Deux longues heures s'écoulent avant que la police donne l'assaut au Bataclan, plus grosse scène de carnage parmi les lieux des attaques qui ont touché Paris vendredi 13 novembre. La première colonne de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) arrive dans la salle à 22h15. Tout est alors figé, plus un bruit. Les hommes de la Brigade anti-criminalité (BAC) qu'ils ont croisés dans le hall - ceux qui sont intervenus en premiers - leur confirment qu'ils viennent de tirer sur le terroriste présent sur la scène et qu'il a explosé.
Au pied de la scène, dans la fosse, se trouve un amas de corps. Des morts, des blessés et des vivants qui font les morts. Pendant de longues minutes, la BRI progresse lentement. "Il y avait des corps, des gens cachés dans les moindres recoins, des téléphones qui vibraient, et du sang, beaucoup de sang", se souvient un policier. "On faisait sortir ceux qui le pouvaient", ajoute-t-il.
Vers 23h15, les hommes de la BRI butent face à une porte du premier étage. Ils entendent tout de suite un homme crier. Il s'agit d'un otage que les terroristes utilisent comme un porte-voix. "Ils sont deux ils ont des ceintures explosives, reculez !" La colonne de la BRI s'arrête. Quelques minutes s'écoulent et l'un des ravisseurs donne un numéro de portable au négociateur de la police. Entre 23h30 et minuit, ils auront cinq conversations ensemble. Très vite, les policiers comprennent le dessein des terroristes. "Ils voulaient qu'on s'en aille mais que des journalistes nous remplacent", raconte l'un d'entre eux. Les terroristes voulaient un massacre télévisé. À partir de cet instant, l'assaut est inéluctable.
Un policier de la BRI confie qu'il était sûr, à ce moment, que lui ou plusieurs de ses collègues ne sortiraient pas vivants du Bataclan. Mais il n'y avait pas d'autre choix. Derrière la colonne d'assaut qui s'organise, des médecins sont prêts. À 00h18, l'un des terroristes téléphone au négociateur à nouveau. "On s'est dit qu'on aurait une petite seconde d'effet de surprise, alors on entre", explique un policier. Survient alors un déluge de balles : 27 impacts sont relevés dans le bouclier qui protège les hommes de la BRI.
Pas question de répliquer, il ne faut pas risquer de tuer un otage dans l'étroit couloir. Pendant que les terroristes tirent, leurs otages parviennent à ramper, certains passent sous le bouclier. "Ils étaient dans nos pieds, on essaie de les sortir par l'arrière", raconte un policier. Une fois qu'ils sont tous évacués, la BRI décide d'éliminer les deux terroristes. Un seul tir, la ceinture d'un des terroristes se déclenche : l'assaut est fini.