La "Grande Muette" a désormais son #MeToo. En une semaine seulement, 120 témoignages ont été transmis au gouvernement pour des faits de harcèlement, d'agressions sexuelles ou bien des comportements sexistes au sein de l'armée française.
En 2017, Marie décide d'intégrer l'armée et débute ses classes. Trois mois de formation dans un régiment. Trois mois d'enfer, selon la jeune femme alors âgée de 19 ans, victime de ses instructeurs. "J'avais toujours droit à des petites réflexions sur mes fesses. Toutes les cinq minutes, ils m'insultaient devant tout le monde dans les rangs", confie-t-elle sur RTL. À base de : "Ferme ta gueule, espèce de petite salope"...
Quelques semaines plus tard, elle raconte "l'une des pires soirées". "On dormait en tente. Mon chef de section est arrivé. Il a eu envie de me faire sortir de mon sac de couchage pour me faire marcher au pas dans le lac à 3 heures du matin toute habillée. Je me mets dans un coin tout au bout de la forêt pour me changer." Et de poursuivre : "Je lui tourne la tête et, en fait, il était là. Il allume sa lampe frontale et me dit : 'Je te regarde, j'ai envie de te violer".
Marie retourne alors à son sac de couchage. "Le caporal a passé une main sur mon sein. Puis, on m'a très vite menacée." La jeune femme recevait des messages sur son portable, du genre : "T'as intérêt de fermer ta gueule, parce que je t'attends sinon sur le parking et je te refais le portrait".
Lucie, elle, se trouve en arrêt maladie depuis 6 ans. Cette mère de famille quadragénaire est tombée en dépression à la suite de faits de harcèlement. Elle décrit des propos sexistes répétés lors de sa dernière affectation au sein d'un régiment 100% masculin.
"C'est le commandant qui me harcelait. Il avait créé un climat délétère au sein du service. Par exemple, il fallait que je puisse montrer mon string durant une cérémonie (...) Je suis tombée en dépression, mon état s'est aggravé et j'ai sombré."
Dans ces deux affaires, des plaintes ont été déposées. La plainte de Marie a été classée sans suite, faute de preuves suffisantes. L'affaire de harcèlement visant Lucie a bien été jugée dans le cadre du droit pénal militaire.
En cas d'infractions, crimes ou délits, les militaires sont ainsi jugés par des tribunaux spécialisés avec des procédures adaptées. Le soldat condamné à verser 1.000 euros de dommages et intérêts a bénéficié de la composition pénale. Il s'agit d'une forme d'accord entre la hiérarchie et le procureur qui permet d'éviter une inscription au casier judiciaire, synonyme d'exclusion des rangs de l'armée.
Il n'y a donc pas eu de procès, ce que dénonce au micro de RTL Élodie Maumont, avocate spécialisée en droit pénale militaire. "On prive la victime d'un procès et la peine apparaît moindre qu'une peine prononcée par un tribunal correctionnel en audience publique".
Face à ces cas de violences sexuelles, l'armée a décidé... de mettre à pied quelques jours les agresseurs de Marie. Dans le cas de Lucie, aucune sanction n'a été prise. Et quand elle a voulu dénoncer les faits, on a lui a demandé de ne pas ébruiter l'affaire. "Ma psychologue militaire m'avait conseillé d'appeler l'inspection générale des armées pour la marine. C'était une femme au téléphone. Elle m'a répondu qu'on n'allait pas pourrir la carrière d'un officier pour si peu."
Laëtitia Saint-Paul dénonce une forme d'impunité. Chaque jour, la capitaine de l'armée de terre et députée Renaissance du Maine-et-Loire reçoit des dizaines de témoignages. "La tendance forte est de mettre la poussière sous le tapis, de faire en sorte que la victime se mette en arrêt maladie, quitte l'institution. Au final, on a une victime qui est écartée de l'armée et un agresseur qui, en toute impunité, est maintenu." Et d'ajouter : "Fort de cette impunité, l'agresseur s'en prend souvent à d'autres victimes par le futur."
"Personne n'est protégé dans les armées sur les crimes ou délits liés à des agressions sexuelles ou des viols. Est-ce que des dérives individuelles existent ? Oui. Faut-il les combattre plus durement ? Oui. J'ai signé une instruction aux armées", a répondu à RTL Sébastien Lecornu, lors d'une conférence de presse sur l'armement. "Systématiquement", une enquête disciplinaire est ouverte et "le parquet est saisi".
Dans ses instructions, le ministre des Armées appelle également à mieux protéger les victimes : ne pas les déplacer, éviter tout contact avec leur agresseur présumé. Et à suspendre systématiquement les militaires suspectés de viols ou d'agressions sexuelles.
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