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Coronavirus : qu'attend le personnel de l'hôpital public du "Ségur de la Santé" ?

ÉCLAIRAGE - Au Centre hospitalier du Sud Seine-et-Marne, les 900 personnes du site de Fontainebleau souhaitent retrouver des moyens humains et financiers.

Cela fait plusieurs années que le personnel soignant réclame plus de moyens
Cela fait plusieurs années que le personnel soignant réclame plus de moyens
Crédit : PASCAL PAVANI / AFP
Coronavirus : qu'attend le personnel soignant du "Ségur de la Santé" ?
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Anaïs Bouissou - édité par Esther Serrajordia

La première réunion du "Ségur de la Santé" a lieu ce lundi 25 mai. La grand-messe, qui démarrera par un discours du Premier ministre, doit enfin permettre une réforme et des revalorisations pour l’hôpital et les Ehpad.

Quelle est l’ambiance de l’hôpital public et qu’attendent les personnels, surtout dans ce contexte post-confinement ? Au Centre hospitalier du Sud Seine-et-Marne, sur le site hospitalier de Fontainebleau, ce sont 900 personnes qui gèrent les urgences, les hospitalisations et les 170.000 consultations par an.

C’est une grosse fourmilière, de brancards, de blouses blanches dont certaines ont une encolure verte. Ce sont les blouses des infirmiers que l'on retrouve dans leur local du service chirurgie. Leur première demande, c’est une augmentation de salaire. "Ça fait 20 ans que je suis infirmière, je gagne 2.100 euros", dit Ophélie, infirmière coordinatrice, "On n'est pas reconnu comme BAC+3 et on ne se rend pas compte du travail non-stop et de la responsabilité. On a la vie des gens entre nos mains". 

On nous fait des promesses mais il n'y a rien qui changera

Une aide-soignante

Chantal, elle, est cadre supérieure de santé. "Rien n’est logique dans nos rémunérations, le travail qu'on fournit et nos horaires. J'ai eu le malheur de compter sur les deux dernières mois, j'ai fait 450 heures en 8 semaines", dit-elle. 

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Et ce qui est très frappant, c’est que les réformes, les infirmières n’y croient plus. "Ce n'est pas d'aujourd'hui que les soignants et que l'hôpital crient au misère et au scandale. Les gens applaudissaient, on était merveilleux. C’est toute l’année qu’on fait ça. Depuis 10 jours, on se refait à nouveau engueuler. On est les derniers bourricots de la terre", disent-elles. 

À l’hôpital, les soins s’enchainent, il est 15 heures, et au détour d’un nouveau couloir, on croise deux aides-soignantes, Catherine et Patricia. "Moi je travaille depuis 7 heures ce matin, on s'est posé pour manger à 14 heures, et là on devrait déjà reprendre jusqu'à 19 heures", affirment-elles. 

Retrouver des moyens humains et financiers

Elles sont payées 1.500 euros en moyenne, mais leur demande criante, sans trop y croire, c’est d’être plus nombreuses pour travailler. "Aujourd'hui, je préfère une augmentation du personnel. Au niveau aide-soignant notre urgence c’est d’être trois le week-end. On vient de vivre une situation épuisante, on n'a pas pu prendre nos congés. On peut pas faire plus, on donne tellement de notre personne. On nous fait des promesses mais il n'y a rien qui changera", disent-elles. Ce n’est que face aux patients que les aides-soignants reprennent le masque du sourire.

Retrouver des moyens humains et financiers, c’est ce que demandent les soignants. Et ils demandent aussi que, pour une fois, on pense bien à tous les métiers de l'hôpital. On parle notamment des agents d’entretien, les agents des services hospitaliers. Ils sont juste indispensables au bon fonctionnement des soins, comme Véronique. 

"Ça fait 22 ans que je suis dans la fonction publique à l'hôpital en tant qu'agent hospitalier. Mon salaire est de 1.500 euros avec deux dimanches par mois. C’est très physique, on n'a pas besoin d'aller à la salle de sport. La désinfection, si vous ne l’aviez pas ça ne tournerait pas. Quand on parle de l'hôpital, il est vrai que les petits salariés on n'en parle jamais. Les gens qui travaillent en cuisine, aux poubelles, on a l'impression de ne pas exister", dit-elle. 

On se demande ce qu'on fait dans l'hôpital public

Lahcène Foudi, chef des urgences

Le personnel ne croit plus forcément à une nouvelle réforme. C’est un sentiment très partagé de ne plus vouloir, plus oser y croire. Et au-delà, ils le disent aussi tout ne sera pas qu’une question d’argent. 

C’est le sens de l’hôpital public qu’il va falloir retrouver, pour le chef des urgences Lahcène Foudi : "Dans les conditions qui deviennent de plus en plus pénibles, quand on regarde les collègues du privé, on se demande ce qu’on fait dans l’hôpital public. Et puis on se rappelle pourquoi on est là. Il y a une vraie éducation à avoir et à donner à la population pour savoir quand avoir recours aux soins urgents". 

Ce ne sera pas qu’une question d’argent non plus pour le directeur Benoit Fraslin qui demande aussi une gestion plus souple, moins cadenassée. "Les 15 dernières années, la multiplicité des contraintes c’est accélérée. Il faut maîtriser les budgets mais continuer à accueillir dans les meilleures conditions possibles les patients. Il faut essayer de moderniser l'hôpital mais en même temps on n'a pas les moyens de le faire. On joue un équilibre extrêmement fragiles dans des marges très serrées". 

Pour le directeur, réformer l’hôpital public, passera aussi nécessairement par une meilleure articulation entre les soins hospitaliers et les soins de la médecine de ville.

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