Il est l'un des pires collabos du régime de Vichy, même si son nom est peu connu. Joseph Darnand est surnommé le "bourreau des Français". Antisémite, anticommuniste et antigaulliste, Darnand est le numéro 1 d'une organisation pro-nazie : la Milice, à l'origine de centaines d'assassinats et d'arrestations de juifs et de résistants.
Darnand n'a pas toujours été un salaud. Il a même été un grand soldat, en particulier pendant la Première Guerre mondiale. C'est même en partie grâce à son héroïsme qu'en 14-18, la France va faire un grand pas, un pas décisif vers la victoire face à l'Allemagne. Pour cela, Joseph Darnand fait partie des trois seuls Français à avoir reçu le titre d'Artisan de la Victoire.
Mais voilà, après guerre, Joseph Darnand est frustré. Il vomit même la République, celle qu'on appelle la gueuse dans les milieux d'extrême droite, et il adore les régimes autoritaires avec des chefs à poignes qui savent se faire obéir. Alors il s'engouffre dans la collaboration. Mais pas dans le genre pantouflard à quémander un poste de ministre à Pétain, non. Pour lui, le régime de Vichy n'est qu'un ramassis d'opportunistes froussards. Ce que veut Darnand, c'est de l'action, du combat.
De taille moyenne, baraqué, trapu, il a le visage buriné, le regard bleu-vert, une fine moustache et toujours une clope au bec. La première fois que l'on entend parler de Joseph Darnand, c'est dans les derniers mois de la première guerre mondiale. Il a alors 21 ans. Ce jeune homme, issu d'un milieu catholique et rural de la Bresse, aux origines très modestes, et contraint de quitter l'école à 14 ans pour partir en apprentissage, est un soldat exemplaire. Et il va bientôt devenir un vrai héros.
Le 14 juillet 1918, en Champagne, le sergent Darnand et ses hommes brisent les lignes allemandes. 27 soldats ennemis sont capturés, mais surtout, le jeune Darnand et les membres de son commando vont réaliser un exploit à peine pensable. À plus d'un kilomètre à l'intérieur des lignes ennemies, ils vont ramener une sacoche en cuir dans laquelle se trouvent les plans d'une gigantesque offensive allemande prévue dès le lendemain et baptisée Friedensturm.
L'empereur d'Allemagne a même quitté Berlin et est venu à Reims pour assister à cette offensive qui doit mobiliser plus d'un million de soldats allemands. Par son courage, Darnand vient de porter un sérieux coup à l'Allemagne et il va permettre aux alliés de s'ouvrir la voie de la victoire. Pour ses faits d'armes, Darnand est décoré sept fois. Il reçoit notamment la médaille militaire des mains d'un certain général Pétain, alors commandant en chef de l'armée française. Joseph Darnand est même le seul soldat à se voir décerner après la guerre le titre d'Artisan de la Victoire remis uniquement au maréchal Foch et à Georges Clémenceau.
Darnand est l'un des meilleurs combattants de 14-18. Pas vaniteux, il s'attend à une promotion, mais rien ne vient. Après l'armistice, la guerre continue : en Orient, il est envoyé à des kilomètres pour combattre en Turquie et en Syrie. Dépité, Darnand quitte l'armée et le héros de 14-18 devient un petit employé qui a du mal à joindre les deux bouts. D'abord manutentionnaire dans un magasin de meubles, puis bûcheron dans le Jura, puis déménageur à Nice.
Darnand a une épouse, Antoinette, avec laquelle il a deux fils, mais il est aigri. C'est un homme qui vit mal de s'être fait jeter du jour au lendemain après cette première guerre mondiale. Il a la haine contre la Troisième République. Il veut la renverser et voir naître à sa place un régime autoritaire.
Au moment du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, Joseph Darnand s'illustre de nouveau sur le champ de bataille. Membre des corps francs, des unités envoyées en première ligne pour combattre les Allemands, il va jusqu'à remonter les lignes ennemies pour récupérer le corps de son chef, de son ami qui vient d'être tué au combat. Cet exploit permet d'ailleurs à Joseph Darnand de faire la couverture du magazine Match. Il est nommé officier de la Légion d'honneur.
Joseph Darnand prend ensuite la tête de la Milice. Il s'agit d'une petite copie version française de la SS qui reprend le geste du bras droit levé. Elle compte 25.000 membres. La Milice coopère avec la Gestapo, arrête des juifs, commet des massacres contre des résistants camouflés dans le maquis et contre ceux qui ne veulent pas travailler en Allemagne dans le cadre du STO, le service du travail obligatoire.
Comme beaucoup de collabos, Darnand sent le vent tourner depuis le débarquement allié en Afrique du Nord quelques mois plus tôt. D'ailleurs, cet officier français a-t-il un véritable socle idéologique ? La question reste posée. À l'été 1943, Darnand prend contact avec la Résistance à Londres. De Gaulle et Jean Moulin sont informés de ce possible ralliement. Par deux fois, il aurait pu y rentrer, mais il n'a jamais donné suite.
Cette fois, le contexte a changé. Hitler et Mussolini vont perdre la guerre. Mais De Gaulle, finalement, refuse ce ralliement. Le Führer ordonne que Darnand soit nommé à un ministère important, dans le gouvernement de Vichy. Son chef, Pierre Laval, nomme Darnand secrétaire général au maintien de l'ordre à la place de René Bousquet, le principal organisateur de la rafle du Vel d'Hiv en juillet 1942. Darnand devient le numéro 2 du gouvernement de Vichy. Installée à Vichy.
Lorsqu'il est soudainement arrêté par un agent des services spéciaux britanniques, interrogé à Milan par des officiers français, Darnand révèle alors sa véritable identité. Transféré à la prison de Fresnes où croupissent plus de 5.000 collabos, il est entendu comme témoin dans le procès du maréchal Pétain devant la Haute Cour de Justice. Et c'est là qu'il paraît, le 3 octobre 1945, dans une salle d'audience pleine à craquer.
Cheveux gris, coupé court et rosette de la Légion d'honneur, bien en évidence, Darnand va connaître un procès expéditif : cinq heures montrent en main. À l'unanimité, la peine de mort est proclamée. Le 10 octobre 1945, au fort de Châtillon, quand il est conduit au peloton d'exécution, Darnand entonne l'hymne de la Milice, le chant des cohortes. Puis, il est fusillé, et comme le veut le protocole, un soldat achève Darnand, de deux balles dans la tête.
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