Une ferme transformée en forteresse digne de "Fort Knox". C'est là, à Amblainville, dans l'Oise, que Caroline Peinado y Ortega emménage au début de l'été 2018. Très vite, la jeune femme de 34 ans s'aperçoit que son propriétaire, qui vit aussi dans l'ensemble divisé en plusieurs appartements, fait preuve d'un comportement étrange.
"Elle s'est rendu compte que son bail n'était pas signé légalement, raconte sa mère Marie-Christine Le Nen dans Les Voix du crime. Et son propriétaire voulait être payé en espèces. Elle le trouvait très intrusif. Et puis jusqu'au moment où elle s'est rendu compte qu'il était rentré chez elle, qu'il avait le double de toutes les clés."
Inquiète, Caroline décide d'alerter la gendarmerie de Méru, la ville d'à côté. Les militaires lui conseillent de venir porter plainte au plus vite. Le 21 août, elle sort de chez elle et s'aperçoit que le badge qui lui permet d'aller et venir dans la ferme est désactivé. Elle appelle les gendarmes, et voit son propriétaire, Jean-Luc Dupond, sortir une arme de son coffre. Elle n'a pas le temps de réagir, l'homme lui tire une balle dans le thorax.
À la fois, je le pressentais et à la fois on n'a pas envie d'y croire
Marie-Christine Le Nen
Peu de temps avant, au téléphone, le gendarme avait demandé à Caroline de prendre une photo de l'arme. "En tout cas, c'est tout ce qu'on voit dans les PV, dans les rapports qu'il y a dans le dossier, explique Marie-Christine Le Nen. Et Caroline leur dit 'Je vais venir donc, puisque le propriétaire je vais...' Et là, dès qu'elle a eu raccroché, dans les minutes qui suivent, les gendarmes ont reçu un coup de fil de voisins disant qu'ils avaient entendu des cris et un coup de feu."
En quelques minutes, Jean-Luc Dupond cache le corps de Caroline dans une remise de la ferme et se retranche jusqu'à l'intervention des gendarmes. Il est finalement arrêté, placé en garde à vue et mis en examen pour homicide volontaire. Les parents de Caroline sont prévenus. "Je crois que tout s'effondre. Cet homme... À la fois, je le pressentais et à la fois on n'a pas envie d'y croire... C'est le ciel qui s'écroule", confie, émue, la mère de la victime.
À ce drame vient s'ajouter une issue décisive : deux jours après avoir été placé en détention, Jean-Luc Dupond met fin à ses jours en prison. "C'est une enclume sur la tête", poursuit Marie-Christine Le Nen. Selon le code pénal, la mort du suspect signifie l'extinction de l'action judiciaire, et donc, des investigations. Mais la mère endeuillée ne peut se résoudre à cette conclusion et décide d'entamer un combat qui dure encore aujourd'hui.
Il a fallu qu'on attende la nouvelle juge et 2022 pour avoir l'autorisation de pouvoir incinérer ma fille. Si ça c'est pas de la maltraitance, qu'est ce que c'est ?
Marie-Christine Le Nen
En 2019, un an après la mort de Caroline, la juge d'instruction en charge du dossier souhaite classer le dossier sans suite. C'était sans compter l'acharnement de Marie-Christine Le Nen et son avocate, Me Juliette Chapelle, qui n'ont de cesse de demander des actes pour maintenir l'affaire ouverte. Les deux femmes dénoncent de" la maltraitance judiciaire". "Il a fallu qu'on attende la nouvelle juge et 2022 pour avoir l'autorisation de pouvoir incinérer ma fille. Si ça c'est pas de la maltraitance, qu'est-ce que c'est ?", s'indigne Marie-Christine Le Nen.
Finalement, cette nouvelle juge d'instruction accepte de recevoir la mère de Caroline. Elle arrive avec une liste de 20 questions. "Cette arme, quand est-ce qu'il se l'est procuré ? Auprès de qui ? Est-ce qu'il avait fait état de ses intentions mortifères ?", interroge-t-elle. "Est-ce que d'autres personnes ont pu l'inciter à commettre ce crime ? Est-ce qu'il a pu bénéficier d'aide avant, pendant, après ?".
Aujourd'hui, toutes ces questions restent sans réponse. Pour autant, Marie-Christine Le Nen a obtenu une petite victoire. L'État a été condamné par la cour d'appel de Versailles : le défibrillateur utilisé en prison pour tenter de réanimer Jean-Luc Dupond après son suicide était défectueux. L'État a décidé de se pourvoir en cassation.
>> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.
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