Le gouvernement songe à geler les loyers d'ici cet été. Ça pourrait faire partie du paquet d'annonces en faveur du pouvoir d'achat qui devrait être voté après les élections législatives. En tout cas, à Bercy, on a clairement fait savoir, la semaine dernière, qu'on était favorable à un gel des loyers dans les prochains mois. Les ménages dépensent entre 25 et 40% de leurs revenus dans leurs loyers, c'est une part importante du budget familial.
Un propriétaire peut réviser ses loyers tous les trimestres. L'Indice de Révision des Loyers est calqué sur l'inflation. Au premier trimestre de cette année, on était déjà sur une hausse des prix de 2,48%, ce qui ne s'était pas vu depuis 2009. C'est-à-dire depuis la dernière crise financière des subprimes qui était une crise immobilière aux États-Unis. Cette fois, l'inflation galope et on pourrait avoir des loyers qui prennent 4% cet été par rapport à l'année dernière et jusqu'à 5% à la fin 2022.
Bercy serait prêt à geler les loyers pour deux raisons qui ont été évoquées, selon nos informations, la semaine dernière, lors d'une réunion. Première raison : évidente, celle du pouvoir d'achat. Vous avez 40% des Français qui sont locataires dans le pays, selon l'INSEE. Mais ce sont d'abord des jeunes (des étudiants (20%) ou de jeunes ménages (19%). Ce sont aussi des personnes seules (45%) ou des familles monoparentales (12,3% mais c'est la catégorie qui a le plus progressé en 30 ans).
Évidemment, il s'agit de la population la plus fragile, la moins riche. Autrement dit celle qui subit le plus la hausse des prix de l'essence ou de la nourriture. Mais ce n'est pas seulement un geste social pour ces populations fragiles. La seconde raison est financière et elle fait aussi partie des arguments qui sont mis en avant par des conseillers de Bercy pour défendre un gel des loyers cet été.
Si les loyers suivent l'inflation actuelle, alors les APL vont devoir également suivre. Et ça serait un gouffre pour l'État. Ça effacerait la mesure du précédent quinquennat avec la réduction de 5 euros des APL et la "contemporanéisation" des allocations. Si les APL prennent 4 à 5% d'augmentation dans l'année, c'est un surcoût de 750 à 1 milliard pour l'État. Impossible en l'état actuel des finances. Si les loyers ne bougent pas, les APL ne bougent pas. Et les comptes publics sont bien gardés.
Les associations de défense des consommateurs, comme la CLCV, demandent un gel de 12 mois des loyers. Les gestionnaires du parc HLM public réclament le même principe que pour le bouclier tarifaire sur le gaz et l'électricité : que l'État compense le manque à gagner en cas de gel des loyers. Et vous l'avez compris, à Bercy, on ne ferme pas la porte.
Une partie du parc est possédé par l'État ou par la Caisse des Dépôts et Consignation. Ce serait donc sous la tutelle du gouvernement. Un gel généralisé des loyers dans le parc locatif privé, ça va causer beaucoup de tension effectivement et ce sera plus difficile à faire appliquer.
Vous avez 15% des Français qui sont propriétaires d'un logement secondaire et qui le louent. C'est souvent un investissement et un complément de revenu. On peut même dire un complément de retraite car 70% des propriétaires bailleurs ont plus de 50 ans et 1/3 ont plus de 65 ans. Ils sont donc à la retraite.
Les propriétaires ont donc besoin des loyers pour compléter leurs revenus. C'est ce que nous disent les associations de propriétaires. Et c'est évidemment vrai. Ils subissent eux aussi la hausse du coût de la vie. Mais quand on épluche les tableaux de l'INSEE, on constate quand même que les plus de 65 ans qui ont des appartements en location font partie du 1/4 des revenus les plus élevés du pays. Ce sont mécaniquement ceux qui ont le plus de capacités et d'épargne à absorber l'inflation.
C'est typiquement le dossier inflammable qui peut réveiller l'opposition mélenchoniste. LFI avait été excellente en 2017 en apportant dans l'hémicycle des courses réalisées avec 5 euros lors de la dernière réforme des APL. C'est bien pour ça que le dossier devrait rester dans le tiroir de Bercy jusqu'aux législatives.
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