2 min de lecture

"C'est beaucoup plus violent qu'un 49.3" : l'option que pourrait dégainer le gouvernement en cas de blocage sur le budget

Sans jamais évoquer cette hypothèse face aux députés, Sébastien Lecornu dispose d'une arme constitutionnelle qui lui permettrait de faire adopter un budget en cas de blocage à l'Assemblée nationale : les ordonnances.

Sébastien Lecornu, à l'Assemblée nationale le 24 octobre 2025

Crédit : Alain JOCARD / AFP

Je m'abonne à la newsletter « Politique »

Sébastien Lecornu n'a eu de cesse de le répéter : le Premier ministre renonce à recourir à l'article 49.3 de la Constitution permettant d'adopter le budget, sans le vote des députés. Exit le 49.3 donc, mais une nouvelle petite musique commence à se faire entendre à l'oreille des députés : et si le gouvernement procédait par ordonnance ? "C'est assez inédit, reconnaît un ministre auprès de RTL. Sans l'article 49.3, on entre dans l'inconnu".

Officiellement, le gouvernement ne se projette pas dans cette hypothèse. Devant les députés vendredi 24 octobre, Sébastien Lecornu a indiqué que "les débats devront aller jusqu'au bout". La ministre de l'Action et des Comptes publics, Amélie de Montchalin, n'a eu de cesse de marteler que "le compromis est possible" sur le budget.

Même si le Premier ministre s'est engagé dans le débat budgétaire à l'Assemblée nationale en revendiquant "une rupture" et en appelant les élus à modifier un projet de budget "imparfait", son entourage ne peut s'empêcher d'imaginer le scénario du pire : blocage des discussions.

L'article 47 de la Constitution

"L'objectif est clair, il faut un budget au 21 décembre 2025", assure un conseiller ministériel. Afin d'y parvenir, le locataire de Matignon pourrait se servir de l'article 47 de la Constitution, en cas de blocages à l'Assemblée. "Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de soixante-dix jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance", prévoit la Constitution. C'est alors que les ordonnances seront dégainées par Matignon, pour acter le budget de l'année à venir. Ce serait du jamais vu sous la Vème République.

L'hypothèse de faire passer le budget 2026 par ordonnance a effleuré l'esprit de Pierre Moscovici. Mais le Premier président de la Cour des compte la juge périlleuse. "Nous avons besoin d'un budget pour 2026 et il est mieux que ce soit un budget qui ne soit pas exécuté par ordonnance, loi spéciale, etc. Bref, que la démocratie puisse jouer son rôle", déclarait-il sur TF1 dès le 17 octobre dernier.

"Plus violent qu'un 49.3"

Ce scénario crispe déjà certains à gauche. La présidente du groupe Écologistes, Cyrielle Chatelain, assure que le "refus des macronistes" de questionner leur politique de l'offre, illustre "l'assurance de celles et ceux qui savent qu'à la fin ils pourront passer en force". Car le "non-dit", c'est la possibilité pour le gouvernement "de passer par ordonnances", pointe-t-elle.

À droite aussi, le recours aux ordonnances serait un choix hasardeux. "Vous avez un Premier ministre qui a décidé de faire vivre le parlementarisme, pour finir par faire passer le budget par ordonnance. C'est beaucoup plus violent qu'un 49.3", estime un député Les Républicains qui souligne que la question d'une censure du gouvernement pourrait alors être à nouveau relancée par la gauche.

Un risque balayé par un membre de l'exécutif. "Nous, on a fait semblant de rien. Le gouvernement a, bien sûr, quelques leviers pour orienter la discussion, mais les ministres n'ont pas de droit de vote sur le budget", indique-t-il renvoyant aux députés, la responsabilité des semaines à venir.

La rédaction vous recommande