Élisabeth Báthory : qui était la "comtesse sanglante" derrière la légende de Dracula ?

Le 29 décembre 1610, la poignée d'hommes menée par György Thurzо́, un palatin missionné par Mathias II de Habsbourg, le roi de Hongrie, progresse difficilement jusqu'à la forteresse de Čachtice, perdue dans les montagnes de l'Europe centrale. Ils viennent élucider d'étranges disparitions survenues autour du château. 

Une fois entre les murs de ce véritable nid d'aigle, les visiteurs sont assaillis par l'odeur pestilentielle de la mort. Un domestique gît dans le jardin. Au détour d'un couloir, une douzaine de femmes décharnées agonisent à même le sol. Le petit groupe finit par retrouver la propriétaire. Elle est dans sa chambre et s'admire devant le miroir. En effet, la comtesse Élisabeth Báthory est obsédée par son reflet qu'elle ne veut jamais voir vieillir. Et pour ce faire, elle est prête à commettre le pire. 

Élisabeth Báthory voit le jour en 1560 dans une famille aristocratique, l’une des plus anciennes et des plus puissantes de Transylvanie. Mais les Báthory souffrent de troubles mentaux en raison des mariages consanguins et des relations incestueuses. Un oncle confond l’été avec l’hiver. Un autre se plaint d’être possédé par le diable. Malgré une génétique défectueuse, la fillette profite tout de même d'une très bonne éducation. Elle lit et écrit le latin ainsi que le grec. 

Une adepte de la magie noire

L'heure des fiançailles sonne l'année de ses 11 ans. Elle intègre la famille de son lointain cousin, le comte Ferenc Nádasdy. Aussitôt arrivée, aussitôt remarquée pour ses coucheries avec un domestique. Le malheureux sera castré puis exécuté pour cet affront. Cet épisode passé, Nádasdy et Báthory se marient. Il a 19 ans. Elle en a quatre de moins. De leur union, naîtront cinq enfants, dont deux mort-nés. 

C’est au château de Čachtice que les mariés s’installent. Mais Ferenc Nádasdy, commandant en chef de l’armée hongroise, est souvent absent. Il fait la guerre contre les Ottomans qui menacent le royaume. Pendant ce temps, son épouse habille la forteresse et gère ses vastes domaines. En parallèle, elle s’intéresse à l’occultisme et à la magie noire, des pratiques très en vogue à l’époque. À son service, se succèdent herboristes, alchimistes et magiciens lui procurant tous types de remèdes contre le vieillissement. 

En 1604, la comtesse hérite d'une immense fortune. Son mari, Ferenc Nádasdy, est mort sur le champ de bataille. La mort et la vieillesse, c'est bel et bien le combat d'Élisabeth Báthory. À 44 ans, elle veut en paraître vingt de moins. Alors, pour défier le temps, elle se met en quête de chair fraîche. Dans les caves de sa forteresse, la tortionnaire, accompagnée d'une sorcière, un nain et une confidente, sévit sur de jeunes femmes vierges qu'elle a enlevées. Les victimes sont fouettées jusqu'au sang. Amputées des parties les plus sensibles avec des tenailles en argent et le fer rouge enfoncé dans la gorge. 

Les 600 victimes de "l'ogresse des Carpates"

Tel un vampire, la veuve mord certaines de ses prises jusqu'au sang. Adepte des bains de jouvence, elle découpe aussi leurs doigts et perce leurs veines afin d'accumuler un maximum de liquide hémoglobinique. Mais son entreprise s'avère de plus en plus ardue. Les familles alentours protègent désormais leurs jeunes filles. Élisabeth Báthory invente alors des cours d'apprentissage aux règles de bienséance pour piéger les nobles. C'est d'ailleurs en capturant une femme de la haute société, proche du roi de Hongrie, qu'elle attirera l'attention des autorités.

Nous sommes en 1610. La comtesse est assignée à résidence dans son château, dans l'attente de son jugement. Le jour du procès, ses dames de compagnie, les responsables de la prison de Čachtice défilent à la barre. Une servante estime à plus de 600 personnes les victimes de sa maîtresse. Le verdict tombe. Le gnome est décapité puis jeté au feu, deux servantes sont brûlées vives et une autre emprisonnée à vie. Báthory l'est aussi mais dans sa chambre où toutes les issues ont été murées.

Élisabeth Báthory s'éteint en 1614, à l'âge de 54 ans. Sa légende lui survivra. Au XVIIIe siècle, un prêtre jésuite raconte à qui veut l'entendre l'histoire de la "comtesse sanglante". Ses mots reviendront, un siècle plus tard, aux oreilles de Bram Soker. L'écrivain reprendra en partie la vie de celle que l'on surnomme également "l'ogresse des Carpates" pour écrire Dracula. 

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