Il est 8h ce matin là, une trentaine de soignants en blouse verte, tasse de café à la main, sont en salle de réunion. Les médecins qui viennent de finir leur garde de nuit font le point avec eux, les traits tirés, sur les nouvelles admissions, sur l'état des patients. Ils font aussi le décompte du nombre de lits restants
Et ce matin là, ils sont tous pleins. "Je suis un des médecins titulaires du service. Là, clairement, depuis un an, notre activité consiste à prendre en charge les patients graves atteints de la Covid. Là, on est à un an et on est fatigués. On est un peu comme tout le monde. On a envie que ça s'arrête", nous dit Samuel, médecin réanimateur depuis douze ans.
Le travail est déjà harassant en temps normal, mais c'est bien cette pandémie qui l'a le plus épuisé. "La première vague a été exceptionnelle parce que c'était celle qui nous a le plus malmenés. Et après, j'ai l'impression que depuis novembre, on est dans un espèce de train-train comme ça, avec un peu de hauts et de bas. C'est un espèce de marathon psychologique. Je pense que l'on souffre tous des conditions dans lesquelles on vit en fait, plus qu'on ne travaille".
Samuel et les autres médecins quittent la salle de réunion pour rejoindre, un étage au dessus, les infirmiers, les aides soignants et bien sûr, leurs patients. Au cœur du service. Il y a ce qu'on appelle la console centrale. Des bureaux remplis de piles de dossiers, des ordinateurs et tous les murs sont tapissés de grands écrans où s'affichent en temps réel les constantes de chaque patient.
"Quand on est à la console, ça nous permet de voir tous les patients, de voir s'il y a des alarmes vitales comme c'est le cas par exemple à présent, de pouvoir contrôler ce que c'est", dit l'un d'eux.
Un voyant rouge qui vient de s'allumer. Blanche, infirmière, regarde vite ce qu'il se passe sur l'ordinateur. "Ça, c'est le signe d'une alarme vitale. Nous après on va pouvoir regarder dans quelle chambre c'est. Savoir s'il y a une action très immédiate à faire ou pas. Là, c'est un des patients Covid qui est un petit peu bas en saturation. Ma collègue va devoir aller le voir".
La saturation, c'est ce qui mesure le taux d'oxygène dans notre sang. Si elle est trop basse, ça veut dire que le cerveau n'est plus suffisamment irrigué. Une complication qui peut être mortelle et qui est très fréquente pour les formes graves du Covid.
"On va arriver devant la chambre d'un homme qui a le Covid et dont la saturation en oxygène est très, très basse justement. On a du mal à le stabiliser. Il est fort probable qu'on soit obligé de passer par l'intubation pour ce patient là pour essayer de mieux l'oxygéner. On a un autre patient Covid de 80 ans qui n'est pas intubé. Un autre qui va monter en unité de soins continus parce qu'il ne va pas trop mal et on va prendre un autre patient Covid qui va beaucoup plus mal à sa place", explique la soignante.
C'est devenu une habitude dans ce service, depuis un an, où l'on est obligé tous les jours de jongler pour libérer de nouveaux lits. Le service contient trente lits au total. Pas de chambre au numéro 13, c'est un chiffre qui porte malheur, surtout dans ce service, où la mort fait malheureusement partie du quotidien. Encore plus depuis la pandémie.
"Ce qui a été surtout frappant, c'est le nombre de morts. En fait, je crois que c'est ça qui restera dans l'esprit de tout le monde. Le patient qu'on laisse à la fin de la journée, qui est stable, on se dit que dans deux jours on le voit et puis on revient et en fait il est mort. Ça, je crois que c'est le truc qui m'aura le plus marqué. On n'a pas l'habitude de voir autant de personnes mourir ou des personnes se dégrader aussi rapidement", confie Blanche.
Alors, pour tenir psychologiquement depuis un an, on se dit que ça va s'arrêter et on s'appuie sur l'esprit d'équipe, explique Christelle, aide-soignante depuis 12 ans dans le service. "On essaie de galvaniser l'équipe. Dès qu'une personne n'a pas le moral, on essaie de lui dire qu'elle n'a pas le droit, qu'elle est en réanimation, qu'il y a des gens pires qu'elle derrière. Les gens ont besoin de nous, donc il faut y aller. On n'a pas le droit de se démoraliser face à la maladie. On n'a pas le droit", martèle la soignante.
Quand la première vague est passée chez nous. Martin Hirsch a demandé de l'aide métropolitaine pour soutenir les établissements en Guyane. "Il y a plusieurs personnes qui se sont proposées et on est partis en Guyane pour aider", explique Christelle, qui n'a connu aucun répit depuis un an. "La galère on y est déjà. Il faut surtout pas baisser les bras", dit-elle, avant de remettre ses gants, sa charlotte et ses lunettes de protection pour aller porter assistance à un nouveau malade.
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