ÉDITO - "Les maires sont les fantassins de la démocratie", salue Alba Ventura

Quand on lit les témoignages des maires, on a froid dans le dos : "Je n’ai pas été élu pour avoir les côtes fracturées", c’est ce que dit le maire de L’Houmeau en Charente-Maritime qui a simplement interdit à des gens du voyage de s’installer sur le stade avant d’être tabassé. Son agresseur a pris un an avec sursis, seulement.

La maire de Chanteloup-les-Vignes, dans les Yvelines, Catherine Arenou a, elle, reçu des jets de pierres pendant 10 minutes : "Ils voulaient me lapider", dit-elle. Dans la Vienne, la semaine dernière, le maire de Saint-Clair, Dominique Brunet, a reçu un coup de poing dans l’œil parce qu’il avait interpellé un automobiliste qui brûlait un feu rouge sous ses yeux : "Nous sommes devenus de la chair à canon", dit-il.

En deux ans et demi, il y a eu 40% de violences supplémentaires contre les élus. Alors, ils ne sont pas tous agressés physiquement, mais ce qui pourrit le climat, ce sont les incivilités, les outrages et plus généralement l’attitude des habitants qui ne sont plus des citoyens, mais des consommateurs. 

40 maires par mois jettent l'éponge

C'est la raison pour laquelle ils sont de plus en plus nombreux à rendre leur tablier. Il y a près de 40 maires par mois qui jettent l’éponge. Alors oui, il y a cette violence endémique, mais il y a aussi tout ce qu’on leur met sur le dos. 

Quelques exemples, on leur demande de créer des logements, mais de ne pas artificialiser les sols. Ils ont la charge de la gestion de l’eau (communes ou agglo) avec toutes les contraintes du changement climatique, c'est-à-dire les sécheresses, les pénuries ou les inondations. 

Par ailleurs, quand l’État annonce une augmentation de 3,5 du point d’indice des fonctionnaires, c’est un coût de plus de 2 milliards pour les communes. Quant au vieillissement de la population, les maires d’aujourd’hui doivent gérer une croissance inédite. Dans la décennie 2020/2030, on a presque deux fois plus de personnes âgées de 75-84 ans. 

Qu'en est-il de leur rémunération?

Ils ne feraient ça que pour gagner de l'argent ? Pas vraiment. Pour une petite commune de 500 âmes, l’indemnité est d'environ 1.000 euros bruts. Pour 10.000 habitants, 2.500 euros bruts et au-delà de 50.000 l’indemnité atteint 4.500 euros.

Montaigne qui a été maire de Bordeaux disait "la charge du maire semble d’autant plus belle qu’elle n’a ni loyer, ni gain autre que l’honneur de son exécution". C’était au XVIe siècle, autre temps, autres mœurs. Si la charge est toujours belle, malgré tout, elle tient plus du sacerdoce que de la petite entreprise prospère et surtout, la fonction de maire aujourd’hui manque de reconnaissance et de respect.

On disait des instituteurs qu’ils étaient les hussards noirs de la République, on peut dire des maires qu’ils sont les fantassins de la démocratie. 

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