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Un prêtre en pleine prière.
Crédit : AFP / FRANCOIS GUILLOT
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Le 4 novembre 2019, l’abbé Roger Matassoli est retrouvé mort à son domicile de Ronquerolles, un hameau de la commune d'Agnetz (Oise). Le corps allongé sur le dos, les yeux enfoncés dans leurs orbites, et un crucifix est enfoncé dans la gorge. Le même jour, la gendarmerie de Beaumont-sur-Oise (Val-d'Oise) interpelle Alexandre, 19 ans, au volant du véhicule de la victime. Une autopsie du corps réalisée le lendemain révèle un décès par asphyxie, et que le prêtre a été roué de coups.
Le jeune homme qui souffre de troubles psychiatriques est hospitalisé sous contrainte. En décembre 2019, Alexandre est incarcéré pour "meurtre aggravé avec actes de torture et de barbarie". L'adolescent est en réalité victime d'agressions sexuelles de l'abbé Matassoli depuis ses 14 ans.
Comment une victime a-t-elle pu se retourner contre son bourreau ? Que cachait l'abbé Matassoli au sein de sa paroisse ? Me Caty Richard, l'avocate d'Alexandre, revient dans Les Voix du Crime sur ce que la mort de l'homme d'Église a révélé : les nombreux faits d'agressions sexuelles dont il était accusé.
Je me suis retrouvé à côté de lui, toute une nuit (...) Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Je ne comprenais pas du tout
Jean-Paul, victime de l'abbé Matassoli
Les médias s’emparent immédiatement de l’affaire et la personnalité de Roger Matassoli est scrutée. Alexandre est loin d’être l’unique victime du prêtre. Son meurtre a libéré la voix de plusieurs personnes qui ont également subi les agressions sexuelles de l’homme de 91 ans. Quelques jours après le drame, la cellule d’accueil et d’écoute contre les abus dans l’Église recueille des témoignages qui s’ajoutent à trois plaintes en justice contre l’abbé.
Parmi ces témoignages, celui de Jean-Paul, 67 ans, âgé de 9 ans au moment des faits. Il confie que le prêtre l'a traîné dans sa tente lors d'un camp scout. "Je me suis retrouvé à côté de lui, toute une nuit. Et je ne peux pas rentrer dans les détails, mais j'étais tout petit. La sexualité, le sexe, je ne savais pas ce que c'était. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. Je ne comprenais pas du tout", révèle Jean-Paul au micro de M6.
L'abbé Matassoli, en perpétuel contact avec des enfants, garde une emprise sur ses victimes lors de camps scouts, d'ateliers jardinage, au presbytère de Saint-André-Farivillers (Oise), mais aussi au sein des foyers familiaux. "Il y a une proximité qui fait que je pense que c'est encore plus compliqué, y compris pour les parents. Ça veut dire que l'on a mis son enfant en situation d'être agressé. C'est très culpabilisant", explique Me Richard.
C'est d'une violence de dire à quelqu'un : "ça n'a pas existé puisque c'est trop ancien"
Maître Caty Richard
En 2010, Jean-Paul avait déjà contacté l'évêque de Beauvais, Mgr Jacques Benoît-Gonnin, au sujet des actes pédocriminels de l'abbé datant de 1962. Mais il faut attendre 2018, pour que l'affaire prennent un nouveau tournant. Une première plainte déposée en juillet 2018 par une autre victime, va convaincre Jean-Paul de porter plainte à son tour contre Roger Matassoli. Ce dernier est démis de ses fonctions par Jacques Benoît-Gonnin.
Un autre témoignage interpelle, celui de Colette, qui raconte que son frère Jacques a lui aussi été agressé sexuellement par l'abbé Matassoli dans les années 80. Selon elle, le jeune homme a été abusé entre ses 6 à 15 ans, et a décidé de garder le silence jusqu'à ses 22 ans, lorsqu'il décide de porter plainte... mais les faits sont prescrits. Cinq ans plus tard, en 1986, Jacques, 27 ans, est retrouvé noyé dans la Seine.
"Je pense sincèrement que ce serait plus sage pour tout le monde de dire qu'en matière d'atteinte aux personnes, il n'y ait pas de prescription. Parce que voilà ce que ça donne, ça donne un homme qui finit par se jeter dans la Seine", affirme Me Cathy Richard. Ce n'est quand même pas anodin qu'il se soit rendu au quai des Orfèvres pour déposer plainte, qu'on lui dit que c'était prescrit, et qu'il ait ensuite été retrouvé dans la Seine (...). C'est d'une violence de dire à quelqu'un : « ça n'a pas existé puisque c'est trop ancien".
Depuis le meurtre de l'abbé Matassoli, au moins quatre victimes se sont présentées auprès du procureur de Beauvais. Son meurtre a ouvert la voix de Colette et de Jean-Paul sur les sévices sexuels commis pendant des décennies. En juillet 2021, Alexandre, l'auteur du crime a été déclaré pénalement irresponsable de ses actes par la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Amiens et transféré dans un établissement psychiatrique.
>> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.
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