Le prélèvement à la source : une réforme risquée pour Gérald Darmanin
Le ministre joue une part de son avenir politique ce mois-ci. Il faut dire que le sujet des impôts est ultra sensible. Une erreur, et vous donnez l'impression que l'État vole les citoyens.

Le mois de janvier marque le début du prélèvement à la source. Avec cette réforme, le ministre de l’Action et des Comptes Publics, Gérald Darmanin, joue son siège au gouvernement. Il est de loin le plus exposé.
Le ministre joue une part de son avenir politique ce mois-ci. C’est Emmanuel Macron lui-même qui l’a placé dans la seringue. Au mois de septembre dernier, le chef de l’État avait fait part publiquement de ses doutes sur le prélèvement à la source. Il s'était demandé si tout était prêt. Et un président qui hésite ouvertement, ça n'est pas banal.
Il faut dire que le sujet des impôts est ultra sensible. Une erreur, et vous donnez l'impression que l'État vole les citoyens. Quelques 38 millions de foyers concernés. Mais Gérald Darmanin ne cesse de rassurer tout le monde. "Au président Chirac, on avait dit qu'il y aurait un bug de l'an 2000. Heureusement qu'on n'a pas cru tous ces gens parce que sinon, il n'aurait jamais passé l'an 2000", a-t-il dit, avec le sens de la formule.
Des incertitudes
Toutefois, rien n'est sûr à propos de la bonne mise en place de cette mesure. Nous serons fixés avec les fiches de paie du mois de janvier, pour voir si cela fonctionne vraiment partout, y compris dans les petites entreprises. Et on ne sait pas quel sera l'effet psychologique de cette ponction directe des impôts sur la fiche de paie. Même si ça ne change rien sur votre pouvoir d'achat réel, ça pourrait avoir une incidence sur votre consommation.
Mais là encore, Gérald Darmanin balaie d'une main ces inquiétudes. Il aurait à l'appui des enquêtes d'opinion qui montreraient que tout le monde a compris et accepté cette réforme. "La fusée de l'impôt à la source est bien parti", a-t-il récemment déclaré.
Des ambitions locales ?
Il a tout de même conscience de l'enjeu qui se joue ici. Modeste, le ministre a affirmé au Figaro : "C'est rare pour un homme politique de laisser une trace dans la vie des Français".
Au moment du remaniement, il s'imaginait grimper dans l'organigramme du gouvernement, pour reprendre la place du ministre de l'Intérieur. C'est raté. Mais il est persuadé de rester une pièce maîtresse de la Macronie. Bien plus politique que la moyenne des ministres du gouvernement, avec l'expérience de l'élu local, du maire qui connaît les soucis de tous ses administrés.
Il sera d'ailleurs candidat à la mairie de Tourcoing l'année prochaine. On lui prête également des ambitions pour la métropole de Lille. Il est considéré là-bas comme un rival sérieux de Martine Aubry. C'est donc difficile de savoir ce que veut vraiment Gérald Darmanin.
De moins en moins d'amis politiques
Le ministre de l'Action et des Comptes Publics est encore proche de Nicolas Sarkozy ou de Xavier Bertrand. Mais dans le reste du paysage politique et jusque dans le gouvernement, ses détracteurs sont de plus en plus nombreux.
Ils le considèrent gaffeur. Selon eux, les 5 euros d'APL en moins, c'est de sa faute. D'autres le disent narquois, quand il les provoque volontairement à l'Assemblée nationale. Et il y a ceux, au sein de la majorité, qui sont lassés de voir Gérald Darmanin se pousser du col. Certains lui reprochent de ne pas avoir vu venir, lui, l'élu de terrain, le mouvement des "gilets jaunes". On l'accuse également d'avoir envenimé inutilement les choses, en parlant de "peste brune" lors du Grand Jury sur RTL.
Pire : certains lui reprochent d'avoir disparu dès que la situation a commencé à chauffer. Bref, aux yeux de beaucoup, Gérald Darmanin reste un transfuge, aussi bien pour La République en Marche! que pour Les Républicains.