnaire. Durant la Seconde Guerre mondiale, alors que Vienne était sous la coupe nazie, ce psychiatre autrichien, froid et distant, a découvert une forme d'autisme qui a ensuite porté son nom. La version officielle le décrit comme un humaniste ayant pris des risques et fait avancer la science.
Mais des travaux récents, s'appuyant sur des archives qui n'avaient pas encore été examinées, ont révélé une facette bien différente d'Asperger. Il a été impliqué dans le sinistre programme d'euthanasie orchestré par les nazis, exerçant un pouvoir de vie ou de mort sur des enfants handicapés. Il effectuait une sélection entre ceux qu'il considérait comme "dignes de vivre" et les autres.
Centre d'euthanasie pour enfants
Il a envoyé des enfants au sanatorium de Spiegelgrund, qui n'était autre qu'un centre d’euthanasie où près de 800 patients sont morts. Il ne les a pas tués de ses propres mains, mais il a écrit les diagnostics qui les y ont conduits, comme un arrêt de mort. Sur 210 enfants, 35 ont été jugés non éducables et donc envoyés à la mort.
D'immondes expériences ont été pratiquées sur les enfants, comme l'inoculation de la tuberculose ou de substances qui les faisaient vomir. Puis, après quelques expériences en général, les enfants finissaient assassinés. Asperger, lui, ne réalisait pas ces expériences, mais il servait de rabatteur. Il faisait le tri entre les enfants autistes. Il a même écrit une thèse dans laquelle il affirmait que les autistes déficients "ne sont pas dignes d’être membres du grand organisme qu’est l’État nazi".
Un médecin réputé et un passé oublié
Pourtant, dans le même temps, Asperger jouissait d'une grande réputation en tant que médecin à Vienne. Il faisait partie d'une commission chargée d'évaluer la santé de 210 enfants autrichiens présentant des troubles mentaux et vivant dans des établissements psychiatriques.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les établissements psychiatriques impliqués dans le programme d'action T4, responsable de la mort de 70 000 personnes considérées comme asociales et handicapées, ont été libérés par les forces alliées. Les nazis ayant opéré au Spiegelgrund ont été identifiés et jugés. Mais Asperger a échappé à cette justice, car, contrairement à ses collègues, il n'était pas membre du NSDAP, le parti nazi.
Il a ainsi pu reprendre une vie normale de médecin et a cumulé les postes à responsabilité. Asperger a même prétendu avoir été persécuté par la Gestapo. Il est mort en 1980, sans avoir jamais été inquiété pour ses actes
L'héritage sur le syndrome d'Asperger
Ce n'est qu'en 2018 que la véritable nature d'Hans Asperger a été révélée. Après huit ans de recherches, Herwig Czech, un historien de la médecine à l'université de médecine de Vienne, a publié une étude accablante sur Asperger. En s'appuyant sur des archives, y compris des documents personnels rédigés par le médecin lui-même, Czech démontre qu'Asperger a certes consacré du temps aux enfants ayant un fort potentiel, mais qu'il a également été complice dans l'assassinat d'autres enfants.
En 2019, une historienne américaine, Edith Schaeffer, chercheuse associée à l'université de Berkeley, arrive aux mêmes conclusions. Son livre, publié en 2019, Les enfants d'Asperger, le dossier noir des origines de l'autisme, publié la même année, a provoqué un véritable choc dans le monde scientifique. De nombreux membres de la communauté scientifique et médicale plaident désormais pour que le nom d'Asperger ne soit plus associé aux troubles du spectre autistique, estimant qu'il a terni la psychiatrie en l'utilisant à des fins destructrices plutôt qu'en l'enrichissant par ses connaissances.
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