Co-prince d'Andorre, grand maître de l'ordre national du mérite et de la Légion d'honneur, chanoine honoraire de Saint-Jean de Latran, chanoine de Saint Jean de Maurienne, protecteur du domaine de Chambord, protecteur de l'Académie française et de l'Institut de France... le président de la République détient en fait de nombreux titres qui viennent, pour la plupart d'entre eux, tout droit de la tradition monarchique française.
Plus précisemment, le président de la République détient "deux titres féodaux et des titres religieux", explique l'essayiste et historien Bruno Fuligni contacté par RTL. "Les titres d'ordre féodal concerne celui de coprince d'Andorre et de vice-roi de l'île des Faisans.", explique auteur du livre Les lois folles de la République. RTL vous propose un tour d'horizon sur la signification de ces titres, passés par les empereurs, les premiers consuls, les rois ou les présidents français selon les régimes.
"Le titre féodal le plus connu est celui de coprince d'Andorre", commence Bruno Fuligni. "Andorre est un territoire situé dans les Pyrénées qui a été reconnu en l'an 780, à l'époque de Charlemagne. Il est placé depuis toujours sous la suzeraineté de l'évêque espagnol de Seo de Urgell.", explique-t-il.
L'historien raconte que c'est en 1278 que le "principe de paréage entre la France (le comté de Foix) et l'Espagne (l'évêque d'Urgell) a été instauré". À partir de ce moment-là, Andorre "est placé sous la suzeraineté de l'évêque espagnol depuis toujours, et de l'autre côté des Pyrénées, le second coprince était le comte de Foix. Par le jeu des mariages et des alliances familiales, le titre de comte de Foix a fini par être porté par le Roi de Navarre : Henri IV... qui est devenu roi de France en 1589" rattachant donc à la couronne les prérogatives liées à l'Andorre. C’est pourquoi le chef de l’État français est coprince d’Andorre, pays dans lequel vivent 77.265 personnes.
"Sous la présidence de Mitterrand, Andorre s'est constitué en un véritable état avec une constitution est un siège à l'ONU. Cet état a ainsi la particularité d'avoir deux chefs à sa tête. Les Andorrans ne votent pas à l'élection française, ils la subissent, même si localement ils ont leur propre Assemblée", explique l'historien. Désormais, c'est en vertu de l'article 43 de la nouvelle Constitution de la principauté d'Andorre que le président de la République française est titulaire du titre de coprince d'Andorre.
Pour l'anecdote, "lors de sa présidence, Macron a fait faire un portrait officiel de coprince d'Andorre distinct de celui de la présidence française : on le voit devant le drapeau de l'Andorre et parmi les symboles de l'Andorre, il y a une allusion à l’autre coprince, l'évêque d'Urgell. Le président d'une République laïque figure donc devant un symbole religieux, ce qui est assez original" et qui n'avait été fait par aucun président auparavant, raconte l'essayiste.
Autre chose également "assez surprenante : les anciens présidents de la République française ayant exercé cette cosuzeraineté sur Andorre, quand leur mandat prend fin, ils ne sont plus coprince mais Andorre leur octroi la nationalité du pays alors même qu'ils ne parlent pas la langue. C'est un titre honorifique, un titre de courtoisie. Dès lors, Sarkozy, Hollande et leurs prédécesseurs sont tous des sujets andorrans", raconte l'historien.
"Si on reprend les termes espagnols, le président de la République détient le titre de vice-roi de l'île des faisans", explique Bruno Fuligni. C'est une île située à la frontière espagnole et française. Les deux pays exercent donc la souveraineté sur l'île six mois chacun. Actuellement, c'est le roi espagnol qui exerce la souveraineté sur l'île. En août, ce sera au tour du président français", explique-t-il.
Dans les faits, "le pouvoir local est délégué dans les six mois à la marine nationale. Ce sont ainsi les marins qui s'occupent de l’île qui est non habitée. Il s'agit surtout d'entretenir les berges, l'herbe, et de vérifier que personne ne s'y installe, car l'accès est interdit.", explique l'auteur.
Le président de la République est aussi "le premier et unique chanoine honoraire de l'archibasilique du Latran" à Rome, explique l'essayiste. "Cette basilique est considérée comme la mère de toutes les églises du monde, la première des églises. C'est donc un titre très prestigieux pour les catholiques.", estime Bruno Fuligni. Le titre remonte à 1482 lors du règne de Louis XI. Le titre a été renouvelé ensuite par Henri IV.
C'est une distinction symbolique qui est attribuée automatiquement au président, qui peut lui-même décider de "venir en prendre possession en organisant une cérémonie, comme ça a été le cas par Charles De Gaulle, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy". Macron aussi s'est également déplacé à Rome, au Vatican, en juin 2018, pour recevoir le titre. Mais à l'inverse, François Hollande, Georges Pompidou et François Mitterrand n'ont pas fait le déplacement pour en prendre possession. "Quand les présidents vont là-bas, ils entrent à pied dans la basilique. Mais il faut savoir que depuis 1604, le chef de l'État a le droit d'y entrer à cheval", explique Bruno Fuligni. C'est un "honneur royal qui n'est plus appliqué aujourd'hui, mais s'il le veut, il le peut" en théorie.
Le président de la République détient aussi le titre de chanoine d’honneur de Saint-Jean de Maurienne qui remonte à François Ier", explique-t-il. Le président a aussi le titre de "proto-chanoine de la cathédrale d’Embrun, mais aussi de la basilique de Notre-Dame-de-Cléry dans le Loiret, qui a été concédé pour la première fois à Louis XI.", explique l'historien. Il a aussi "le titre de chanoine ad honores d'une dizaine d'églises, dont celle de Saint-Germain-des-Prés à Paris". "Ces titres sont rattachés directement à l'État français, le président ne peut pas les refuser", assure Bruno Fuligni. À titre d'exemple, en 1924, "le président Gaston Doumergue était de tradition protestante, mais il a aussi été premier chanoine. C'est lié à la fonction, ce sont des titres automatiques", explique l'essayiste.
Le président de la République est le grand maître de droit de la Légion d'honneur, la plus haute autorité de l'ordre. "Le jour de son investiture, le grand collier de la Légion d'honneur est ainsi présenté au président". Le bijou est en or massif et pèse un kilo. Il le portait autrefois, et depuis Giscard d'Estaing, le collier est juste présenté au président", explique l'historien. Également détenteur de l'ordre national du Mérite, le président détient le pouvoir de nomination de ces deux ordres.
Emmanuel Macron est aussi protecteur du domaine de Chambord. Ce titre n'est pas religieux et remonte à l'époque de la royauté. Le domaine de Chambord est un château classé monument historique dès 1840 et inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, mais aussi une forêt domaniale de plus de 5.300 hectares, une réserve nationale de chasse et un village. Le directeur général de cet établissement public précise que "cette haute protection (…) se justifie (…) par le caractère exceptionnel de Chambord, seul domaine royal parvenu jusqu'à nous en l'état".
Le président est aussi protecteur de l'Académie française. Les statuts de l’Académie française précisent que "lorsque l’élection d’un nouvel Académicien sera terminée, il en sera rendu compte au Roi". "La prérogative de l’agrément relève aujourd’hui du président. L’élection d’un membre de l’Académie ne devient valable et définitive qu’après approbation du chef de l'État", conclut Bruno Fuligni. Le président confère donc, en quelque sorte, l’immortalité.
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