Étaient-elles folles ou monstrueuses ? Et d’ailleurs, doit-on toujours parler des sœurs Papin au pluriel ? La justice elle-même les a distinguées, l’une condamnée à mort et l’autre aux travaux forcés. Christine et Léa, deux personnalités singulières mais unies dans la violence, peut-être par des liens inavouables.
En 1927, à 22 ans, Christine entre chez les Lancelin, comme cuisinière. Très vite, elle apparaît comme la servante idéale : efficace, obéissante, discrète. Elle n’a aucun mal à convaincre ses patrons d’embaucher Léa comme femme de chambre. Pour la première fois, les deux sœurs vivent ensemble, sous le même toit, dans la même chambre. Elles dorment dans le même lit. Elles sont logées, nourries, blanchies, et plutôt bien traitées.
Les deux sœurs ont une certaine tendresse pour Mme Lancelin. En cachette, elles l’appellent Maman. Leur vraie mère, Clémence, elles n’en veulent plus. Alors du jour au lendemain, elles coupent les ponts, sans une explication, si ce n’est qu’elles ne supportent plus ses commentaires. C’est tout. Clémence, désormais, elles l’appellent "cette femme". Et à partir de là, leur comportement change.
Les sœurs Papin nettoient leurs armes comme on ferait la vaisselle
Le 2 février 1933, après avoir commis l’impensable, les sœurs Papin nettoient leurs armes comme on ferait la vaisselle. Puis elles prennent un bain, elles ferment leur chambre à double tour et se couchent l’une contre l’autre, en peignoir. C'est ainsi qu’on les trouve, quelques heures plus tard. Elles n’essaient même pas de nier.
Il est clair que leur relation va bien au-delà du simple amour fraternel. Clair aussi qu’elles souffrent d’une forme de psychose paranoïaque, l’une plus que l’autre sans doute. Mais au procès, les deux sœurs sont déclarées saines d’esprit. C’est là que leurs destins se séparent. Christine a endossé l’essentiel du crime, elle est condamnée à la peine de mort, un verdict qu’elle reçoit à genoux. Sa peine sera finalement commuée en travaux forcés. Mais en prison, elle sombre dans la dépression, elle refuse de s’alimenter, et on la transfère dans un asile. C’est là qu’elle meurt en 1937. Elle a 32 ans.
Léa, elle, s’en sort avec 10 ans de travaux forcés. À sa sortie, elle retourne chez sa mère, Clémence, puis elle est recueillie par un couple de Nantes. Elle meurt en 2001 à l'âge de 89 ans.
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