Langue française : quand faut-il employer "l'on" ?

C’est Annie, de Tarbes, qui m’a donné l’idée de vous parler de ce sujet qui était un peu passé sous mes radars. "Férue de belle langue, je n’ai pourtant jamais aimé 'l’on'. Est-il obligatoire ?". Et puis, coup sur coup, j’ai reçu des messages de deux tweeteuses des Bouches-du-Rhône qui me faisaient part de la même antipathie. C’est surprenant ce "club anti-l’on".

La première, Laure de Montalembert, secrétaire de rédaction et rédactrice, trouve "l’on" trop "ampoulé. Quoique… ampoulé soit peut-être un peu ampoulé aussi", reconnaît-elle. La seconde, Laurence Mildonian, journaliste au quotidien La Provence, "n’aime pas ce l’on que l’on sort, dit-elle, pour pudiquement éviter le qu’on".

D’abord, rassurons le club des anti-l’on : l’on n’est jamais obligatoire. On peut toujours se contenter de dire on. Ouf. L’on s’utilise dans une langue soignée, et presque exclusivement à l’écrit.

Les grammaires le recommandent après les mots et, ou, que, qui, quoi et si, pour éviter le hiatus, le choc entre deux voyelles : dire "où l’on va" au lieu de "où on va" par exemple. Et effectivement, on peut préférer "que l’on se rencontre" plutôt "qu’on se rencontre".

Une curieuse origine

L’on est également conseillé devant un verbe qui commence par con ("il faut que l’on confirme notre réservation" plutôt "qu’on confirme"). Attention, précise la Banque de dépannage linguistique, toujours "pour des raisons d’euphonie, il est déconseillé d’employer l’on après dont", par exemple, il serait bizarre de parler de "gens dont l’on ignore le nom").

On évite aussi l’on "dans un enchaînement de mots commençant par la lettre L". Bizarre de dire "si l’on le louait". Donc vous voyez, cet élégant petit l’on est tout de même d’un maniement délicat.

Mais le plus curieux de l’histoire, c’est son origine. Ce "L'" n’est pas juste une invention destinée à "éviter les qu’on", comme le croit Laurence, et au départ il n’avait rien d’ampoulé non plus. Vous vous souvenez peut-être d’un Bonbon sur la langue où je vous expliquais que "on" était un descendant du mot homme.

Le latin homo, hominem, désignant l'"être humain", a donné deux mots en français, on et homme. Donc on disait l’on comme on disait l’homme, ce "L'" étant donc simplement un modeste article défini... qui avec les siècles est devenu facultatif ! Reconnaissons qu’il est même carrément en voie d’extinction. Alors si l’on veut qu’il survive encore un peu, employons-le. Autrement, rejoignons le sympathique club des anti-l’on !