"C'est vraiment une addiction maintenant" : ces ados qui ne peuvent plus se passer de TikTok

Le réseau social TikTok cumule près de 2 milliards d'utilisateurs dans le monde, 15 millions en France. La moitié d'entre eux ont moins de 24 ans et en plein débat autour de l'addiction aux écrans, l'Union européenne a décidé de s'attaquer au réseau social chinois. La Commission européenne menace de suspendre la nouvelle application TikTok Lite. Le concept de cette application est simple : plus vous passez de temps dessus, plus vous gagnez des bons d'achat.

La Commission européenne pointe du doigt le facteur addictif de cette nouveauté alors que les adolescents passent déjà beaucoup de temps sur TikTok, parfois plusieurs heures par jour. Comme Amine, 17 ans, qui, en attendant son bus, sort son téléphone, ouvre TikTok et commence à faire défiler les vidéos. "Y a du foot, il y a de la musique un peu, y un petit peu de filles aussi", commente-t-il. L'adolescent affirme passer en moyenne trois heures par jour sur cette application. "Ça utilise beaucoup de mon temps libre", avoue-t-il.

"On se dit, on reste une heure, même pas, puis au final, on scrolle, on scrolle, on scrolle toute la journée. C'est vraiment une addiction maintenant. Je sais que c'est mauvais, mais ce n'est pas grave, on passe le temps avec ça", explique-t-il. Pour Amine, TikTok est devenu un réflexe qui l'accompagne à chaque temps mort. "À l'arrêt de bus quand je m'ennuie, je sors TikTok, dans le bus quand je m'ennuie, je sors TikTok. Tout le temps, à l'école, quand je m'ennuie, quand la prof, elle fait son cours ou le soir dans mon lit. Avant, à 22h30 max, je dormais. Maintenant, avec les réseaux sociaux, je dors vraiment très tard, vers 2h du matin, 3h du matin. Ça nuit à mon sommeil", confie-t-il.

Une question de santé mentale

À quelques rues de là, Ava, 18 ans, trouve aussi qu’elle passe trop de temps sur TikTok, et ça depuis qu’elle a 12 ans. Sur son appli, beaucoup de vidéos de jeunes filles qui donnent des conseils beauté. "Comme j'ai TikTok depuis longtemps, je vois beaucoup de belles filles passer, qui sont dans les standards de beauté actuels. J'ai beaucoup changé mentalement par rapport à ça. Physiquement, je me trouve beaucoup moins belle qu'avant. Avant, je m'en foutais, j'étais très nature, peinture. Maintenant, j'essaye de leur ressembler, sinon on se sent dévalorisé par rapport à elles", analyse-t-elle. 

À 20 ans, Sabrina, se souvient que TikTok lui a posé quelques problèmes l’an dernier. "J'avais mes partiels et à ce moment-là, j'étais beaucoup sur TikTok et d'habitude, j'arrive à réviser pendant deux heures d'affilée, trois heures d'affilée. Là, je n'arrivais pas à réviser plus de 30 minutes". 

Aucun des adolescents rencontrés ici à Marseille ne connait TikTok Lite, cette version qui rémunère le temps passé sur l’appli. Il faut dire que ça vient de sortir. Et la plupart d’entre eux trouvent que c’est une très mauvaise idée, qui va les rendre encore plus accros. 

Que disent les spécialistes ?

Sylvie Thirion travaille à l’institut universitaire de recherche Neuromarseille. Pour elle, TikTok active le circuit de la récompense dans le cerveau, c’est pour ça que ça nous rend complètement accro. Alors s’il y a de l’argent en jeu, c’est pire. Sur les ados, cela pourrait être critique puisqu'à cet âge, le cerveau est encore en train de se former. 

"Tout cela va venir faire affecter l’organisation des réseaux neuronaux, au moment où le cerveau est encore en pleine maturation. Cela peut créer des fragilités qui pourront ressortir à l'âge adulte, par exemple dans la recherche de plaisirs intenses et rapides, voire dans certains cas dans le développement d'addictions qui sont des pathologies qui reposent sur l’activation des mêmes réseaux cérébraux", illustre-t-elle.

Alors aujourd’hui, la chercheuse le précise, il y a encore peu d’études scientifiques sur TikTok, puisque l’application est très récente. Mais sur le terrain, les psychologues le constatent, les ados dorment moins bien et ont plus de mal à se concentrer quand ils passent trop de temps sur l’application.

Un rapport d’Amnesty International montre aussi que le réseau social peut amplifier les contenus sur la dépression et le suicide, et pousser les ados vers des comportements dangereux. 

Le rôle des parents

Face à cela, les parents essaient de limiter le temps de TikTok de leurs ados, une tâche pas toujours simple. Leila par exemple, a deux ados à la maison, elle travaille beaucoup, alors c’est difficile de contrôler quoi que ce soit. "Quand je travaille, je suis tout le temps dehors, je ne suis là que le soir à la maison. Je n'ai pas trop le temps pour réguler comme il faut", regrette-t-elle. C’est d’autant plus compliqué à maîtriser que l’application comprend très vite les goûts de chaque ado, et fabrique ensuite un mélange de vidéos très addictif. 

L’actualité par la rédaction de RTL dans votre boîte mail.

Grâce à votre compte RTL abonnez-vous à la newsletter RTL info pour suivre toute l'actualité au quotidien

Je créé mon compte Se connecter

S’abonner à la Newsletter RTL Info