Charles-Henri Sanson a guillotiné 3.000 personnes au cours de sa vie. À la fin du XVIIIe siècle, pendant presque 40 ans, ce descendant d'une famille de bourreaux a exécuté à tour de bras. C'est pendant la Révolution française que son nom devenu tristement célèbre pour avoir actionné une machine infernale, surnommée à l'époque, le "rasoir national".
A chaque fois qu'une de ses victimes monte sur l'échafaud, le bourreau le plus célèbre de l'histoire de France est doux comme un agneau. Mais c'est pourtant d'une façon méthodique et sans la moindre émotion que Sanson va actionner la lame froide de la guillotine et faire gicler le sang. Les bourreaux ont toujours eu une mauvaise réputation. On les fuit comme la peste et ils sont mis au banc de la société.
Pour être distingués du reste de la population, leurs maisons doivent être en dehors des villes et avoir une porte peinte en rouge, en référence au sang qu'ils font couler. Les enfants des bourreaux n'ont pas le droit d'aller à l'école et ils deviennent bourreaux à leur tour.
C'est le cas des Sanson, qui depuis le règne de Louis XIV au XVIIe siècle, sont bourreaux de père en fils. Envoyé dans un couvent à Rouen sous une fausse identité, Charles-Henri est dénoncé par le père d'un autre élève. À 14 ans, et pour ne pas entacher la réputation du couvent, Sanson doit brutalement quitter la ville de Rouen.
Il poursuit ses études dans le privé et part dans une université des Pays-Bas, dans l'objectif de devenir physicien. Charles-Henri Sanson n'a pas du tout l'intention de devenir bourreau. Ce jeune homme élégant, aux bonnes manières, un tantinet dandy, ne veut pas se salir les mains. Mais alors qu'il n'a même pas 20 ans, son père fait une attaque qui le laisse à moitié paralysé. Comme il faut nourrir sa grande famille, et qu'il est l'aîné, Charles-Henri laisse tomber ses études et reprend l'affaire familiale.
L'idée ne l'emballe pas d'autant qu'une exécution l'a totalement traumatisé. En 1757, le jeune homme assiste avec son oncle, exécuteur à Reims, à la mise à mort de Robert-François Damien, condamné pour crime de lèse-majesté après avoir tenté de tuer le roi Louis XV. Entravé par des chaînes, Damien est écartelé par 6 chevaux. Mais après 60 tentatives, il est toujours en vie. Alors les cuisses sont démembrées, les nerfs sont coupés et les jointures sont hachées, les membres finiront par se détacher des cordages des chevaux, tout comme le tronc qui sera ensuite jeté au bûcher.
Le supplice de Damien va longtemps hanter le jeune Sanson. Pendant presque 20 ans, il apprend le métier de bourreau avec son père. À cette époque, l'éventail des mises à mort est très riche et très sophistiqué : Sanson fouette, torture, écartèle, décapite, marque au fer rouge... À son tableau de chasse, il peut se targuer d'avoir quelques célébrités, comme le chevalier François-Jean Lefebvre de La Barre, accusé de blasphème, et dont il a tranché la tête au sabre, comme il est d'usage pour les nobles.
En 1778, Charles-Henri Sanson est officiellement nommé bourreau de la ville prévotée et vicomtée de Paris et bourreau de la cour du roi de Versailles. Il revêt le manteau rouge sang porté par tous les maîtres exécuteurs des hautes œuvres. Même si le "carnet de commandes" de Sanson est bien rempli, le métier de bourreau ne lui rapporte pas assez d'argent. Pour preuve, à la mort de son père, Sanson doit vendre l'hôtel particulier de la famille, car il n'a pas assez d'argent pour assurer l'entretien d'une telle demeure. Alors, il loue un domicile plus modeste.
Deux ans après la Révolution française, l'Assemblée nationale décide que tout condamné à mort devra être décapité. Sanson monte alors au créneau : il est d'accord pour augmenter la cadence des exécutions, mais il lui faut un outil plus efficace et moins fatigant à utiliser que les traditionnelles haches, épées ou sabres. Pour exécuter rapidement, sans douleur et sans prendre le risque de rater une victime, un médecin et ancien député, Joseph Ignace Guillotin, fait la promotion d'une machine qui porte son nom, la guillotine.
Sanson est chargé d'inspecter l'engin, le 17 avril 1792 à l'hôpital Bicêtre à Paris. Les résultats sont convaincants et l'Assemblée nationale donne son feu vert à l'utilisation de la guillotine. Sanson l'inaugure le 25 avril 1792 en exécutant place de grève, l'actuelle place de l'hôtel de ville de Paris, un condamné pour vol et agression, Nicolas-Jacques Pelletier. Il est le premier guillotiné de l'histoire de France. Mais l'échafaud va faire une victime chez Sanson. En voulant présenter la tête du guillotiné à la foule, l'un de ses fils tombe de l'échafaud et meurt.
Les exécutions s'enchaînent pour Sanson. Parmi elles, il y a celle de Louis XVI, puis celle de Charlotte Corday qui a assassiné, Jean-Paul Marat dans sa baignoire. Puis, la reine Marie-Antoinette qui marche, par mégarde, sur le pied de Sanson en montant à l'échafaud. Quelques jours plus tard, Olympe de Gouges et Manon Roland sont aussi guillotinées. Il exécute également le maire de Paris, Jean-Sylvain Bailly, qui tremble de froid au moment de se faire couper la tête.
Ensuite, c'est au tour des révolutionnaires qui ont fait l'éloge de la guillotine d'y passer. Danton lance avec humour à celui qui va l'exécuter : "N'oublie pas de montrer ma tête au peuple, elle est bonne à voir", alors que le même Danton était réputé pour sa laideur. Saint-Just et Robespierre sont amenés en charrette avec d'autres condamnés à mort sur la place de la Révolution. La veille de son exécution, Robespierre a reçu une balle dans la mâchoire, il est en partie défiguré. Au moment où les aides de Sanson arrachent les linges qui recouvrent sa blessure, celui que l'on surnomme l'incorruptible, hurle de douleur avant que sa tête ne tombe dans le panier du bourreau.
Charles-Henri Sanson meurt finalement en 1806 et il est enterré au cimetière de Montmartre. Après son fils, son petit-fils devient, à son tour bourreau. Au total, la famille Sanson a passé 200 ans à couper des têtes en France. Avec plus de 3.000 exécutions, dont 2.918 rien que pour la période révolutionnaire, Charles-Henri Sanson est de loin le bourreau qui a le plus guillotiné. Mais paradoxalement, il est peut-être aussi le plus humain et le moins cruel de ceux qui ont pratiqué ce métier dans l'histoire.
Sanson n'a pas hésité à refuser d'ailleurs des exécutions. Il a sauvé des femmes de l'échafaud en leur conseillant de se déclarer enceinte. Et il est intervenu personnellement auprès de chefs révolutionnaires pour empêcher des charrettes de prisonniers de finir sous la guillotine.
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