Les menaces de Donald Trump de porter à 200 % les droits de douane des alcools européens si l'Union européenne ne retirait pas son projet de taxe sur le whisky et le bourbon états-uniens ont été vécues comme un coup de massue par les professionnels du vin et des spiritueux français. Ces derniers ont exprimé, jeudi 13 mars, leur "stupéfaction" et leur "consternation".
Pour Nicolas Ozanam, directeur de la Fédération française des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), cela ne fait aucun doute : "À 200 %" de droits de douane, "le business s'arrête", alerte-t-il. Car cela reviendrait à tripler le prix de la bouteille vendue. Une hausse inimaginable pour le secteur. Il y a "urgence pour trouver une solution", poursuit Nicolas Ozanam.
Même son de cloche du côté de Sylvain Bersinger, chef économiste d'Asterès. La nouvelle serait "particulièrement inquiétante" pour la France, car la filière "représente environ la moitié des exportations européennes de boissons alcoolisées vers les États-Unis". La patrie du champagne, du cognac et du bordeaux a exporté en 2024 pour 3,9 milliards d'euros d'alcools aux États-Unis, soit un quart des exportations du secteur.
"Les vins et spiritueux ne doivent pas être l'otage d'une escalade commerciale", a réagi dans la soirée le président du Comité Champagne, David Chatillon, invitant "les deux parties à trouver une solution négociée".
"Notre secteur génère 70 000 emplois en France [...] et n'accepte pas d'être sacrifié du fait de décisions politiques européennes qui ne le concernent pas", a, de son côté, estimé le Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC), pour qui "le marché américain est [le] premier débouché".
Le pays représente aussi le premier marché des vins de Bordeaux, selon le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, qui n'a pas souhaité réagir dans l'immédiat aux menaces américaines.
Si Donald Trump a menacé d'imposer des droits de douane de 200 % sur les vins et alcools européens, c'est pour répondre aux taxes de 50 % annoncées sur le whisky et le bourbon américains. Une annonce de Bruxelles qui était déjà une réponse aux surtaxes américaines de 25 % sur l'acier et l'aluminium.
Un jeu de surenchère qui ne plaît pas à Nicolas Ozanam. "On ne comprend pas ce que fait la Commission européenne, [...] ça n'a aucun sens", assure-t-il.
Pour François Bayrou, répondre aux décisions de Donald Trump est indispensable. "On ne peut pas se laisser terrasser par des menaces de cet ordre", a estimé le Premier ministre. "Il importe que nous montrions, nous, Européens, [...] que nous ne cédons pas à ce genre de menaces", a-t-il ajouté, balayant l'idée d'abandonner la taxe sur le bourbon.
"Nous n'avons jamais voulu qu'il y ait une augmentation des droits de douane", a appuyé le ministre du Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin. "Nous ne voulons pas d’une guerre commerciale, mais l’Europe ne va pas se laisser faire si les États-Unis continuent à menacer les exportations européennes", a-t-il ajouté, appelant à poursuivre le dialogue pour convaincre les Américains de faire machine arrière.
Les droits de douane américains sur le vin français sont aujourd'hui à un niveau très bas, autour de 10 centimes d'euro le litre, selon la FEVS. Les spiritueux étaient eux exonérés de taxes depuis un accord transatlantique de 1997. Ce dernier avait permis, selon le lobby du secteur Spirits Europe, un boom des échanges jusqu'en 2018, quand la précédente administration Trump avait lancé sa première guerre commerciale sur l'acier et l'aluminium.
Si le secteur vit si mal cette situation, c'est qu'il subit, depuis l'automne, une surtaxe de Pékin, son autre grand marché, en contentieux avec l'UE, ce qui a entraîné une baisse de 25 % des exportations de cognac et d'armagnac vers la zone Chine/Hong-Kong/Singapour.
"On savait que ça allait nous tomber dessus, mais 200 %... Les États-Unis sont notre deuxième marché export en valeur et en volume", s’est alarmé Olivier Goujon, directeur de l’interprofession armagnac, appelant le gouvernement à "prendre le sujet à bras le corps".
À 200% de taxes, une bouteille vendue une soixantaine de dollars passerait à plus de 180, souligne l'interprofession : "Le prix risque de devenir inaccessible pour le consommateur", alors que les États-Unis sont le deuxième marché à l’exportation après le Royaume-Uni.
Depuis son retour à la Maison Blanche, le président américain a multiplié les annonces de droits de douane, comme moyen de pression sur les États tiers, de protection de certains secteurs industriels et source de revenus pour l'État fédéral.
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