La publication du livre de Camille Kouchner, La Familia Grande, dans lequel elle accuse Alain Duhamel d'inceste, a permis une libération de la parole des victimes. Mercredi 3 mars, Édouard Durand, juge des enfants au tribunal de Bobigny, sort à son tour un ouvrage sur le sujet : Violences sexuelles, en finir avec l'impunité. Nommé co-président de la commission sur l'inceste et les violences sexuelles après la démission d'Élisabeth Guigou, il explique au micro de RTL que "l'inceste est un crime absolument spécifique".
"L'inceste est un crime spécifique qu'on appelle un crime généalogique en ce qu'il vient ôter à l'enfant sa place dans sa filiation, dans sa lignée familiale", indique le magistrat. Pour illustrer son propos, il cite le roman de Christine Angot, Une semaine de vacances : "en venant à elle sexuellement, il se refuse à elle comme père". Crime basé sur la violence et le pouvoir, l'acte incestueux "remplace l'interdit de la violence par l'interdit de parler", poursuit-il. Un silence qui "contamine l'ensemble des protagonistes, car il est plus commode de ne pas voir".
Édouard Durand insiste également sur la nécessité de se sentir en sécurité chez soi. "La maison doit être le lieu de la protection : dehors il peut arriver des tas de choses mais en rentrant je serai en sécurité et enfant, je serai protégé par mes parents", explique-t-il. Ramener de la sécurité dans les foyers où des violences sont commises permettra aux victimes de reprendre correctement leur développement.
"Il y a quelque chose chez l'humain qui se refuse à penser le viol et le viol incestueux", estime Édouard Durand. Pour que les choses changent, il faut, selon lui, "que la société fasse un effort sur elle-même", mais plusieurs outils doivent être mis en place. D'abord, la loi comme construction sociale qui vient dire une exigence collective. Ensuite, donner aux professionnels qui vont chercher la parole de l'enfant des outils pour agir.
"Nous savons que le plus puissant mécanisme est celui du déni et que les violences sexuelles commises sur les enfants produisent une double sous-révélation", poursuit le magistrat. "Il y a un nombre très réduit de dépôts de plainte et quand celui-ci existe, les victimes disent moins que l'horreur du réel. Ensuite, lorsqu'un enfant rapporte des violences et qu'il perçoit dans le regard de l'autre qu'il n'est pas cru, il risque un effondrement psychique. Enfin, les fausses accusations sont très résiduelles", détaille-t-il.
Alors que 70% des plaintes pour des violences commises sur des mineurs sont classées sans suite, le juge pour enfant plaide également pour un déploiement des moyens dans les écoles. Ce sont les enceintes scolaires qui produisent le plus de signalements en la matière.
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