Langue française : quelle est la différence entre athée et agnostique ?

Un “Bonbon sur la langue” mystique, ce 29 décembre. Selon le Petit Robert, mystique, "concerne les pratiques, les croyances visant à une union entre l’être humain et la divinité”. Dans un passionnant documentaire sur Emmanuel Carrère, l’écrivain (disponible sur Arte.tv), celui-ci précise qu’il n’est pas athée, mais agnostique… Or, la différence ne va pas toujours de soi, elle peut même sembler un peu mystérieuse.

D’ailleurs, mystère et mystique appartiennent à la même famille, et le premier sens de mystère est également religieux. Un mystère, c’est en premier lieu un “rite, un culte religieux secret”. Et tenez, remontons le fil des mots, qu’est-ce que la religion ? Le dictionnaire la définit comme la “reconnaissance par l’être humain d’un principe supérieur de qui dépend sa destinée” ou encore comme un “système de croyances et de pratiques propres à un groupe social” (Le Robert). 

Sur le plan étymologique, le mot est issu du latin religio, les spécialistes se bagarrant entre ceux qui croient que ce religio vient du verbe religare, qui a donné relier, et ceux qui pensent que religio vient de legere, “rassembler, recueillir, choisir”, qui a donné notre verbe lire. De toute façon, relier ou lire sont deux origines fort cohérentes avec l’idée que l’on peut se faire de la religion.

Un E muet même au masculin

Pour revenir à l’athée et à l’agnostique, l’athée, c’est, selon le Petit Larousse, celui “qui nie l’existence de Dieu, de toute divinité”. Rayon orthographe, attention, athée fait partie des mots qui prennent un E muet y compris au masculin : un athée, une athée ; voilà un mot épicène (qui ne varie pas selon le genre).

Athée dérive directement du grec atheos. Theos en grec, c'est le dieu, c’est celui qu’on retrouve dans la théologie, la “discipline qui traite (…) de tout ce qui touche au divin” et aussi dans quantité de prénoms d’origine grecque (Théo tout court, pour commencer, qui donc signifie “dieu”, modestement, mais il y a aussi Théodore, “le don de Dieu”, ou Théophile, “celui qui aime Dieu”).

Le A initial d’athée est ce qu’on appelle un “préfixe privatif”, comme dans apatride (sans patrie), ou aphone (sans voix). Bref, athée, c’est littéralement “sans dieu”. Agnostique est un mot beaucoup plus récent : il a été inventé à la fin du XIXe siècle, mais en se basant sur le grec, avec toujours ce A privatif au début. 

En grec, agnostos signifie “inconnu”. “Le mot [agnostique] qualifie, selon le Dictionnaire historique de la langue française, une personne qui considère que l’absolu, et donc toute option religieuse certaine, est inaccessible à l’homme.” Bref, pour résumer, l’athée est sûr que les dieux n’existent pas, tandis que l’agnostique juge que se prononcer sur la question… est impossible.

En faisant quelques recherches, on tombe sur un autre synonyme, moins utilisé, mais finalement très clair : areligieux. On retrouve le même A privatif : areligieux, c’est tout simplement “sans religion” ou “qui n’appartient à aucune religion” (Larousse).

Tous ces mots commencent par ce fameux “A privatif”, comme si ces réalités ne pouvaient être définies qu’en creux, par la négative. Il y a quand même un terme de cette sphère qui ne commence pas par un A : c’est la laïcité. La laïcité, c’est, pour reprendre la définition du Petit Larousse, le “caractère de ce qui est (…) indépendant des conceptions religieuses ou partisanes”.

Laïc vient du grec laikos, désignant “le peuple”, tout simplement. Attention, un laïc peut également être un croyant : c’est juste quelqu’un “qui n’appartient pas au clergé” ou bien, deuxième sens, un “partisan de la laïcité”. 

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