C'est un dossier qui pourrait bouleverser le fonctionnement des réseaux sociaux tels qu'on les connaît. Aux États-Unis, la Cour suprême a commencé à examiner deux affaires qui pourraient remettre en cause une loi historique régissant la responsabilité des grandes plateformes Internet sur les contenus publiés par leurs utilisateurs.
Dans le viseur des juges : une plainte déposée par les proches de Nohemi Gonzalez, une étudiante américaine tuée dans les attentats du 13 novembre à Paris, contre Google, la maison mère de YouTube. La famille de la victime reproche à la plateforme d'avoir favorisé la radicalisation des terroristes en permettant à ses membres de visionner des vidéos de propagande du groupe État islamique à travers son système de suggestion.
La plus haute juridiction américaine a aussi accepté de se pencher sur le dossier de Nawras Alassaf, un Jordanien tué en 2017 dans un attentat de Daesh dans une discothèque d'Istanbul. Ses proches accusent Google, mais aussi Facebook et Twitter d'avoir fait preuve de laxisme dans la modération des contenus terroristes.
Derrière ces deux affaires se joue surtout le procès de la "section 230", un article de loi du Communications Decency Acts qui régule le fonctionnement des sites Internet depuis la fin des années 1990.
Ce texte, entré en vigueur à l'époque pour protéger le secteur embryonnaire contre des poursuites en cascade, confère une immunité judiciaire aux plateformes en les exemptant de responsabilité pénale concernant les contenus publiés par leurs utilisateurs, en les considérant non pas comme des éditeurs, mais comme des hébergeurs. Ainsi, de la même façon qu'un kiosque de presse avec les journaux qu'il met en avant, un forum ou un blog ne pouvait pas être tenu responsable en cas de commentaire insultant ou diffamatoire, par exemple.
Trois décennies plus tard, la "section 230" ne fait plus consensus. Les démocrates reprochent aux plateformes de s'abriter derrière cette disposition pour laisser prospérer des contenus illégaux, et les Républicains les taxent de censure lorsqu'elles font usage de leur droit à la modération pour supprimer des contenus qu'elles jugent inappropriés, même s'ils ne sont pas légalement interdits.
En se saisissant de ces deux affaires, la Cour suprême, d'ordinaire rétive à le faire, suggère qu'elle pourrait ouvrir la porte à une évolution de la jurisprudence, alors que les initiatives législatives mises en œuvre pour amender le texte n'ont jamais abouti ces dernières années. Ce changement de pied s'explique par le contexte des dernières évolutions technologiques. Selon les plaignants, l'immunité des plateformes doit être levée lorsque ces dernières utilisent des algorithmes de ciblage qu'elles ont créés pour recommander des contenus préjudiciables aux internautes. Un usage qui peut s'apparenter à une fonction éditoriale.
Si les juges venaient à suivre cette interprétation de la loi, et à exclure les algorithmes de recommandation du champ d'application de la "section 230", Google, Facebook, Twitter et la plupart des réseaux sociaux pourraient faire face à de nombreuses procédures judiciaires par la suite. De quoi remettre en cause les fondements du modèle de l'économie numérique. Un enjeu colossal.
Selon l'avocat de Google, le terme de "recommandation" est abusif. "Il y a 3,5 milliards de requêtes sur le moteur de recherche tous les jours. (Les réponses) sont différentes pour chaque personne et pourraient toutes être considérées comme des recommandations". Les travaux des neufs juges de la Cour suprême s'annoncent particulièrement périlleux. Les décisions sont attendues avant le 30 juin.
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