Siri est plus indiscret qu’il n'y paraît. Comme Amazon et Google avant lui, Apple est à son tour épinglé pour avoir fait écouter à des humains des conversations enregistrées par Siri. Une enquête du Guardian publiée le 26 juillet a démontré que des employés de société tierces sont chargés d’examiner des requêtes anonymes captées par l’assistant vocal dans le cadre d’un programme d’amélioration du système de reconnaissance vocale.
Ces enregistrements sont le fruit du déclenchement de Siri à tort. L’assistant peut s’activer lorsqu’on prononce un mot ou une phrase proche de la formule consacrée "Dis Siri". Les propriétaires d’iPhone, d’iPad, d’Apple Watch et de HomePod ont souvent expérimenté ce phénomène. Parmi les conversations analysées par les sous-traitants d’Apple figurent des sujets hautement sensibles comme des ébats sexuels, des trafics de drogue, des discussions d’affaire ou des consultations médicales.
Face à la polémique provoquée par cette révélation, Apple a annoncé vendredi 2 août la suspension au niveau mondial du programme d’amélioration, le temps de procéder à un examen approfondi. Cette suspension est temporaire, le dispositif a vocation à être relancé à l’avenir. Dans une future mise à jour logicielle, Apple va permettre aux utilisateurs de Siri d'exprimer leur consentement en choisissant s’ils souhaitent participer au programme d'amélioration ou non.
Apple explique que le programme servait à améliorer la compréhension de Siri. "Les réponses sont traitées dans des installations sécurisées et les examinateurs doivent respecter des exigences de confidentialité", a indiqué le groupe au Guardian. L'entreprise informatique tente de rassurer en expliquant que ces enregistrements représentent moins de 1% des activations quotidiennes de Siri, qu'ils ne durent que quelques secondes et qu'il n'est pas possible d'identifier les utilisateurs.
Selon des sous-traitants d'Apple, "il ne serait pas difficile d'identifier la personne que l'on écoute" même si les enregistrements sont brefs. "L'Apple Watch peut enregistrer des extraits de 30 secondes, ce qui n'est pas très long, mais qui permet tout de même d'avoir une bonne idée de ce qui est en train de se passer", a assuré l'une des sources du Guardian.
Il est possible de se prémunir de ces activations impromptues en désactivant Siri ou certaines fonctionnalités de l'assistant vocal, notamment "Détecter 'Dis Siri'" dans les réglages de l'iPhone et de l'iPad et la fonction "Lever le poignet" dans les paramètres de l'Apple Watch.
Apple n’est pas la première entreprise à avoir initié un programme de ce type. Amazon, Google et Microsoft ont également été épinglés pour avoir fait analyser par des humains des enregistrements recueillis par leurs assistants vocaux Alexa, Assistant et Cortana. Google a d'ailleurs annoncé le 1er août la suspension temporaire d'un programme similaire pour les utilisateurs de l'Union européenne. Mais l'affaire fait particulièrement désordre pour Apple qui aime à marquer sa différence avec ses rivaux en matière de vie privée.
Fort d’un modèle basé sur la vente de produits premium et de services populaires qui n’est pas dépendant de la publicité, Apple s’est posé en champion de la protection des données personnelles et accuse régulièrement ses concurrents de dévoyer la vie privée de leurs utilisateurs au gré des scandales dans lesquels ils sont mouillés. Lors du dernier CES de Las Vegas, début janvier, le groupe californien s’était même payé une publicité géante sur des immeubles surplombant le salon pour affirmer que "Ce qui se passe dans votre iPhone reste dans votre iPhone".
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