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Le tribunal de Marseille, le 15 mars 2021.
Crédit : NICOLAS TUCAT / AFP
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Sarah pleure à chaudes larmes quand la juge lui annonce qu’elle fêtera ses 19 ans à la prison pour femmes des Baumettes. Condamnée à 4 mois de prison ferme ce lundi 3 juillet en comparution immédiate, cette Marseillaise au visage d’adolescente, chouchou rose dans les cheveux, s’est timidement défendue à la barre. "C’est la curiosité, l’adrénaline qui m’a poussée à entrer dans cette boutique. Je regrette, je suis désolé, je viens de passer 4 jours dans une cellule, ça a été compliqué… Je ne recommencerai pas". La Procureur l’avait rappelé en début d’audience : le fait que ces vols de chaussures ou de vêtements dans des magasins éventrés se soient déroulés au cours de furieuses émeutes dans le centre-ville jouera comme une circonstance aggravante : "Pour stopper l’engrenage, il faut des peines exemplaires !".
Inconnue des services de police avant son arrestation dans la nuit de vendredi à samedi, alors qu’elle sortait d’une boutique de la rue St Férréol avec un sac contenant vêtements et chaussures de marques, Sarah est déscolarisée depuis plusieurs années. En rupture familiale, son avocate plaide en 5 minutes "un parcours de vie cabossé" et une jeune fille "qui a toujours travaillé, que ce soit à la régie des transports marseillais ou dans des fast-foods". Condamnée à rembourser 1.000 euros pour rembourser le préjudice, Sarah quitte le tribunal pour être directement amenée dans sa cellule de prison.
A ses côtés, sur le banc des prévenus, deux jeunes Algériens en situation irrégulière. "Je suis passé devant le Monoprix, j’ai vu que tout le monde prenait des trucs" : Hatem est sorti du magasin, fracturé quelques heures plus tôt, avec un panier bien garni de produits cosmétiques et de quelques habits, avant de se faire interpeller dans un hall d’immeuble par des policiers qui l’avaient suivi. Il est condamné à 1 an de prison ferme, une obligation de quitter le territoire et une interdiction de revenir en France pendant 5 ans. Kamel affirme, par la voix de son interprète, qu’il a "ramassé des affaires par terre" laissées par les premiers pillards. Jugé pour recel, il écope "seulement" d’un an de prison avec sursis. Les deux avaient des casiers judiciaires vierges, comme la plupart des émeutiers qui ont comparu ce lundi.
Ce n'est pas mon monde, je vais le regretter toute ma vie
Jérôme, 27 ans, condamné à un an de prison avec sursis
Parmi ces profils très disparates, Jérôme, fils d’un chef d’entreprise. Il habite dans une petite bourgade à 20 kilomètres de Marseille et vient de passer 4 jours dans une cellule, entre sa garde à vue et la détention provisoire. Il prie littéralement dans le box, les yeux au ciel, supplie qu’on ne le renvoie pas en prison. "Madame la juge, 48 heures de garde à vue, ça ne m’était jamais arrivé. Ce n’est pas mon monde, je vais le regretter toute ma vie". Papa a promis de lui donner les rênes de l’entreprise. Ce jeune homme de 27 ans a été interpellé dans le secteur du vieux port avec deux pantalons Hugo Boss qu’il dit avoir ramassés sur le trottoir, devant la boutique. Verdict : un an de prison avec sursis.
Mahamadou, lui, n’a pas peur de la justice. Il a plutôt peur qu’on prévienne ses parents. Fils d’un diplomate malien, arrivé en France dans ses bagages en 2015, il a 21 ans. Etudiant à la faculté de Marseille, s’exprimant bien, cette armoire à glace a "écrit deux lettres d’excuses" pour les magasins qu’il a pillés. "J’ai fait acte d’opportunisme", avoue-t-il. "Je n’ai cassé aucune vitre, je ne suis entré dans aucun magasin, j’ai tout trouvé par terre", plaide-t-il. Sauf qu’il avait un cache cou pour dissimuler son visage et un carton plein de vêtements dans les bras. Sans permis de travailler en France, il a écopé de 10 mois de prison ferme avec effet immédiat et d’une obligation de quitter le territoire. Direction Bamako. La honte de la famille : ses cinq frères et sœurs sont tous insérés professionnellement à Paris.
Des peines lourdes pour ces émeutiers "de second rang", qui ne sont pas des casseurs, mais plutôt des voleurs opportunistes. Habituellement, pour un vol par ruse ou par effraction, il est rare d’être condamné à de la prison ferme quand on passe devant un tribunal pour la première fois. Le procès s’est déroulé dans un climat pesant : outre la grève des greffiers qui perturbe le fonctionnement du tribunal, plusieurs dizaines de militants politiques, tendance autonomes et révolutionnaire, sont venus soutenir les pilleurs dans la salle. Avant d’être évacué pour des insultes contre la juge et un avocat. Les audiences de comparution immédiate d’émeutiers présumés vont s’enchaîner au moins jusqu’à mercredi.
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