Tout le monde ne peut pas être au top de sa forme mentale en ce moment. Il en est pour qui le confinement est une épreuve et pour peu qu’ils soient d’une nature un peu dépressive, les choses peuvent se dégrader. Dans ces conditions, j’en appelle à leur entourage, car je pense qu’il a un rôle à jouer. Le souci, c’est que parfois, il le joue mal, ce rôle, à cause de quelques idées reçues solidement ancrées dans le cortex.
Je vais donc passer en revue 3 idées reçues, histoire d’éviter que les proches réagissent mal, ou du moins de manière inappropriée, quand ils se retrouvent face à une personne en dépression. La dépression, je le rappelle, ça concerne quand même 3 millions de personnes en France. Et encore, ce chiffre se réfère au temps béni de l’avant pandémie, de l’avant confinement.
La première idée reçue, c’est que la personne dépressive n’a pas de volonté. Ça conduit souvent l’entourage à dire : "Allez, réagis, bouge-toi un peu". Quand vous dites ça, c’est un peu comme si vous donniez des claques à votre ordinateur quand il bug : ça ne sert à rien… Pire : ça complique les choses. Dans un cas vous abimez votre ordinateur, dans l’autre vous retardez la guérison du malade.
Il faut bien comprendre que la dépression est une maladie. Qui se soigne d’autant mieux quand le patient n’est pas sous pression. Quand quelqu’un a le Covid-19, il ne vous viendrait pas à l’idée de lui dire : "Il faut arrêter d’avoir de la fièvre !". Avec la dépression, c’est pareil. On ne dit pas : "Allez, debout, fais comme si tout allait bien". Cette maladie n’a rien à voir avec la volonté.
Beaucoup croient qu'une personne dépressive a forcément subi un choc, mais c’est aussi une idée reçue. Non, la dépression, quand elle pointe, n’est pas forcément due à un choc. Les facteurs qui favorisent son éclosion sont multiples. Parfois, il n’y a même pas de problème psychologique particulier à l’origine du dérèglement physique. D’ailleurs, certains patients sous traitement hormonal en sont victimes.
Et quand il y a un problème psychologique, c’est ce qu’on appelle un facteur déclenchant. Et il n’a pas forcément besoin d’un choc, d’une pandémie, d’un confinement imposé ou d'un drame pour opérer. La dépression enfouit souvent ses racines dans mille choses qui vont de l’accident aux traumatismes de l’enfance en passant par le manque de confiance en soi ou les problèmes génétiques.
Dans de nombreux cas, c’est affaire de chimie cérébrale. Votre cerveau, qui gère la production d’hormones qui sont connues pour réguler notre humeur et par conséquent influer sur notre manière d’agir, de parler, d’aimer, de nous conduire, se met à buguer, un peu comme l’ordinateur que j’évoquais plus haut. Et personne n’est à l’abri, c'est d’ailleurs la troisième idée reçue à combattre…
La dépression serait un problème de riches. Ça aussi, c’est une idée qu’il faut s’enlever de la tête. On le constate sur le terrain, surtout en ce moment : la dépression touche tous les milieux, toutes les catégories socioprofessionnelles. En tout cas en France. Ce n’est pas une coquetterie liée à l’épaisseur du porte-monnaie. Je sais bien qu’on a tendance à se dire : "Regardez, dans les pays pauvres ou les pays en guerre, les gens n’ont pas le luxe de s’offrir une petite dépression". C’est simplement qu’ils sont au-delà de ça : l’urgence, pour ces personnes, c’est de survivre.
Mais quand la paix est de retour, je peux vous dire que les dépressions reviennent aussi, quand on les diagnostique, comme en France. Parce qu’il faut tenir compte du fait que notre système de santé et de veille est, quoi qu’en disent en ce moment ceux qui voudraient tout révolutionner, l’un des meilleurs du monde. Il est perfectible, certes, mais il fait des envieux…