ÉDITO - "Marine Le Pen demande à Michel Barnier de mettre deux genoux à terre", estime Étienne Grenelle

Michel Barnier est coincé. Soit il cède au RN et il est perdant, soit il ne cède pas et il est perdant. C’est donc "mission impossible" mais sans Tom Cruise, car la politique, ce n’est pas du cinéma. Au vu de la situation, il paraît compliqué de trouver une issue acceptable à cette tragédie pour le Premier ministre, mais surtout pour le pays. 

Marine Le Pen, qui a l’air de vouloir faire tomber le gouvernement, a fait monter les enchères. Si Barnier ne se plie pas à ses exigences, notamment sur les déremboursements de médicaments, elle votera la motion de censure déposée par la gauche. S’ensuivra un chaos budgétaire qui fera courir le risque d’une sanction des marchés financiers, lesquels nous ont déjà à l’œil, comme en témoigne la récente hausse des taux.

Le chef du gouvernement pourrait choisir de céder à Marine Le Pen mais il a déjà plié en renonçant à augmenter la taxe sur l’électricité. Cette fois, la patronne du Rassemblement national lui demande de mettre non plus un, mais deux genoux à terre. Sans compter qu'il avait déjà reculé auparavant, sur les baisses d'allègements de charges et sur les efforts demandés aux collectivités locales. 

Un chaos inévitable

En se mettant à plat ventre, son budget ne sera plus du tout conforme à l’objectif vendu à Bruxelles, et aux marchés financiers, ce qui aurait de lourdes conséquences. Dans sa note, Standard and Poor’s, qui a maintenu vendredi soir la note de la France, a averti : "Nous pourrions baisser la note de la France si le gouvernement est incapable de réduire ses importants déficits ou si la croissance tombe en dessous des projections." 

Si la France ne tient pas son déficit - ce qui se profile - elle sera sanctionnée. Cela nous coûtera très cher, en charge de la dette, mais aussi pour l’économie réelle. N’oublions pas que l’investissement est au point mort depuis la dissolution. Michel Barnier a le choix : ne pas céder au chantage de Marine Le Pen et provoquer le chaos immédiat ou céder pour le retarder. Dans tous les cas, c'est le chaos qui nous attend. 

Tout porte à croire que nous sommes dans une impasse, mais nous pensions la même chose après les législatives avant le petit miracle Michel Barnier, qui a un temps réussi à ouvrir une voie étroite. Aujourd’hui, la porte semble se refermer. Difficile de dire quel scénario éviterait au pays la catastrophe, mais disons-le, ce cinéma politique n’est pas distrayant, il est accablant.