Disqueuse, chalumeau et trois heures à l'intérieur : comment le muséum national d'Histoire naturelle a été cambriolé un mois avant le Louvre

Pour les musées français, l'automne est noir. Deux jours après le spectaculaire cambriolage du musée du Louvre, le 19 octobre, et la disparition de huit bijoux comptant parmi les plus précieux de sa collection, un rebondissement dans une autre affaire récente met l'accent sur la difficile sécurisation des musées, y compris les plus prestigieux.

Ce mardi 21 octobre, la procureure de Paris, Laure Beccuau, annonce qu'une femme de 24 ans de nationalité chinoise a été mise en examen et placée en détention provisoire pour le vol en bande organisée de pépites d'or commis le 16 septembre au Muséum national d'Histoire naturelle à Paris. 

Également mise en examen pour association de malfaiteurs, elle avait été "remise le jour même par les autorités espagnoles, qui l'avaient interpellée à Barcelone le 30 septembre en exécution d'un mandat d'arrêt européen".

1,5 million d'euros de préjudice, une valeur scientifique et historique inestimable

Les faits se sont produits dans la nuit du 15 au 16 septembre, un peu plus d'un mois avant le spectaculaire vol de joyaux au Louvre. Une employée de ménage arrivée sur place dans la matinée a signalé la présence de débris avant qu'un conservateur vienne constater la disparition de pépites d’or habituellement exposées. 

Selon la procureure, les pépites d'or dérobées sont "originaires de Bolivie, léguée à l’Académie des sciences au XVIIIᵉ siècle", mais aussi "de l’Oural, offerte par le Tsar Nicolas 1er de Russie en 1833 au muséum, de Californie découverte au moment de la Ruée vers l'or dans la seconde moitié du XIXᵉ siècle". Ont également disparu "un morceau de quartz richement aurifère originaire de Guyane découvert en 1883 ; et une pépite d’or de plus de 5 kg originaire d’Australie découverte en 1990. Le poids total de ces pièces était estimé à près de 6 kg".

Après analyses précises, le préjudice financier a été évalué à 1.5 million d’euros. Cette somme "correspond à la valeur de l’or natif, supérieure à l’or métal", à laquelle s'ajoutent "50.000 euros de préjudice matériel". Mais la valeur historique et scientifique de ces pièces "a quant à elle été jugée inestimable".

Trois heures à l'intérieur du musée

Selon les premiers éléments de l'enquête de la Brigade de répression du banditisme (BRB), deux portes du musée ont été découpées à la disqueuse, outil également utilisé par les cambrioleurs du Louvre pour s'introduire dans le musée. La vitrine abritant les pépites a été brisée avec un chalumeau qui a été retrouvé à proximité, tout comme la disqueuse, un tournevis, trois bonbonnes de gaz servant à alimenter un chalumeau et des scies.

Les images de vidéosurveillance montrent qu'une personne seule était entrée par effraction dans le musée peu après 01 heure du matin. Toujours selon les images de vidéosurveillance, cette personne est ressortie trois heures plus tard, vers 4 heures du matin, "après avoir longuement surveillé les alentours". 

Selon nos confrères de l'Agence France-Presse, qui citent une source policière, le système d'alarme et de vidéosurveillance du Muséum était "inopérant" depuis une cyberattaque survenue le 25 juillet, a appris l'AFP de source policière, ce que le musée n'a ni confirmé, ni démenti.

"Les investigations téléphoniques ont démontré que la suspecte avait quitté la France dès le 16 septembre et s'apprêtait à regagner la Chine", ajoute la procureure. Au moment de son interpellation en Espagne, le 30 septembre, la jeune Chinoise a tenté de se débarrasser d'un kg d'or fondu.  La procureure a précisé que l'enquête se poursuivait, notamment pour rechercher ce qu'il est advenu des objets volés et trouver d'éventuels complices.

Vers une commission d'enquête sur "la sécurisation des musées"

La police est par ailleurs toujours aux trousses des quatre malfaiteurs du Louvre partis, un mois plus tard, avec huit "joyaux de la couronne de France", un vol spectaculaire qui a déclenché une polémique politique et interroge sur la sécurité des musées de France, dont le plus célèbre du monde.

La présidente-directrice du Louvre, Laurence des Cars, sera auditionnée mercredi par la commission des Affaires culturelles du Sénat. Et le président de la même commission à l'Assemblée nationale, Alexandre Portier, proposera le même jour à ses collègues la création d'une commission d'enquête sur "la sécurisation des musées" et la "protection du patrimoine".

Début septembre, deux plateaux chinois et un vase classés "trésors nationaux" ont par ailleurs été dérobés en pleine nuit au musée national Adrien Dubouché de Limoges, qui possède une riche collection de porcelaine, un préjudice de plusieurs millions d'euros, opéré probablement à la demande d'un commanditaire, selon les autorités. Le préjudice est estimé à 9,5 millions d'euros.

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