Vendredi 15 juillet. La France se réveille meurtrie par
l'attentat perpétré la veille sur la Promenade des Anglais par Mohamed
Lahouaiej-Bouhlel. Alors que le bilan du nombre de victimes s'alourdit, un
concert de critiques est émis de la part de l'opposition à l'encontre du
gouvernement et de sa politique de lutte contre le terrorisme. Au micro de RTL, Alain Juppé a déclaré que "si tous les moyens avaient été pris, le drame
n'aurait pas eu lieu (...) Il faut prendre toutes les mesures nécessaires
pour intensifier notre lutte contre la guerre qui nous a été déclarée par l'État islamique".
L'ancien maire de la ville, Christian Estrosi, expliquait
que "pour l'instant, l'heure est au deuil mais je sens en moi une colère qui monte.
J'ai au fond de moi une cicatrice irréversible, une souffrance épouvantable. Je
la surmonte pour accompagner ces familles dont la souffrance est irréparable.
J'ai trop vu de
papas, de mamans, d'enfants, s'effondrer dans mes bras cette nuit.
Les Niçois, les Français, sont en droit d'attendre des réponses très
claires de la part du gouvernement".
Henri Guaino, l'ancienne plume de Nicolas Sarkozy, a aussi
attaqué le gouvernement en assurant qu"'il suffit
de mettre à l'entrée de la Promenade des Anglais un militaire avec un
lance-roquettes et puis il arrêtera le camion de 15 tonnes".Contrairement aux attentats du 13 novembre, l'unité nationale ne s'est pas mise en place au sein de la classe politique. Invité du
journal télévisé de 20 heures sur TF1, Nicolas Sarkozy a même été jusqu'à
affirmer que "tout ce qui aurait dû être fait depuis dix-huit mois ne l'a
pas été". Réponse immédiate de Manuel Valls et de Bernard Cazeneuve : "Aucun gouvernement n'a fait autant jusqu'à présent pour lutter contre le
terrorisme".
Au micro de RTL, la ministre de la Santé, Marisol Touraine prend la défense du gouvernement et regrette l'emploi de mots tels
que "mensonges d'État, comme a pu le dire Christian Estrosi.
"L'ancien maire de Nice a été outrancier et l'ancien président, Nicolas
Sarkozy, n'a pas été à la hauteur des fonctions auxquelles il prétend. Être un
responsable, c'est ne pas céder, ne pas être emporté par la spirale de
l'outrancier".
Dans un entretien à Metronews, le politologue Thomas Guénolé considère que c'est "la création de la commission d'enquête parlementaire sur les attentats de 2015 (que Nicolas Sarkozy a réclamée en premier) qui a 'brisé un tabou'. 'Le rapport de Georges Fenech (LR) a libéré la parole politique sur les défaillances et les problèmes d'organisation dans les services de police et de renseignement. Donc les ténors de la droite ont à la fois la légitimité et les arguments pour attaquer le gouvernement sur son bilan antiterroriste'".
Selon un dirigeant socialiste, cité dans Libération,
"les seuls à pouvoir les faire perdre, c'est le FN : il ne faut donc lui
laisser aucun espace", avant de reconnaître "nous aussi, on a creusé
ce sillon avec notre délire identitaire". De son côté, l'Élysée se cloître
dans le mutisme. Une stratégie bien précise se cache derrière ce silence.
C'"est intentionnel : laisser les loups hurler entre eux pour souligner la
médiocrité de la droite. Mais vu l'état du pays, pas certain que cela
fonctionne", explique un pilier de l'Assemblée nationale dans les colonnes
du quotidien.
Il ne faut pas confondre la foule et le peuple !
Manuel Valls
Cependant, ce silence laisse place à l'épuisement crié par les internautes. Quelques heures après l'attentat et la déclaration de François Hollande au petit matin, les réactions s'enchaînent sur les réseaux sociaux pour apporter un soutien et rendre hommage aux victimes. Mais la fatigue, l'épuisement et la tristesse se font sentir dans les commentaires. La colère ne désenflera pas et ira même jusqu'à se manifester, lundi 18 juillet sur la Promenade des Anglais, lors de la minute de silence. "Démission", "assassins", huées… Manuel Valls a essuyé les critiques de la foule présente à Nice. Mais le gouvernement poursuit sa stratégie et souhaite mettre en avant l'action du gouvernement. "Je ne laisserai pas dire que 'l'ensemble de la classe politique' se comporte mal. Nous sommes dans la dignité. Celle que nous devons aux Français et au peuple. Et il ne faut pas confondre la foule et le peuple !", a déclaré le Premier ministre ce mardi 19 juillet.
Il adresse ensuite, à l'Assemblée nationale, un tacle direct à Nicolas Sarkozy : "Quand on dit que 'tout n'a pas été fait', cela donne le sentiment que la police n'a pas fait ce qu'il fallait faire, que le ministre de l'Intérieur n'a pas fait ce qu'il fallait, donc que le gouvernement et le Premier ministre n'ont pas fait ce qu'il fallait.... et on s'étonne après que les gens soient en colère et hurlent ?", a-t-il lancé, selon des propos rapportés. "Sauf à dénoncer comme certains élus présents, une 'manipulation' du Front national, l'épisode illustre l'humeur d'une opinion passée du chagrin à la colère", analyse Libération.
Le débat sur la lutte contre le terrorisme ne fait que commencer, selon l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy Thierry Saussez, contacté par Metronews : "Le débat va se durcir au fur et à mesure que l'on se rapprochera de l'élection présidentielle (...) Sur ce plan, Alain Juppé a peut-être un rattrapage à effectuer. Le gouvernement a, lui, tout intérêt à jouer la carte de l'unité nationale au moment où il perd la confiance des Français".
Commentaires
Afin d'assurer la sécurité et la qualité de ce site, nous vous demandons de vous identifier pour laisser vos commentaires.
Cette inscription sera valable sur le site RTL.fr.