Chef d'orchestre... et d'une secte ? En 2006, le Franco-Suisse Michel Tabachnik est jugé devant le tribunal correctionnel pour "association de malfaiteurs" : il est accusé d'avoir fait partie de la direction de l'Ordre du Temple Solaire (OTS) et d'avoir été impliqué dans la mort de 74 membres de l'organisation. Il sera relaxé en première instance, puis en appel.
Dans la seconde partie des Voix du Crime consacrée à cette affaire, Alain Vuarnet, qui a perdu sa mère et son frère dans un des massacres de l'OTS, revient sur le procès mouvementé de celui qui a été qualifié de "troisième homme" du mouvement. "C'est lui qui avait écrit Les Archers, une littérature ésotérique qui a été enseignée à tous les membres de cette secte", explique Alain Vuarnet.
Passionné de philosophie et de spiritualité, Michel Tabachnik est surtout un chef d'orchestre renommé qui s'est produit dans le monde entier. Il a notamment collaboré avec le célèbre compositeur Pierre Boulez, qu'il appelle "son père spirituel".
Comme le rappelle Le Temps, Michel Tabachnik a perdu sa femme dans un des massacres de l'OTS. Il se dit aussi victime, et plaide la naïveté. "Je me suis laissé faire, car j'avais été conditionné par Di Mambro", le numéro un de la secte, explique-t-il au journal suisse. "Il m'avait fait la prédiction que je n'irais pas diriger un concert à Berlin. La veille de mon départ, j'ai fait une chute d'un étage, je n'ai jamais dirigé ce concert."
Le juge instructeur et ses experts judiciaires combattaient beaucoup plus les parties civiles que Michel Tabachnik
Alain Vuarnet
Dans l'affaire de l'Ordre du Temple Solaire, Michel Tabachnik comparaît seul : les fondateurs de l'Ordre du Temple Solaire, Jo Di Mambro et Luc Jouret, ont eux trouvé la mort dans un des massacres précédents. Ensemble, ils persuadaient les adeptes de l'organisation que leur âme pouvait voyager vers un monde meilleur, grâce à la mort. C'est pourquoi l'enquête penche vers la thèse du "suicide collectif" pour qualifier les événements mortels survenus en France, mais aussi en Suisse et au Canada.
Pour Alain Vuarnet et les parties civiles, la thèse de l'assassinat n'a pas été assez creusée pendant l'instruction. "À l'origine, on parle d'assassinat, participation à une association de malfaiteurs, complicité d'assassinat et par la suite - allez savoir pourquoi - 'assassinat' n'existe plus", explique-t-il. Pendant le procès, il n'en est pas question non plus, excepté lorsque le procureur prend la parole et évoque la responsabilité morale de Michel Tabachnik.
Pourtant, en appel, le chef d'orchestre est relaxé une seconde fois. L'avocat général n'a même pas prononcé de réquisitions. Alain Vuarnet s'indigne. "Pendant cinq ans d'instruction en tant que parties civiles, j'ai eu l'impression que le juge instructeur et ses experts judiciaires combattaient beaucoup plus les parties civiles que Michel Tabachnik", conclut-il.
L'article de la seconde partie des "Voix du crime" consacrée à l'affaire dite du "Temple Solaire", laisse entendre que j'aurais joué un rôle de "chef", de "3ème homme" au sein de cette funeste organisation, voire que je porterais une responsabilité morale dans ce drame qui a aussi coûté la vie à mon épouse et brisé ma carrière professionnelle.
Ces allégations que je réfute avec force, m'obligent à rappeler que j'ai non seulement bénéficié de deux relaxes qui affirment mon innocence mais également d'un non-lieu rendu par la justice suisse dans cette même affaire.
Je rappelle également que le procureur de la République avait confessé, durant le procès, à un journaliste qui peut toujours témoigner : "Nous n'avons rien contre Michel Tabachnik, mais pour que les victimes puissent faire leur deuil, il faut que se tienne un procès pédagogique".
Je tiens encore à préciser que je n'ai jamais eu le moindre contact avec les victimes du Vercors et que je n'ai jamais évoqué, ni dans la "littérature ésotérique" auquel l'article fait référence, ni dans les conférences (non rémunérées) que j'ai pu alors donner, le "transit sur Sirius" qui engendrera cette tragédie. Tout cela a clairement été établi par la justice.
>> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.
Deux fois par mois, l'une de ces Voix du crime nous raconte son point de vue sur une affaire criminelle. Un podcast RTL.
Cet épisode des Voix du crime a été réalisé en partenariat avec Le Nouveau Détective