"Quand je m'évade, je ne sais pas qui est Michael Jackson et ce qu'est Star Wars" : prisonnier d'une secte, il réussit à s'enfuir après 8 ans d'isolement

À 10 ans, Lucas Le Gall a été entraîné dans la Scientologie (mouvement "religieux" considéré comme une secte et interdit en France depuis 1965) par ses parents erratiques. Le jeune garçon a passé 8 années au cœur de cette institution, isolé du monde. L'organisation lui a volé une partie de son enfance, le faisant travailler jusqu'à 100 heures par semaine, dans des conditions atroces. Mais il a résisté. Lucas a patiemment attendu la majorité pour élaborer un plan digne des meilleures scènes d'évasion. Au micro Faustine Bollaert, il raconte ce jour fatidique où il a laissé derrière lui des années de souffrance. 

Pendant ces 8 années au sein de l'organisation, Lucas Le Gall ne s'est jamais senti à sa place. L'envie de s'échapper a commencé à germer très tôt. Mais alors qu'il va avoir 18 ans, une ultime mission confiée par la secte, le convainc définitivement de passer à l'action. "Ça impliquait des chantages, des filatures, de montées de fausses affaires d'adultères, de faire des scandales", retrace-t-il. 

À ce moment-là, Lucas est aux Etats-Unis, plus précisément en Californie depuis 1 an et demi. Le repère de l'organisation se situe en bas d'une chaîne de montagnes. Réussir à s'en échapper, relève de l'exploit : si dans la plupart des sectes, l'emprise est avant tout psychologique, dans le cas de Lucas, la principale difficulté est physique. Le quartier d'habitations est contrôlé par des caméras de sécurité et des gardes. Et si par chance, il parvient à s'affranchir de ces deux obstacles, un dernier rempart se dresse face à lui, et non des moindres : "Il y a un grillage qui fait 5 mètres de haut, qui enceint l'ensemble de la base, avec une pique dans les deux sens pour empêcher de passer par-dessus", détaille-t-il. 

Une évasion savamment orchestrée 

C'était sans compter sur la malice, la détermination et la préparation du jeune garçon. Cela faisait déjà plusieurs mois qu'il planifiait son évasion, qu'il élaborait un plan infaillible. Il avait par exemple récupéré son passeport, grâce à stratagème très bien pensé. Le document administratif se trouvant dans un coffre-fort gardé par un code, il avait dû redoubler d'inventivité pour le découvrir. "J'ai organisé un cambriolage dans la résidence dans laquelle je logeais. Après quoi, je suis allé voir la trésorière en lui disant que j'avais peur qu'on me vole mon argent et que je voulais le mettre dans le coffre. Toutes les semaines, je venais mettre un peu d'argent dans le coffre. Si bien qu'au bout d'un moment, j'ai pu repérer la combinaison", explique Lucas. 

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Ainsi, grâce à ce tour de passe-passe, et à un peu de chance, il parvient, le jour de sa majorité, à s'échapper de cette prison religieuse, en passant par dessus la clôture. "Au prix de quelques écorchures, mais de toute façon je voulais partir", admet-il. Le voilà dans le désert californien, armé de son passeport et de 7 000 dollars. Lucas le traverse, prend le bus et s'apprête à monter dans un avion. 

Mais l'aéroport lui offre une dernière frayeur : alors qu'il va embarquer, direction Paris, son nom retentit dans les haut-parleurs du bâtiment. C'est le signe que des membres de la secte sont à ses trousses. Cela l'oblige à modifier sa destination à la dernière minute : ce sera finalement Berlin. "Une fois dans l'avion, à partir du moment où l'appareil a commencé à rouler sur le tarmac, j'avais fermé la porte, c'était derrière moi", souffle-t-il. 

Après une escale à Berlin, Lucas atterrit enfin dans la ville lumière. Et une difficulté peut en cacher une autre. Coupé du monde pendant 8 années, le jeune homme n'a aucun savoir-vivre, savoir être... Ni même la culture suffisante : "Quand je m'évade, je ne sais pas qui est Michael Jackson et ce qu'est Star Wars", explique-t-il. Il lui faudra une dizaine d'années pour imprimer les codes de notre société. 

Lucas Le Gall a aujourd'hui 60 ans, il vit toujours en France et estime être désormais bien intégré. De ses 8 ans de secte, il lui reste quelques traces : "une certaine méfiance des diseurs de bonnes aventures. Je suis très circonspect et je me méfie beaucoup de ces trucs qu'on répète en boucle sans qu'il y ait vraiment de substance derrière". Concernant l'Église de la scientologie, après que Lucas se soit positionné en "lanceur d'alerte", elle a décidé de porter plainte pour diffamation, avant d'abandonner les poursuites peu de temps après. 

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