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Richelieu : sa "légende noire" issue du roman "Les Trois Mousquetaires" était-elle vraie ?

Il était le serviteur de l'Etat, aussi autoritaire et roublard que charismatique et visionnaire. Richelieu, le principal ministre de Louis XIII, réputé pour son intelligence rare, amoureux des arts et des lettres, possédait aussi une légende noire liée au roman "Les Trois Mousquetaires". Mais le livre disait-il vrai ?

La première image du film "Les Trois Mousquetaires: D'Artagnan"
La première image du film "Les Trois Mousquetaires: D'Artagnan"
Crédit : CHAPTER 2 – PATHE FILMS – M6 FILMS
L'INTÉGRALE - Richelieu : de l'habit rouge à la légende noire
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RÉCIT - Richelieu : le cardinal au faux certificat de baptême
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Lorànt Deutsch - Entrez dans l'histoire
Lorànt Deutsch

De son vivant, mais surtout depuis sa mort en 1642, le principal ministre du roi Louis XIII est qualifié d’homme froid, machiavélique, cruel et vaniteux, profitant de la faiblesse du souverain pour manigancer. Une personnalité, sa légende noire, que l'on doit beaucoup au roman Les Trois Mousquetaires, écrit par Alexandre Dumas au milieu du 19ème siècle. 

Une œuvre dans laquelle Richelieu, ses sbires et sa protégée, la belle et vénéneuse Milady de Winter, font tout pour empêcher d’Artagnan et les trois mousquetaires de sauver l’honneur de la reine de France, Anne d’Autriche. Il est vrai que Richelieu ne fait pas dans la dentelle. Il refuse le désordre et en particulier celui causé par ceux qui ne se soumettent pas à l’autorité royale.
Physiquement, Richelieu, ce n’est pas le genre rigolo : toujours vêtu de son habit de cardinal, ou en homme de guerre, il est grand, sec, avec un long visage, l’air hautain, pas le genre à vouloir qu’on lui tape dans le dos. Richelieu, réputé d’une intelligence rare, est aussi le promoteur d’un pouvoir royal fort à l’intérieur mais aussi en dehors du royaume, en haussant le ton contre ses puissants voisins européens. C’est aussi un fin stratège, ce qui lui a valu beaucoup de jalousies.

La famille royale aux mains de Richelieu

Richelieu arrive le 27 octobre 1614 dans sa tenue d’évêque à l’hôtel du Petit Bourbon, en face du château royal du Louvre. Le nouveau souverain, Louis XIII, n’a que 14 ans et vient tout juste d’atteindre la majorité pour gouverner. Richelieu finit par se distinguer par son éloquence et la qualité de ses propos, mais surtout par son officieuse discrétion. Le jeune roi et surtout Marie de Médicis, sont séduits par son charisme. En quelques mois, l’inconnu Richelieu est devenu le favori de la reine mère, et est nommé grand aumônier de la jeune reine, Anne d’Autriche, 14 ans, qui vient d’épouser Louis XIII. En 1624, Richelieu devient, à 39 ans, le ministre numéro 1 de Louis XIII.

Pour Richelieu, rendre le royaume de France plus puissant, c’est aussi contrecarrer l’écrasante domination de la Maison des Habsbourg. Ces derniers ont bien l’intention de mettre toute l’Europe à leurs pieds puisqu’ils combattent les Etats Protestants du nord de l’Europe. Le Royaume de France est encerclé par les Habsbourg, y compris à la cour. Louis XIII est marié à Anne d’Autriche et l’une des filles de Marie de Médicis, Elisabeth, a épousé le roi d’Espagne, Philippe IV. Richelieu suggère alors à Louis XIII de s’allier avec les Etats protestants pour donner une bonne leçon aux Habsbourg. Le cardinal sait aussi que convaincre le souverain ne sera qu’une formalité. Louis XIII n’a aucun charisme. Avec son bégaiement, sa peur de la foule et sa santé fragile, ce souverain qui n’a toujours pas de descendance à presque 30 ans fait vraiment pitié. 

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Sans surprise, le roi suit une nouvelle fois son ministre sans broncher. Louis XIII et Richelieu partent en Italie pour placer un proche, le duc de Nevers, à la tête d’une place stratégique pour la France, le duché de Mantoue. Dans la foulée, en mai 1630, l’armée française s’empare de la Savoie. Pour la première fois depuis plusieurs années, les Habsbourg sont vaincus. Pour Marie de Médicis, c‘est une trahison impardonnable de la part de celui qui lui doit toute sa carrière. L’ex régente pousse donc son fils à destituer Richelieu au plus vite, en vain. 

Un Carnival de fer et d'acier

A l'inverse, c'est Marie de Médicis qui est invitée à partir à l’issue de ce que l’on a appelé "la journée des dupes". En cette année 1630, Richelieu est enfin seul aux commandes. Il est l’homme le plus puissant du royaume et l’un des plus riches mais reste sur ses gardes. Comme il l’écrit dans ses Mémoires, "il faut dormir comme un lion, sans fermer les yeux". Il sait que ça complote autour de lui et place des espions partout et quand un complot est découvert, il ne prend pas de gants. Décapitations, peines de prison, exils, disgrâces… Beaucoup de gouverneurs de provinces et de proches de Marie de Médicis, accusés de complots, font les frais de l’intransigeance de Richelieu qui veut mettre les aristocrates au pas.

Richelieu voit bien au delà des frontières, et il lance plusieurs expéditions. En 1635, le marchand et aventurier Pierre Belain d’Esnambuc établit la première colonie française, Saint-Pierre, sur l’île de la Martinique. Les Français occupent également la Guyane et l’île de la Tortue à Saint-Domingue. Richelieu crée également "la compagnie de la Nouvelle-France", la première tentative de colonisation française en Amérique, une vingtaine d’années après la fondation de la ville de Québec par Samuel de Champlain. Il envoie aussi des missions en Perse, en Russie, en Guinée et en Abyssinie pour y étudier les possibilités commerciales. 

Richelieu laisse à sa mort un royaume de France plus grand, plus puissant et qui a consolidé la paix entre les catholiques et les protestants. Avec Richelieu, la nouvelle France a de nouvelles possibilités en Europe et tente de conquérir des terres inconnues, une grandeur qui sera exploitée et amplifiée par ses successeurs. Mais Richelieu, en renforçant l’absolutisme royal et en écrasant les paysans d’impôts pour financer des guerres, a aussi crée les conditions d’une monarchie de plus en plus repliée sur elle-même et déconnectée des réalités pour reprendre une expression à la mode, ce qui aboutira un siècle et demi plus tard à la Révolution Française. 

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