Ce dimanche, j’ai envie de vous parler d’une figure de style, le zeugme, et de Philippe Geluck. Pas parce que, avec eux deux, "zeugme" et "Geluck", on a toutes les lettres pour faire 250 points au Scrabble, mais parce que c’est en lisant le dernier ovni de Geluck que je suis tombée sur un zeugme de toute beauté.
L’ovni s’appelle Geluck pète les plombs. C’est à moitié un album de dessins à l’humour corrosif (quasi sans chats cette fois), à moitié un recueil de chroniques délirantes, surréalistes, poétiques, grinçantes, politiques, écologistes et hilarantes évidemment. L’ami Geluck étant aussi doué dans les deux exercices, pour une fois, il n’a pas voulu choisir...
Mais que recouvre ce drôle de nom, le "zeugme" ? Il s’agit d’une figure de style. Voyons les premières lignes de l’une des chroniques du livre, intitulée Tu vas voir ce que tu vas prendre : "Notre homme, en ce début de printemps, prit de bonnes résolutions, une douche brûlante, soin de son cuir chevelu, un café au lait avec du pain beurré, ses vitamines, son manteau, l’ascenseur, sa voiture, la route, de l’essence (…), le boulevard, [et] la décision de se garer dans le parking."
J’arrête là, mais tout le texte est sur le même modèle. Tout tourne autour du verbe prendre, mais il n’est pas répété. C’est cela, un zeugme – on dit aussi "zeugma", du grec dzeugma, désignant un "lien" : c’est "la coordination, selon Larousse, de deux ou plusieurs éléments qui ne sont pas sur le même plan syntaxique ou sémantique", l’un des plus connus étant l’exemple tiré de Victor Hugo, dans La Légende des siècles, "vêtu de probité candide et de lin blanc".
Ce qui donne un caractère comique au texte, c’est que sont mis sur le même plan les registres concret et abstrait : "Il prit de bonnes résolutions… et un café au lait".
Mais j’ai trouvé une autre jolie figure de style dans ce livre, c’est l’anaphore. On avait beaucoup parlé de cette figure de style au moment de la campagne présidentielle de François Hollande, quand il avait répété : "Moi, président de la République".
Une anaphore, c’est la répétition du même mot ou groupe de mots dans plusieurs phrases. Une autre anaphore célèbre est celle du poème Si, de Rudyard Kipling, qui se conclut par "tu seras un homme, mon fils" :
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir, (…)
Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre (...)
Geluck en fait un pastiche, également en anaphore, pour s’élever notamment contre le harcèlement sexuel, qui s’appelle "If if if hourra" et qui est presque aussi beau.
Geluck pète les plombs, ed. Casterman, en librairie le 31 octobre.
Bienvenue sur RTL
Ne manquez rien de l'actualité en activant les notifications sur votre navigateur
Cliquez sur “Autoriser” pour poursuivre votre navigation en recevant des notifications. Vous recevrez ponctuellement sous forme de notifciation des actualités RTL. Pour vous désabonner, modifier vos préférences, rendez-vous à tout moment dans le centre de notification de votre équipement.
Bienvenue sur RTL
Rejoignez la communauté RTL, RTL2 et Fun Radio pour profiter du meilleur de la radio
Je crée mon compte