"Lorsqu’on arrive là-bas, on a l’impression d’être dans le
Seigneur des Anneaux. Le mois dernier, Nicolas et sa compagne Alison se
sont offert une nuit dans une cabane en bois, perchée dans les arbres. "Je
n’avais pas pris de repos depuis cinq ans", explique ce tatoueur
originaire du Nord. Le temps d’un week-end, le couple a donc décidé de se
couper du monde, pour mieux se "ressourcer" dans une des maisons à
l’univers féerique de L’Arbre à Cabanes, en Haute-Marne.
Passer une nuit dans un hébergement de ce type est une pratique de plus en plus populaire, note Mathieu Malleret,
gérant de Cabanes de France. Cette plateforme numérique propose
à la réservation quelques 300 hébergements insolites en pleine nature parmi lesquels
cabanes, yourtes ou encore bulles transparentes. "Depuis le début de
l'année, nous avons enregistré
+30% de visites par rapport à l'année dernière, et c'était pareil l’année d’avant", se
réjouit-il. "C’est une tendance de fond."
Son site internet est d'ailleurs loin de proposer l’ensemble des
hébergements insolites de France. Si aucune donnée officielle du ministère du
Tourisme n’existe, Mathieu Malleret évalue le nombre d’hébergements de ce type
présents en France à "environ 600-700". L’engouement pour
l’insolite a commencé selon lui "au début des années 2000 avec les
roulottes" puis il s’est étendu à d’autres structures, jusqu’aux récentes
tiny houses, des maisons mobiles en bois à l’architecture minimaliste de
quelques mètres carrés.
En trente secondes d’immersion dans la nature, le stress baisse
Jordy Stefan, psychologue
"Tout cela correspond à un besoin des gens. Ils cherchent à sortir des sentiers battus, à expérimenter la nouveauté, à être au plus proche de la nature et à s'écarter complètement de leur mode de vie", analyse Mathieu Malleret. "C'est une clientèle plutôt urbaine, qui est stressée par son travail."
Chômage, guerres, inflation… "Lorsque la
société se tend, on a besoin de se détendre", résume le psychologue Jordy Stefan, qui a écrit sa thèse sur l’effet de la nature sur le corps humain. Cette dernière offre un cadre parfait pour se ressourcer. "La nature a quasiment un
effet immédiat : en trente
secondes d’immersion dans la nature, le stress baisse."
Pourquoi ? D’abord, la nature est "une beauté universelle", explique le docteur en psychologie, en citant le contre-exemple des tableaux de Dali qui peuvent plaire à certaines personnes mais pas à d’autres. "A priori la nature est constituée de formes simples, c’est une beauté qui plaît à tous. Nous pouvons nous plonger dedans sans que cela soit coûteux au niveau cognitif, c’est-à-dire que nous allons pouvoir reposer une partie de notre attention". Résultat: notre cerveau se repose, et dispose davantage d’attention à donner aux autres et à notre environnement.
D’autres courants de la psychologie attribuent les bienfaits de la nature à un retour aux sources. "Tous les besoins de base des humains peuvent être satisfaits par la présence de la nature", explique Jordy Stefan. "Cela soulève une question : est-ce la nature qui nous fait du bien ou le fait de ne pas être dans la nature qui nous fait du mal ?" Dès lors, le psychologue préconise des "piqûres de nature" de quelques heures à quelques jours.
Au printemps dernier, Anthony et sa compagne Laura ont passé six
jours dans une roulotte dans une ferme équestre des Pyrénées Orientales. Ce séjour s’est avéré un "bon compromis entre ce que j'envisageais comme
vacances en pleine nature (cabane rudimentaire avec le strict nécessaire,
douche à l'extérieur, plaque de cuisson à l'extérieur aussi, juste un lavabo à l'intérieur) et le minimum de
confort dont ma copine avait besoin pour se sentir bien (douche à l'intérieur, cuisine à l'intérieur, meilleure isolation)",
résume Anthony. "Finalement, comme on a eu un temps pluvieux, je n'étais
pas mécontent d'avoir ce petit confort !"
Aujourd’hui, Anthony voit ce séjour "comme une sorte
d'alternative à (sa) vie actuelle citadine. Un échappatoire." À la suite
d’une récente thérapie, cet ancien attaché de presse qui envisage aujourd’hui
une reconversion professionnelle, a décidé d’opérer "un retour aux choses
simples, au calme, à la nature, à la matière et à un certain
minimalisme." Lors de ce séjour en roulotte, "la proximité avec la forêt, le silence du
hameau et cette vue sur les Pyrénées dont on ne se laissait pas, suffisaient à
mon bonheur", résume-t-il.
Mireille Gravier loue une roulotte dans son oliveraie près de Carpentras (Vaucluse). Elle y accueille souvent des "gens qui ont vraiment envie de faire le vide complet". "Je trouve intéressant le petit cocon douillet qu’il est possible de créer à l’intérieur. Les gens qui viennent chez nous veulent le confort", confirme-t-elle. "Ils viennent se ressourcer pour deux-trois nuits".
Les hébergements les plus recherchés restent les cabanes dans
les arbres, note Mathieu Malleret de Cabanes de France. "Plus on est
haut, plus on est loin de ses préoccupations", résume-t-il. Quand je faisais des
cabanes petit, j'étais dans l'arbre et j'échappais à mes parents, j'échappais à
l'école et à tous les tracas
des adultes", se rappelle cet adepte qui en loue lui-même en Auvergne.
Parmi elles, le "Nis de Bisous", perchée à 13 mètres de haut – "une des
plus hautes de France". De ses cinq cabanes, "ce n’est pas la plus
jolie, mais c’est la plus demandée" par ses clients et ses clientes. Avec la hauteur, "ils échappent à leur quotidien".
Après avoir testé les cabanes dans les arbres, Cécile a opté
pour les cabanes flottantes. "C’est le meilleur endroit que j’ai fait
dans le style insolite", raconte cette musicienne. Sur le lac de Pélisse en Dordogne, elle et son compagnon ont passé 24 heures dans une des deux
habitations proposées à la location par Nicolas Tessier. "On met en
avant le calme et la sérénité du lieu", explique cet ex-informaticien
venu s’installer dans la région avec sa compagne "pour changer de
vie" et se lancer dans les chambre d’hôtes.
Situées à la surface de l’eau, les cabanes
tanguent légèrement. On y accède en barque et il est possible de pêcher dans le
lac. "C'est très dépaysant et efficace en peu de temps",
résume Cécile. Le psychologue Jordy Stefan acquiesce : même de brèves pauses
peuvent tout changer. "On sait par exemple que si vous faites une balade
en forêt de deux heures, vos défenses immunitaires augmentent de manière
significative pendant sept jours."
Un voyage en plein milieu d’une forêt de sapins, c’est ce que
propose Sandrine Wallet dans sa propriété à cheval entre le Cantal et la
Dordogne. Trois yourtes, tentes en toiles traditionnelles mongoles, "avec
un environnement complètement différent chacune", explique-t-elle. L’une
d’elle est même une yourte "triple", avec trois espaces - "la
seule en France" - et dispose d’un hammam. "Dormir dans un espace rond fait circuler l’énergie
et les gens se sentent automatiquement bien, c’est très cocon et ils s’approprient les lieux tout de
suite."
Après plusieurs nuits dans un refuge sur la route du GR54, un
chemin de randonnée autour du massif des Écrins, Antoine a passé une nuit à la Yourte des Ayes, refuge saisonnier qui ferme la moitié de l’année. "On a
l’impression de voyager, on se croirait dans le pays, et on a vraiment
l’impression d’y être", raconte-t-il.
La location de yourte est montée en puissance
Serge Feret, propriétaire de la Yourte Rouge (Eure-et-Loir)
"La location de yourte est montée en puissance, ça
marche très fort. Les gens cherchent autre chose", observe Serge
Feret qui après plusieurs voyages en Mongolie a décidé d’en rapporter une dans
ses bagages et de l’installer à proximité de son gîte, près de Dreux
(Eure-et-Loir). Selon lui, la yourte fournit un espace propice à l’intimité. "C’est circulaire, à l’intérieur on est obligé de dialoguer et de tenir
compte de l’autre."
Aujourd’hui, il partage volontiers sa passion pour la Mongolie -
où il est allé trois fois en famille - avec les quelques visiteurs qu’accueille La Yourte Rouge. "La moitié viennent me poser des
questions sur la Mongolie, ça
me fait plaisir."
"Dormir à la belle toile est quelque chose que je faisais
tous les ans avec mon petit frère et ma soeur, mais l’humidité nous obligeait à
rentrer", se rappelle Aurélie Corbet. Aujourd’hui installée à
Saint-André-sur-Sèvre, en Nouvelle-Aquitaine, elle propose deux hébergements à la toiture transparente pour observer les étoiles. "On a l’impression de dormir à
l’extérieur mais avec un certain confort puisque le lit est chauffé",
note-t-elle.
"C’est super agréable : on se couche il fait nuit, et
on voit les étoiles comme si on était dehors", confirme Lara, étudiante
en génie biologique en Normandie. "Le matin on se lève avec le lever de soleil,
juste à côté il y a un champ avec un cheval et un âne, des poules en libertés.
On est vraiment ancré dans la nature", résume-t-elle.
Au Val Joli, dans les Vosges, les bulles sont situées en plein
milieu d’un champ, à l’écart du reste de l’hôtel. "Il y a des cerfs qui
brament juste à côté des gens la nuit", rit Prescillia Midon,
réceptionniste. Le matin, au réveil, "il y a aussi beaucoup d’animaux, des
petites biches comme des petits oiseaux."
Phénomène plus récent, les tiny houses sont des maisons en bois
de quelques mètres carrés à l’architecture minimaliste. Montées sur roues,
elles peuvent être déplacées facilement. C’est précisément ce qui a séduit
Agnes et Frédéric Berard. Ce couple originaire d’Auvergne, fabrique des tiny
houses et en loue une pour des séjours allant d’un week-end à plusieurs
semaines. "C’était une des premières disponibles à la location",
explique Agnes Berard.
La petite maison, située dans le Parc Naturel du Livradois Forez, en Auvergne, ne peut accueillir qu’un couple. "Par exemple, j'ai eu
des personnes qui vivaient à Manille, ils ont passé trois jours où ils ont pu se ressourcer et se couper du
monde complètement", raconte Agnes Berard. "Pouvoir écouter les
oiseaux, voir parfois des petits lapins le matin… C’est presque devenu un luxe pour
certaines personnes."
Agriculteur en Mayenne, Rémi Rose propose une
tiny house à la location depuis mai 2017. La plupart de ses clients sont "des gens qui recherchent un hébergement type tiny, des gens qui veulent
en construire une pour eux", observe-t-il. C’est le cas de Géraldine qui
s’est rendue quelques jours en famille au Vallon des 5 roses. "La tiny était vraiment bien
conçue, raconte-t-elle. Ce
qui est chouette c’est que comme le plafond est très haut on n’a pas du tout
l’impression d’oppression, on se sent à l’aise." Il faut cependant aimer, selon elle, la "promiscuité". "Pour les amoureux c’est sympa aussi, c’est
cocooning".
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